Pantoums 2023-04-30T22:13:26+00:00

PANTOUMS!

(L’expérience d’écriture des pantoums s’est étendue du 18 mars 2020 au 9 mai 2021.)

La poésie en temps de pandémie ? Pan ! Elle vise le cœur, y parvient sûrement. Panégyrique, pourquoi pas ? Ici pas de panorama – mais l’espoir de donner forme à l’informe, visage à l’invisible. Soif pantagruélique de sens ! Partageons, partageons… Pas de pangolin, non, assez ! mais des pancartes et autres supports avec des signes tracés – des mots, oui – plus loin essaimés. Ce n’est pas la panacée, mais qui veut dans sa panoplie d’exercices casaniers, hors de cette panade, faire chauffer plume et clavier, peut dans le pantoum se lancer ! Oui, le pantoum ! C’est une forme fixe, poétique, dont le nom vient du malais (comme celui du pangolin ; la boucle est bouclée) à faire vivre et puis pan ! voyager sur la toile, par poste, comme vous voulez, pour atteindre les têtes et les cœurs pantelants ! Pantoums plutôt que pandémie dans les poumons ! Respirez donc la poésie, inspirez à fond, de l’air confiné peut-être, mais en constante réinvention. Pas de panique, donc, mais de la concentration – sur ce que l’on pense et ressent, à quoi l’on peut donner forme et offrir en butin à l’humanité. Non pour le panthéon, mais l’ici maintenant, ensemble, avec panache et sous le charme de la poésie en partage.

Pantoum: une présentation vidéo produite par la RTS

Pantoum, sobre définition :

  • Suite de quatrains à forme fixe (octosyllabes ou décasyllabes à rimes croisées), dont le nombre est illimité mais doit être supérieur à six ;
  • Les deuxième et quatrième vers de chaque strophe sont repris pour les premier et troisième vers de la suivante ;
  • Le dernier vers du poème reprend le premier ;
  • Les thèmes développés alternent les préoccupations intérieures et extérieures…

A vous de jouer !

Vos pantoums, envoyés par le formulaire de contact de mon site, sont ajoutés ci-dessous, numérotés, par ordre d’arrivée.

A ce jour, merci à Walter Rosselli, Florence Panza, Orélie Fuchs, Sabine Dormond, Gilles F. Jobin, Tessa Panza, Mélisende Navarre, Loïc Degen, Nicolette Ostrini, Gerold Ehrsam, Remy Degen, Manuela Gay-Crosier, Patrice Duret, Bruno Baschung, Alexandre Wälti, Denise Mützenberg, Isabelle Rérat, Claire Kraehenbuhl, Valérie Lobsiger, Sophie Grail, Pierre-Yves Lador, Jo(sette) Pellet, Léonie Dobler, Muriel Cornu, Jean Pretôt, François Cornu et Bastien Fournier pour leurs pantoums!

Les pantoums sont bienvenus dans toutes les langues (pour l’instant, principalement en français mais aussi en italien, allemand, en langue da Prons et en indonésien)!

Pantoum / 190

Ma mère cette complice

Avait sorti pour l’occasion

Le service à narcisses

La nappe de confirmation

*

Avait sorti pour l’occasion

Collier de perles, hauts talons

La nappe de confirmation

Son plus élégant pantalon

*

Collier de perles, hauts talons

Sa verve exquise et délicate

Son plus élégant pantalon

L’épouse virait renégate

*

Sa verve exquise et délicate

Ses yeux à la Greta Garbo

L’épouse virait renégate

J’aimais quand elle faisait son show

*

Ses yeux à la Greta Garbo

Pétrifiaient plus d’un gougnafier

J’aimais quand elle faisait son show

Joie de voir des mâles bafouiller

*

Pétrifiaient plus d’un gougnafier

Mon père voulait qu’elle se taise

Joie de voir des mâles bafouiller

La tuerait pour cette parenthèse

*

Mon père voulait qu’elle se taise

Pour l’heure elle en profitait

La tuerait pour cette parenthèse

La pousserait à regretter

*

Pour l’heure elle en profitait

Ainsi c’est vous le directeur

La pousserait à regretter

L’autre enfla comme un seigneur

*

Ainsi c’est vous le directeur

Enchantée de vous rencontrer

L’autre enfla comme un seigneur

Elle le toisa tel un taré

*

Enchantée de vous rencontrer

« Moi-z-aussi », rouge écrevisse

Elle le toisa tel un taré

Ma mère cette complice

Valérie Lobsiger / 9.5.21

Pantoum / 189

Tulipe est fleur modeste

Il était du genre à dicter

Tes goûts, tes couleurs, tes gestes

Peste soit de la parenté

 *

Il était du genre à dicter

Je n’ai pas fini de parler

Peste soit de la parenté

Factice prophète fêlé

 *

Je n’ai pas fini de parler

L’humour, pas sa tasse de thé

Factice prophète fêlé

Un mot et tu perds ta fierté

 *

L’humour, pas sa tasse de thé

Tulipe ploie mais ne choit pas

Un mot et tu perds ta fierté

Fendue sous le fat catalpa

 *

Tulipe ploie mais ne choit pas

Plus tu rases dru, plus ça repousse

Fendue sous le fat catalpa

Barberousse en son fort glousse

 *

Plus tu rases dru, plus ça repousse

Sous terre, le bulbe en hiver

Barberousse en son fort glousse

Cautère ta colère douce-amère

 *

Sous terre, le bulbe en hiver

Vadrouille en rêve à l’ouest

Cautère ta colère douce-amère

Tulipe est fleur modeste

Valérie Lobsiger / 21.4.21

Pantoum / 188

C’est le printemps, oui, mais en moins léger

Un soleil usé jusqu’à la corde

Toutes les fleurs des fruitiers ont gelé

On se méfie de ce qui déborde

*

Un soleil usé jusqu’à la corde

Peine à briller sur les plants avortés

On se méfie de ce qui déborde

A quoi donc ressemblera cet été ?

*

Peine à briller sur les plants avortés

Les pensées creusent en boucle un sillon

A quoi donc ressemblera cet été ?

On est charmés par tous les à quoi bon

*

Les pensées creusent en boucle un sillon

Comment lâcher bride, lest et prise ?

On est charmés par tous les à quoi bon

Le sommeil en refuge ? Méprise

*

Comment lâcher bride, lest et prise ?

Pour retrouver en soi du sauvage ?

Le sommeil en refuge ? Méprise

Horizon de rêves en mirages…

*

Pour retrouver en soi du sauvage ?

Mordre à pleine bouche le fruit du temps

Horizon de rêves en mirages…

Cracher au loin les larmes et le sang

*

Mordre à pleine bouche le fruit du temps

Toutes les fleurs des fruitiers ont gelé

Cracher au loin les larmes et le sang

C’est le printemps, oui, mais en moins léger

Odile Cornuz / 15.4.21

Pantoum / 187

A Paris valsent enlacés

Nostalgiques des guinguettes

Les désaxés du feu sacré

Amateurs de la casquette

*

Nostalgiques des guinguettes

Veines par la Seine soudées

Amateurs de la casquette

Contant un tango pommadé

*

Veines par la Seine soudées

L’œil du prince me fixait

Contant un tango pommadé

L’odeur du fleuve m’annexait

*

L’œil du prince me fixait

Je m’étais mise à danser

L’odeur du fleuve m’annexait

A l’aise comme un cétacé

*

Je m’étais mise à danser

Dans les bras d’un Julot noué

A l’aise comme un cétacé

Dans mon dos sa main me clouait

*

Dans les bras d’un Julot noué

L’été tâtonnant de moiteur

Dans mon dos sa main me clouait

L’autre me calculant agioteur

*

L’été tâtonnant de moiteur

Enfin l’Adonis dans mes bras

L’autre me calculant agioteur

Entortillé comme un cobra

*

Enfin l’Adonis dans mes bras

Me corrige, maître d’école

Entortillé comme un cobra

Et moi je rate mon envol

*

Me corrige maître d’école

Me privant de mon opiacé

Et moi je rate mon envol

A Paris valse enlacée

Valérie Lobsiger / 14.4.21

Pantoum / 186

Y’a des gens qui savent pour deux

Agir pour le bien des autres

Quand ils don Quichottent pour eux

En t’engluant de patenôtres

*

Agir pour le bien des autres

Veulent s’immiscer dans ta tête

En t’engluant de patenôtres

Te déplumer telle l’alouette

*

Veulent s’immiscer dans ta tête

Ils osent s’inviter d’emblée

Te déplumer telle l’alouette

Pour t’emmêler le cervelet

*

Ils osent s’inviter d’emblée

T’empoisonnent de compliments

Pour t’emmêler le cervelet

Et t’encenser de faux serments

*

T’empoisonner de compliments

Oublieux des civilités

Et t’encenser de faux serments

A la fin c’est toi qu’es souillé

*

Oublieux des civilités

Ils te disent t’es pas poli

A la fin c’est toi qu’es souillé

Et tu t’excuses d’être avili

*

Ils te disent t’es pas poli

Ton nid n’est pas confortable

Et tu t’excuses d’être avili

Mais ça ira, c’est potable

*

Ton nid n’est pas confortable

Servi les deux pieds sous l’assiette

Mais ça ira, c’est potable

Amadouons la marionnette

*

Servi les deux pieds sous l’assiette

Ce qui est à toi est à moi

Amadouons la marionnette

Pas de quoi crier à la noix

*

Ce qui est à toi est à moi

Parce que toi, crétin, t’oses pas

Pas de quoi crier à la noix

Noyé dans tes mea-culpa

*

Parce que toi, crétin, t’oses pas

Si tu sais pas bien te défendre

Noyé dans tes mea-culpa

On t’entendra le jour des cendres

*

Si tu sais pas bien te défendre

T’avais qu’à pas vouloir naître

On t’entendra le jour des cendres

Pas plus haut qu’un centimètre

*

T’avais qu’à pas vouloir naître

Souffrir tel le bon apôtre

Pas plus haut qu’un centimètre

Tu crois quoi ? T’es pas des nôtres

*

Souffrir tel le bon apôtre

Et s’affadir sans foi ni feu

Tu crois quoi ? T’es pas des nôtres

Y a des gens qui savent pour deux

Valérie Lobsiger / 7.4.21

Pantoum / 185

Hier on m’a volé une heure
Et les resquilleurs du sommeil
Noceurs ravaudés sans splendeur
Ont fait basculer mon soleil
*
Et les resquilleurs du sommeil
Apothicaires impétrants
Ont fait basculer mon soleil
Droguant mon repos errant
*
Apothicaires impétrants
Décrètent : meurs un autre jour
Droguant mon repos errant
Lève-toi car ton temps est court
*
Décrètent : meurs un autre jour
Rythment ma vie cul-de-jatte
Lève-toi car ton temps est court
Marre des messies autocrates
*
Rythment ma vie cul-de-jatte
Savent ce qui est bon pour moi
Marre des messies autocrates
Je veux sortir du jeu de l’oie
*
Savent ce qui est bon pour moi
L’ogre parle de résultats
Je veux sortir du jeu de l’oie
Quand abondent les duplicatas
*
L’ogre parle de résultats
Moi je veux cueillir la groseille
Quand abondent les duplicatas
Réveiller la nuit les abeilles
*
Moi je veux cueillir la groseille
Ignorer les rats racoleurs
Réveiller la nuit les abeilles
Hier on m’a volé une heure

Valérie Lobsiger / 31.3.21

Pantoum / 184

on croit l’homme vivant

mais en fait il est mort

c’est un homme qui dort

que frôle un léger vent

*

mais en fait il est mort

de ce val aux abords

que frôle un léger vent

c’est l’été qu’on ressent

*

de ce val aux abords

insectes qu’on entend

c’est l’été qu’on ressent

où l’air est chargé d’or

*

insectes qu’on entend

enregistrer le temps

où l’air est chargé d’or

les arbres et le corps

*

enregistrer le temps

ça n’a rien d’un décor

les arbres et le corps

cameraman devant

*

ça n’a rien d’un décor

tous courent en avant

cameraman devant

bruits froissants du dehors

*

tous courent en avant

la caméra descend

bruits froissants du dehors

remonte plonge encore

*

la caméra descend

file jusqu’à bon port

remonte plonge encore

avance sans raccords

*

file jusqu’à bon port

dirait-on un enfant

avance sans raccords

ce n’est plus un enfant

*

dirait-on un enfant

couché quel est son sort

ce n’est plus un enfant

du rouge aux plis distors

*

couché quel est son sort

avec deux trous au flanc

du rouge aux plis distors

on croit l’homme vivant

Gilles F. Jobin / 5.2.2021

Pantoum / 183

Quoi encore ! C’est pas bientôt fini ?

On pourrait plus se toucher à peau nue ?

Ça se multiplierait à l’infini ?

Ce serait l’ultime déconvenue ?

*

On pourrait plus se toucher à peau nue ?

Mâcher le privilège de vivre

Ce serait l’ultime déconvenue ?

A rien y comprendre, sobre ou ivre…

*

Mâcher le privilège de vivre

Avaler, ma foi, il faut se nourrir

A rien y comprendre, sobre ou ivre…

Plus loin, plus haut, il faudrait secourir

*

Avaler, ma foi, il faut se nourrir

Mais les temps diffusent un goût amer

Plus loin, plus haut, il faudrait secourir

Ou alors s’enfuir, aller voir la mer

*

Mais les temps diffusent un goût amer

On ne sait pas. Faudrait-il inventer ?

Ou alors s’enfuir, aller voir la mer

S’imaginer plus heureux en été ?

*

On ne sait pas. Faudrait-il inventer ?

Toujours – en sa cabane intérieure

S’imaginer plus heureux en été ?

A siffloter sans compter les heures…

*

Toujours – en sa cabane intérieure

Ça se multiplierait à l’infini ?

A siffloter sans compter les heures

Quoi encore ! C’est pas bientôt fini ?

Odile Cornuz / 14.1.2021

Pantoum / 182

La neige s’est mise à tomber

Tu l’as déjà écrit ailleurs

Souviens-toi au printemps dernier

Prenait-elle Prendra-t-elle même couleur

*

Tu l’as déjà écrit ailleurs

C’était l’émoi d’une déroute

Prendra-t-elle même couleur

Se sont-ils tassés nos beaux doutes

*

C’était l’émoi d’une déroute

Nous autres ne savions que faire

Se sont-ils tassés nos beaux doutes

Ont-ils changé tous nos repères

*

Nous autres ne savions que faire

Avons su cru que c’était fini

Ont-ils changé tous nos repères

Lors nous nous sentions rajeunis

*

Avons cru que c’était fini

Que les peurs n’avaient fait qu’un tour

Lors nous nous sentions rajeunis

Tout hormis l’éternel retour

*

Que les peurs n’avaient fait qu’un tour

Attentifs à nos avenirs

Tout hormis l’éternel retour

Revenue la force d’agir

*

Attentifs à nos avenirs

Ne plus voir au ciel ces coins traits noirs

Revenue la force d’agir

Loin cette fêlure au miroir

*

Ne plus voir au ciel ces traits noirs

Et que le jour temps déjà tremblait

Loin cette fêlure au miroir

Que notre regard se cachait

*

Et que le temps déjà tremblait

À craindre encor les retombées

Que notre regard se cachait

La neige s’est mise à tomber

Gilles F. Jobin / 9.1.2021

Pantoum / 181

Où se cache-cache le courage ?

Dans les interstices des jours et nuits ?

Qui ne frémirait à son passage ?

La camarde rit et s’évanouit…

*

Dans les interstices des jours et nuits ?

La morgue déborde : du jamais vu

La camarde rit et s’évanouit

Combat inégal, d’avance perdu

*

La morgue déborde : du jamais vu

Comment ? Faudrait-il rattraper le temps ?

Combat inégal, d’avance perdu

Passé, filé, oublié – haletant…

*

Comment ? Faudrait-il rattraper le temps ?

Et quoi encore ! Vivre suffit, non ?

Passé, filé, oublié – haletant…

Respirer l’instant, plutôt : pas si con

*

Et quoi encore ! Vivre suffit, non ?

Porter son corps à travers la journée

Respirer l’instant plutôt : pas si con

Espoir perdu mais joie échevelée

*

Porter son corps à travers la journée

Le vouer aux plaisirs invisibles

Espoir perdu mais joie échevelée

Fouiller dans les rayons du sensible

*

Le vouer aux plaisirs invisibles

Qui ne frémirait à son passage ?

Fouiller dans les rayons du sensible

Où se cache-cache le courage ?

Odile Cornuz / 30.11.20

Pantoum / 180

Tous ces museaux sur mon ordinateur

Dans ma pupille accablée de lumière

Font comme un fond sonore, une rumeur

Qui m’atteint jusqu’au fond de ma chaumière

*

Dans ma pupille accablée de lumière

Je vois sans masque la bouche des gens

Qui m’atteint jusqu’au fond de ma chaumière

Pour délivrer des mots intelligents

*

Je vois sans masque la bouche des gens

Tous cultivés tous abreuvés de livres

Pour délivrer des mots intelligents

Le beau discours dont mon âme s’enivre

*

Tous cultivés, tous abreuvés de livres

Les bustes sont légion il s’en extrait

Le beau discours dont mon âme s’enivre

Plus sûrement qu’avec un Mercurey

*

Les bustes sont légion il s’en extrait

Un propos compétent où je demeure

Plus sûrement qu’avec un Mercurey

J’y articule un mot deux fois par heure

*

Un propos compétent où je demeure

Si longtemps que se tient la réunion

J’y articule un mot deux fois par heure

Si je réponds dans la conversation

*

Si longtemps que se tient la réunion

Je crains de n’être qu’un usurpateur

Si je réponds dans la conversation

A ces museaux sur mon ordinateur

Bastien Fournier / 26.11.2020

Pantoum / 179

Après l’été ce serait terminé !

Parce que le progrès – ou le savoir…

Eh quoi ! Pour sûr on pourrait s’embrasser !

Oubliées les visites en parloir

*

Parce que le progrès – ou le savoir…

Têtes bien faites et amulettes

Oubliées les visites en parloir

On reprendrait le fil de nos fêtes

*

Têtes bien faites et amulettes

Conjureraient le virus en un clic

On reprendrait le fil de nos fêtes

Avec toutes consciences en déclics

*

Conjureraient le virus en un clic

Quoi ? ce ne serait pas si facile ?

Avec toutes consciences en déclics

Il y aurait des clusters en ville ?

*

Quoi ? ce ne serait pas si facile ?

Combien de morts ? Plus d’un demi million ?

Il y aurait des clusters en ville ?

Contradictoires manifestations ?

*

Combien de morts ? Plus d’un demi million ?

Certains diraient « ça fait de la place »

Contradictoires manifestations

Certaines voudraient fuir dans l’espace

*

Certains diraient « ça fait de la place »

Eh quoi ! Pour sûr on pourrait s’embrasser ?

Certaines voudraient fuir dans l’espace

Après l’été ce serait terminé ?

Odile Cornuz / 21.8.20

Pantoum / 178

Certaines s’emplagent jusqu’à plus soif

Alors que la souffrance se déploie

Certaines avec leurs chiens font wouaf-wouaf

Alors que quelques centaines se noient

*

Alors que la souffrance se déploie

Certains ne pensent qu’à leurs vacances

Alors que quelques centaines se noient

Certains rêvent bateaux en partance

*

Certains ne pensent qu’à leurs vacances

Alors que tout climat se dégrade

Certains rêvent bateaux en partance

Alors que liberté rétrograde

*

Alors que tout climat se dégrade

Politiques ou autres coulisses

Alors que liberté rétrograde

Où sont les vertus réparatrices ?

*

Politiques ou autres coulisses

Certains veulent jouer prolongation

Où sont les vertus réparatrices ?

De gloire certains n’ont pas eu ration

*

Certains veulent jouer prolongation

Alors qu’on est saisis par l’urgence

De gloire certains n’ont pas eu ration

Alors que la mort devient tendance

*

Alors qu’on est saisis par l’urgence

Certaines avec leurs chiens font wouaf-wouaf

Alors que la mort devient tendance

Certaines s’emplagent jusqu’à plus soif

Odile Cornuz / 28.6.20

Pantoum / 177

Ce qu’on mesure sans le mesurer

Qui brille peu et pourtant éclaire

Qui ne crie jamais mais sait murmurer

Ce qu’on voit à travers une eau claire

*

Qui brille peu et pourtant éclaire

Ce qui vient de loin pour vibrer tout près

Ce qu’on voit à travers une eau claire

Qui colle à la peau, en pensées, en vrai

*

Ce qui vient de loin pour vibrer tout près

Qui s’ancre au fond de soi pour irradier

Qui colle à la peau, en pensées, en vrai

Ce qui vrille le hasard et les dés

*

Qui s’ancre au fond de soi pour irradier

Ce qui prend parfois du temps à nommer

Ce qui vrille le hasard et les dés

Qui se révèle dans l’intensité

*

Ce qui prend parfois du temps à nommer

Qui se partage vers le multiple

Qui se révèle dans l’intensité

Ce qui serait pour une fois simple

*

Qui se partage vers le multiple

Ce qui replace l’essentiel en soi

Ce qui serait pour une fois simple

Et qui ouvre surtout à d’autres voies

*

Ce qui replace l’essentiel en soi

Qui ne crie jamais mais sait murmurer

Et qui ouvre surtout à d’autres voies

Ce qu’on mesure sans le mesurer

Odile Cornuz / 21.6.20

Pantoum / 176

1

Écrire encore des pantoums ?

Oui je ne sais pas non j’hésite

De retour aux rimes en oum

C’est un peu comme des pépites

2

Oui je ne sais pas non j’hésite

A tous ces mots je me suis pris

C’est un peu comme des pépites

Un diamant noir ou de l’or gris

3

A tous ces mots je me suis pris

Un trapéziste sans filet ?

Un diamant noir ou de l’or gris

Un braconnier et ses collets ?

4

Un trapéziste sans filet ?

A l’aveugle de vers en vers ?

Un braconnier et ses collets ?

Entre les dents pas de revers

5

A l’aveugle de vers en vers ?

Ne tergiverse pas travaille

Entre les dents pas de revers

Va cours vole vaille que vaille

6

Ne tergiverse pas travaille

Qu’est-ce que je peux bien écrire ?

Va cours vole vaille que vaille

Et mon cheval pour cet empire

7

Qu’est-ce que je peux bien écrire

Je n’aime pas ce qui finit

Et mon cheval pour cet empire

Ah ne te crois pas tout permis

8

Je n’aime pas ce qui finit

Mais où sont ces rimes en oum

Ah ne te crois pas tout permis

Voilà j’ai fini mon pantoum

Gilles F. Jobin / 21.6.20

Pantoum / 175

« Il ne faut pas voir la réalité

telle que je suis » écrit Eluard

dans un livre habilement déployé

et sur les murs de la ville plus tard.

*

« Telle que je suis » écrit Eluard

ou pense et chante Nina Simone

et sur les murs de la ville plus tard

« young, gifted and black » elle fredonne.

*

Ou pense et chante Nina Simone

toute à l’évidence de son génie

« young, gifted and black » elle fredonne

et alentour l’émotion les saisit.

*

Toute à l’évidence de son génie

une enfant a franchi son premier pas

et alentour l’émotion les saisit

tandis qu’ailleurs un vieux passe à trépas.

*

Une enfant a franchi son premier pas

elle a vaincu, enfin, la gravité

tandis qu’ailleurs un vieux passe à trépas

donnant des leçons de légèreté.

*

Elle a vaincu, enfin, la gravité

sans prétendre pourtant à nul bonheur

donnant des leçons de légèreté

en appui démesuré sur le cœur.

*

Sans prétendre pourtant à nul bonheur

dans un livre habilement déployé

en appui démesuré sur le cœur

il ne faut pas voir la réalité.

Odile Cornuz / 14.6.20

Pantoum / 174

La floraison des salsifis des prés

et de plus en plus mes pantoums s’espacent

Un seul grand besoin de se libérer

lorsque chacun retrouve son espace ?

*

Et de plus en plus mes pantoums s’espacent

les relations faibles restent de mise

lorsque chacun retrouve son espace

désormais quarks et gluons lâchent prise

*

Les relations faibles restent de mise

mais les sous-bois n’y obéissent pas

alors que quarks et gluons lâchent prise

les voilà dans leur plus bel apparat

*

Les sous-bois, eux, n’y obéissent pas

orchis tacheté, géranium sanguin

les voilà dans leur plus bel apparat

elles se rangent au bord du chemin

*

Orchis tacheté, géranium sanguin

et la mélitte à feuilles de mélisse

déjà elle se range au bord du chemin

où le soleil entre les pins se glisse

*

Brille mélitte à feuilles de mélisse

aux délicates fleurs aux bords rosés

Delà l’orée où le soleil se glisse

la floraison des salsifis des prés

Walter Rosselli / 8.6.20

Pantoum / 173

D’ici ou d’ailleurs ? Il importe peu

Ailleurs se trouve ici pour certaines

Et le tour du monde ? C’est quand tu veux

Si l’imagination n’est pas vaine

*

Ailleurs se trouve ici pour certaines

Même tes proches paraissent lointains

Si l’imagination n’est pas vaine

Conçois que tu pourrais mourir demain

*

Même tes proches paraissent lointains

Sous cette armure qu’ils ont au dedans

Conçois que tu pourrais mourir demain

Que voudrais-tu leur dire encore avant ?

*

Sous cette armure qu’ils ont au dedans

De toi en eux restera un éclat

Que voudrais-tu leur dire encore avant ?

Qu’ils sont tes essentiels ? Tes trésors ? Là ?

*

De toi en eux restera un éclat

Et réciproquement vous brillerez

Qu’ils sont tes essentiels ? Tes trésors ? Là ?

Même si vous êtes éparpillés

*

Et réciproquement vous brillerez

De toutes vos facettes, généreux

Même si vous êtes éparpillés

Et même si aucun ne devient vieux

*

De toutes vos facettes, généreux

Et le tour du monde ? C’est quand tu veux

Et même si aucun ne devient vieux

D’ici ou d’ailleurs ? Il importe peu

Odile Cornuz / 5.6.20

Pantoum / 172

Ce jour de pluie, vu éclore une osmie

Nouvelle habitante sur ce balcon

Sortant de son bois creux, comme étourdie

Elle hésitait à voler pour de bon

*

Nouvelle habitante sur ce balcon

Qu’elle ne se fasse pas dévorer !

Elle hésitait à voler pour de bon

Hé, prédateurs, laissez-la butiner !

*

Qu’elle ne se fasse pas dévorer !

Elle a des trucs importants à vivre

Hé, prédateurs, laissez-la butiner !

De pollen, il faut qu’elle s’enivre

*

Elle a des trucs importants à vivre

Comme toi, comme moi – nous, en sommes

De pollen il faut qu’elle s’enivre

Nous ? Quelle ivresse pour notre pomme ?

*

Comme toi, comme moi – nous, en sommes

Savons-nous ce qui meut le squelette ?

Nous ? Quelle ivresse pour notre pomme ?

Ce qui serait bon pour notre tête ?

*

Savons-nous ce qui meut le squelette ?

Ce qui nous pousserait vers l’extérieur ?

Ce qui serait bon pour notre tête ?

Et pourquoi ne pas chérir la lenteur ?

*

Ce qui nous pousserait vers l’extérieur ?

Sortant de son bois creux, comme étourdie

Et pourquoi ne pas chérir la lenteur ?

Ce jour de pluie, vu éclore une osmie

Odile Cornuz / 4.6.20

Pantoum / 171

Signifie « circule dans le peuple »

Maladie pas que respiratoire

Certains fragiles elle dépeuple

Voici qu’elle marque notre histoire

*

Maladie pas que respiratoire

Echappe encore à la compréhension

Voici qu’elle marque notre histoire

Ebranle notre civilisation

*

Echappe encore à la compréhension

Scientifiques turbinant par milliers

Ebranle notre civilisation

Inflammation systémique à pallier

*

Scientifiques turbinant par milliers

Toux ? Orteils gonflés ? Ou lésions de peau ?

Inflammation systémique à pallier

Remdesivir ? Nom de code ? Pipeau ?

*

Toux ? Orteils gonflés ? Ou lésions de peau ?

Et l’inquiétude, où la chiffonner ?

Remdesivir ? Nom de code ? Pipeau ?

En savoir trop peut-être ou pas assez…

*

Et l’inquiétude, où la chiffonner ?

Penser que vivre avec sera coton

En savoir trop peut-être ou pas assez…

Epidémie parmi d’autres ? Ah bon…

*

Penser que vivre avec sera coton

Certains fragiles elle dépeuple

Epidémie parmi d’autres ? Ah bon…

Signifie « circule dans le peuple »

Odile Cornuz / 3.6.20

Pantoum / 170

Nulle ne se tient plus à deux mètres

Dans la rue un nuage de filles

Sur l’herbe quelques amours à naître

De jeunes gars qui déploient leurs billes

*

Dans la rue un nuage de filles

Scindé entre gaucherie et grâce

De jeunes gars qui déploient leurs billes

Ils s’avancent pour leur faire face

*

Scindé entre gaucherie et grâce

Le bal des hormones a donc repris ?

Ils s’avancent pour leur faire face

Elles reculent en poussant des cris

*

Le bal des hormones a donc repris ?

Il ponctuerait ce printemps sans contact ?

Elles reculent en poussant des cris

Certains pourraient user de plus de tact

*

Il ponctuerait ce printemps sans contact ?

Mais qui a volé l’odorat, le goût ?

Certains pourraient user de plus de tact

Faire du toucher un art, un atout

*

Mais qui a volé l’odorat, le goût ?

Caresser du regard, c’est un début

Faire du toucher un art, un atout

Apprenant les danses de sa tribu

*

Caresser du regard, c’est un début

Sur l’herbe quelques amours à naître

Apprenant les danses de sa tribu

Nulle ne se tient plus à deux mètres

Odile Cornuz / 2.6.20

Pantoum / 169

Et ce qui empêche de respirer ?

Violence raciale aux Etats-Unis

Alors qu’on pourrait tous se rassembler…

Comment faire, de la terre, un nid ?

*

Violence raciale aux Etats-Unis

Sur fond de ségrégation sociale

Comment faire, de la terre, un nid ?

Croire aux déclarations idéales ?

*

Sur fond de ségrégation sociale

Viser les effets de la pandémie

Croise aux déclarations idéales ?

S’efforcer de saisir les mains amies

*

Viser les effets de la pandémie

Après ceux qui n’y ont pas résisté

S’efforcer de saisir les mains amies

Pour se tenir debout devant l’été

*

Après ceux qui n’y ont pas résisté

A cet assaut de poumons et vaisseaux

Pour se tenir debout devant l’été

Que les vivants soient saisis d’un sursaut

*

A cet assaut de poumons et vaisseaux

Suivent des offenses d’humanité

Que les vivants soient saisis d’un sursaut

Tiens, on pourrait croire à l’égalité ?

*

Suivent des offenses d’humanité

Alors qu’on pourrait tous se rassembler

Tiens, on pourrait croire à l’égalité ?

Et ce qui empêche de respirer ?

Odile Cornuz / 1.6.20

Pantoum / 168

L’enfant patient frappe chaque vague

Accueille la suivante, obstiné

La coupe, sa main comme une dague

S’exclamant en vainqueur illuminé

*

Accueille la suivante, obstiné

Qui miroite encore un peu au soleil

S’exclamant en vainqueur illuminé

Vous aimeriez avoir aplomb pareil

*

Qui miroite encore un peu au soleil

Sur une plage du lac agité

Vous aimeriez avoir aplomb pareil

Lorsqu’il faut déployer sagacité

*

Sur une plage du lac agité

Sauriez-vous choisir le juste combat ?

Lorsqu’il faut déployer sagacité

Défendre ce que vous voulez ou pas ?

*

Sauriez-vous choisir le juste combat ?

Plutôt manifs, slogans, moulins à vent ?

Défendre ce que vous voulez ou pas ?

Se prendre pour Sisyphe ou un Titan…

*

Plutôt manifs, slogans, moulins à vent ?

Ou faire un pacte avec la nature ?

Se prendre pour Sisyphe ou un Titan…

Sans désespérer de joies futures

*

Ou faire un pacte avec la nature

Le cœur aiguisé comme une dague

Sans désespérer des joies futures

L’enfant patient frappe chaque vague

Odile Cornuz / 31.5.20

Pantoum / 167

le ciel a rangé ses avions
roues et ailes bien repliées
tous alignés en rang d’oignon
dans des cartons enficelés

pattes et ailes dépliées
il a ressorti ses oiseaux
de mille cartons ficelés
dans les champs et dans les roseaux

il a ranimé ses oiseaux
sur les toits et sur les chemins
dans les cœurs et dans les roseaux
ils chantent le soir le matin

sur la rue et sur les chemins
s’y rend-on à présent sans craintes
pour chanter le soir le matin
aurons-nous encore des plaintes

y court-on à présent sans craintes
comment vivons-nous qu’en dis-tu
aurons-nous encore des plaintes
on s’amusera mieux crois-tu

comment vis-tu qu’en faites-vous
et les fêtes sont de retour
où l’on s’aimera mieux crois-tu
on y danse chacun son tour

les manèges sont de retour
ils raccrochent leurs fiers lampions
on y tombe chacun son tour
la foudre a détruit leurs avions


Gilles F. Jobin / 31.5.20

Pantoum / 166

Attraper l’instant pour mieux l’observer

Considérer sa forme bizarre

Entre pouce et index, à gigoter

Voici encore un spécimen rare

*

Considérer sa forme bizarre

Mis à nu, hors de sa contiguïté

Voici encore un spécimen rare

Un moment biscornu à savourer

*

Mis à nu, hors de sa contiguïté

Incident, mot de travers ou charme

Un moment biscornu à savourer

Un événement qui vous désarme

*

Incident, mot de travers ou charme

Ligne invisible entre avant et après

Un événement qui vous désarme

Un truc à cogiter, voir de plus près

*

Ligne invisible entre avant et après

Transforme le visage du connu

Un truc à cogiter, voir de plus près

Figé, passé – bref : déjà advenu

*

Transforme le visage du connu

Alors que vous n’y aviez rien compris

Figé, passé – bref : déjà advenu

Dans le futur vous voilà déjà pris

*

Alors que vous n’y aviez rien compris

Entre pouce et index, à gigoter

Dans le futur vous voilà déjà pris

Attraper l’instant pour mieux l’observer

Odile Cornuz / 30.5.20

Pantoum / 165

Tu reprends le train et c’est différent

Comme décollés les uns des autres

Les gens s’égrènent, assez sagement

Moins de groupes – tout au plus par paires

*

Comme décollés les uns des autres

Les espaces urbains saucissonnés

Moins de groupes – tout au plus par paires

Prendrait-on goût à ces succédanés ?

*

Les espaces urbains saucissonnés ?

Distances et flèches – tout un parcours

Prendrait-on goût à ces succédanés ?

Vers l’oubli de la fête, des détours ?

*

Distances et flèches – tout un parcours

Regards noirs sur celle qui éternue

Vers l’oubli de la fête, des détours ?

L’oubli de ces bouches en formes nues ?

*

Regards noirs sur celle qui éternue

Seule une place sur quatre occupée

L’oubli de ces bouches en formes nues ?

Moindre déplacement : une épopée…

*

Seule une place sur quatre occupée

Autour se scellent de nouveaux pactes

Moindre déplacement : une épopée…

Les mini-poubelles sont intactes

*

Autour se scellent de nouveaux pactes

Les gens s’égrènent assez sagement

Les mini-poubelles sont intactes

Tu reprends le train et c’est différent

Odile Cornuz / 29.5.20

Pantoum / 164

Alors oui, ici, ça va – ça va mieux

A l’Ouest le compte des morts augmente

A l’Est les autocrates sont nombreux

Partout : justice sociale en vente

*

A l’Ouest le compte des morts augmente

Du Sud les nouvelles ne passent pas

Partout : justice sociale en vente

Comment faire mieux qu’avant ? Ne sait pas

*

Du Sud les nouvelles ne passent pas

Du Nord on admire l’étrangeté

Comment faire mieux qu’avant ? Ne sait pas

On espère un vaccin non breveté

*

Du Nord on admire l’étrangeté

Nulle part où pandémie s’ignore

On espère un vaccin non breveté

Close soit la boîte de Pandore

*

Nulle part où pandémie s’ignore

Sur cette urbaine tête d’épingle

Close soit la boîte de Pandore

Vue bleue de l’espace ou d’un autre angle

*

Sur cette urbaine tête d’épingle

Où s’animent les peines et les joies

Vue bleue de l’espace ou d’un autre angle

On chasse le spleen de n’être que soi

*

Où s’animent les peines et les joies

En tous points cardinaux on devient vieux

On chasse le spleen de n’être que soi

Alors oui, ici, ça va – ça va mieux

Odile Cornuz / 28.5.20

Pantoum / 163

Voilà : les cours en tout genre ont repris

Ça zigzague dans la ville à nouveau

Le marquage au sol, parvenu trendy

Aussi les masques – à qui le plus beau ?

*

Ça zigzague dans la ville à nouveau

Il faut bien vivre, chuchote l’une

Aussi les masques – à qui le plus beau ?

Mais pour la suite on est dans la brume

*

Il faut bien vivre, chuchote l’une

Et comment ne plus toucher personne ?

Mais pour la suite on est dans la brume

S’étend un désarroi qui résonne

*

Et comment ne plus toucher personne ?

Oh si loin des slogans libertaires

S’étend un désarroi qui résonne

Des mesures on fait l’inventaire

*

Oh si loin des slogans libertaires

Interdit d’interdire, c’était ça ?

Des mesures on fait l’inventaire

Devenus rationnels, on halte là

*

Interdit d’interdire, c’était ça ?

A toute injonction on était rétifs…

Devenus rationnels, on halte là

Flower power viré méditatif

*

A toute injonction on était rétifs…

Le marquage au sol parvenu trendy

Flower power viré méditatif

Voilà : les cours en tout genre ont repris

Odile Cornuz / 27.5.20

Pantoum / 162

Petite troupe, vingtaine d’enfants

Sans se donner la main, par deux, tendres

Sur cette rue ils piaillent, insouciants

Quel vieux bien ça fait de les entendre !

*

Sans se donner la main, par deux, tendres

Babil et pensées se suivent de près

Quel vieux bien ça fait de les entendre !

De suivre en leur sillage un bol d’air frais

*

Babil et pensées se suivent de près

Mais dans les corps ne niche aucun calcul

De suivre en leur sillage un bol d’air frais

Ramène toute angoisse au niveau nul

*

Mais dans les corps ne niche aucun calcul

Et me voici remuée d’émotion

Ramène toute angoisse au niveau nul

Le flot de ces petits caméléons

*

Et me voici remuée d’émotion

Comme découverte d’un continent

Le flot de ces petits caméléons

Qui changent la vie en la poursuivant

*

Comme découverte d’un continent

Alors que l’ailleurs, c’est bien les autres

Qui changent la vie en la poursuivant

Sans prétendre jouer les apôtres

*

Alors que l’ailleurs, c’est bien les autres

Sur cette rue ils piaillent, insouciants

Sans prétendre jouer les apôtres

Petite troupe, vingtaine d’enfants

Odile Cornuz / 26.5.20

Pantoum / 161

Envie de pas grand chose ce jour là

Rien que de s’asseoir par terre en tailleur

Peut-être lire ou alors même pas

Et aligner quelques accords mineurs

*

Rien que de s’asseoir par terre en tailleur

Ou se coucher pour observer le vent

Et aligner quelques accords mineurs

Suspendre ce qui vibre, trépidant

*

Ou se coucher pour observer le vent

Qui fait briller les feuilles au soleil

Suspendre ce qui vibre, trépidant

Et dire que demain sera pareil

*

Qui fait briller les feuilles au soleil

Dispersant paillettes sans y penser

Et dire que demain sera pareil

Sans savoir quelle position rêver

*

Dispersant paillettes sans y penser

Mon esprit flotte, désabusé, oui

Sans savoir quelle position rêver

La tête en compote – ou en hachis

*

Mon esprit flotte, désabusé, oui

Il faudrait sortir, faire autre chose

La tête en compote – ou en hachis

Submergée par ce qu’elle suppose

*

Il faudrait sortir, faire autre chose

Peut-être lire ou alors même pas

Submergée par ce qu’elle suppose

Envie de pas grand chose ce jour là

Odile Cornuz / 25.5.20

Pantoum / 160

Quelques années à tes côtés

Pour me réveiller chaque jour

Me dire qu’il faut te célébrer

Ne rien perdre de ton humour

*

Pour me réveiller chaque jour

Une plage libre devant moi

Ne rien perdre de ton humour

Où les oiseaux sont encore rois

*

Une plage libre devant moi

Je m’y élance le cœur battant

Où les oiseaux sont encore rois

Un reste d’enfance tout brûlant

*

Je m’y élance le cœur battant

Scellant un pacte de poésie

Un reste d’enfance tout brûlant

Je te promets d’être impolie

*

Scellant un pacte de poésie

Comme une pierre restée brute

Je te promets d’être impolie

Je m’accorde au son doux du luth

*

Comme une pierre restée brute

Le gage des plus beaux regards

Je m’accorde au son doux du luth

Qui dissipe tous les brouillards

*

Le gage des plus beaux regards

Entendre mon corps qui résonne

Qui dissipe tous les brouillards

Un jour vient le temps qui bourdonne

*

Entendre mon corps qui résonne

Dans mes oreilles j’entends petit

Un jour vient le temps qui bourdonne

Devenant des insectes l’amie

*

Dans mes oreilles j’entends petit

Plaquée, collée sur ma joue

Devenant des insectes l’amie

C’est une abeille qui fait la moue

*

Plaquée, collée sur ma joue

Puisqu’elle est là à mes côtés

C’est une abeille qui fait la moue

Appréhendant ce cuirassé

*

Puisqu’elle est là à mes côtés

Faire une grande fête, célébrer

Appréhendant ce cuirassé

La mort qui au cœur est brodée

*

Faire une grande fête, célébrer

La vie qui au temps est liée

La mort qui au cœur est brodée

Infiniment entrelacées

*

La vie qui au temps est liée

Instants je vais vous embrasser

Infiniment entrelacées

Vous qui êtes là à mes côtés

*

Instants je vais vous embrasser

Qui tend la joue qui tend ses lèvres ?

Vous qui êtes là à mes côtés

Ces heures qui jouent au lièvre

*

Quittant la joue quittant ses lèvres

Le monde, visage violacé

Ces heures qui jouent au lièvre

Quelques années à tes côtés

Orélie Fuchs / 25.5.20

Pantoum / 159

Je vis rose mais elles sont rouges

Je les voyais secs mais ils sont noyés

Fleurs de verveine dans le vent bougent

Et ma foi jaunissent les framboisiers

*

Je les voyais secs mais ils sont noyés

Se remettront-ils de ce mauvais tour ?

Oui ma foi, jaunissent les framboisiers

Alors que le reste fleurit autour

*

Se remettront-ils de ce mauvais tour ?

Comme ceux que la crise atteint – plein fouet

Alors que le monde fleurit autour

Ceux que le rire n’étreint plus, follet

*

Comme ceux que la crise atteint – plein fouet

Celles qui ne trouvent plus de repos

Ceux que le rêve n’étreint plus, follet

Celles qui en ont juste plein le dos

*

Celles qui ne trouvent plus de repos

Oui parce qu’elles sont noyées, aussi

Celles qui en ont vraiment plein le dos

Et s’interrogent : est-ce ça, ma vie ?

*

Oui parce qu’elles sont noyées, aussi

Sous des flots obscurs – repères perdus

Et s’interrogent : est-ce ça, ma vie ?

Qui ferait sens de ces malentendus ?

*

En des temps obscurs – repères perdus

Fleurs de verveine dans le vent bougent

Qui ferait sens de ces malentendus ?

Je vis rose mais elles sont rouges

Odile Cornuz / 24.5.20

Pantoum / 158

Approcher le mystère d’un livre

Serait donc la tâche du traducteur ?

Que la langue soit en équilibre

Nouvelle carapace, nouveau cœur

*

Serait donc la tâche du traducteur ?

Mouvoir la culture en contrebande

Nouvelle carapace, nouveau cœur

Retrouver l’émotion par la bande

*

Mouvoir la culture en contrebande

Et combien de chocs supporte un texte ?

Retrouver l’émotion par la bande

Les questions de l’auteur, l’intertexte

*

Et combien de chocs supporte un texte ?

S’interroge l’autrice qui récrit

Les questions de l’auteur, l’intertexte

Cela paraît-il vain en ce jour gris ?

*

S’interroge l’autrice qui récrit

Ces phrases valent-elles d’exister ?

Cela paraît-il vain en ce jour gris ?

Et de la traductrice, que penser ?

*

Ces phrases valent-elles d’exister ?

Secouent-elles autrement le monde ?

Et de la traductrice, que penser ?

Alors que se meurent les secondes ?

*

Secouent-elles autrement le monde ?

Que la langue soit en équilibre

Alors que se meurent les secondes

Approcher le mystère d’un livre

Odile Cornuz / 23.5.20

Pantoum / 157

Partie récolter les fleurs de sureau
Les grillons s’en donnent à cœur joie
Comme chaque année préparer le sirop
Odeurs de sous-bois et sens en émoi

Les grillons s’en donnent à cœur joie
Perspectives heureuses de plaisirs d’été
Odeurs de sous-bois et sens en émoi
D’un délicieux nectar à déguster

Perspectives heureuses de plaisirs d’été
Croisé quelques sportifs et promeneurs
D’un délicieux nectar à déguster
Souriants, l’air heureux dans la chaleur

Croisé quelques sportifs et promeneurs
Tout semble redevenu comme avant
Souriants, l’air heureux dans la chaleur
Je jouis de ce moment hors du temps

Tout semble redevenu comme avant
Deux moineaux se chamaillent sur la terrasse
Je jouis de ce moment hors du temps
Pendant que je prépare ma mélasse

Deux moineaux se chamaillent sur la terrasse
Le voisin d’en face fume sur son balcon
Pendant que je prépare ma mélasse
Fleurs, sucre, citrons, le mélange sent si bon

Le voisin d’en face fume sur son balcon
Plus de soleil, la pluie sur les carreaux
Fleurs, sucre, citrons, le mélange sent si bon
Partie récolter les fleurs de sureau

Nicolette Ostrini / 23.5.20

Pantoum / 156

Pour y penser il faut du temps
On en a eu tellement avant
Avant le déconfinement
Mais qu’en est-il maintenant?

On en a eu tellement avant
Les multiples occupations
Mais qu’en est-il maintenant?
Empêchent toute réflexion

Les multiples occupations
Reprise d’une vie à cent à l’heure
Empêchent toute réflexion
L’illusion d’un presque bonheur

Reprise d’une vie à cent à l’heure
Avec sa dure réalité
L’illusion d’un presque bonheur
Mais partout l’inégalité

Avec sa dure réalité
Des kilomètres de queue
Mais partout l’inégalité
Pour se nourrir un tant soit peu

Des kilomètres de queue
Un peu de solidarité
Pour se nourrir un tant soit peu
Coup de pouce à la précarité

Un peu de solidarité
Bienfait de cette situation
Coup de pouce à la précarité
L’âme humaine a encore du bon

Bienfait de cette situation
Il y a toujours des combattants
L’âme humaine a encore du bon
Pour y penser il faut du temps

Nicolette Ostrini / 23.5.20

Pantoum / 155

Mais dites, comment naît l’habitude ?

De l’acquis, du conquis, de l’oublié ?

Résiste-t-elle à l’incertitude ?

Y en a-t-il une qui soit votre alliée ?

*

De l’acquis, du conquis, de l’oublié ?

Comment trouver le cœur, les racines ?

Y en a-t-il une qui soit votre alliée ?

Franche telle une vieille copine ?

*

Comment trouver le cœur, les racines ?

Plus ou moins profonde que votre peau ?

Franche telle une vieille copine ?

Ou polie, sournoise comme un appeau ?

*

Plus ou moins profonde que votre peau ?

Ce qui soigne ou blesse à tous petits pas…

Ou polie, sournoise comme un appeau

Lorsque vous faites mais ne pensez pas

*

Ce qui soigne ou blesse à tous petits pas…

Quand les heures passent sans le vouloir

Lorsque vous faites mais ne pensez pas

Quand vous marchez sans souci de savoir

*

Quand les heures passent sans le vouloir

L’habitude annulerait donc l’effort ?

Quand vous marchez sans souci de savoir

Pousserait-elle – hop – à virer de bord ?

*

L’habitude annulerait donc l’effort ?

Résiste-t-elle à l’incertitude ?

Pousserait-elle – hop – à virer de bord ?

Mais dites, comment naît l’habitude ?

Odile Cornuz / 22.5.20

Pantoum / 154

Un planeur – haut – a traversé le ciel

De toute son enviable suspension

Les nuages moutonnent en pastel

Les martinets sifflent en formation

*

De toute leur enviable suspension

Ils se fichent du monde en déroute

Les martinets sifflent en formation

Un obèse traverse la route

*

Il se fiche du monde en déroute

A peine son hamburger digéré

Un obèse traverse la route

Sirote encor sa boisson préférée

*

A peine son hamburger digéré

Las, ses savates traînent sur le sol

Sirote encor sa boisson préférée

De se mouvoir il transpire du col

*

Las, ses savates traînent sur le sol

Mais aspirent à la légèreté

De se mouvoir il transpire du col

Levant les yeux, saisi par la beauté

*

Oui, aspirant à la légèreté

Il suit le vol gracieux, ragaillardi

Levant les yeux, saisi par la beauté

Par l’oiseau, par la carlingue grandi

*

Il suit le vol gracieux, ragaillardi

Les nuages moutonnent en pastel

Par l’oiseau, par la carlingue grandi

Le planeur – haut – a traversé le ciel

Odile Cornuz / 21.5.20

Pantoum / 153

Non, plus de patience avec les écrans

Pas seulement question de profondeur

Une fatigue sournoise te prend

Sans pointer, précise, nulle douleur

*

Pas seulement question de profondeur

De ce qui se trouve trop aplati

Sans pointer, précise, nulle douleur

Mais un mal diffus… et c’est reparti !

*

De ce qui se trouve – hop – aplati

Alors que le relief t’importe tant

Mais un mal diffus… et c’est reparti !

Ajoute à tes exigences un cran

*

Alors que le relief t’importe tant

Les ombres, les nuances, les non-dits

Ajoute à tes exigences un cran

Refuse le supposé paradis

*

Les ombres, les nuances, les non-dits

Ce qu’exhalent les corps, face à face

Refuse le supposé paradis

Dématérialisé à ta place

*

Ce qu’exhalent les corps, face à face

Retrouve-le à tout prix puis éteins

Dématérialisé à ta place

Le cristal liquide du monde feint

*

Retrouve-le à tout prix puis éteins

Une fatigue sournoise te prend

Le cristal liquide du monde feint

Non, plus de patience avec les écrans

Odile Cornuz / 20.5.20

Pantoum / 152

Etrange comme les jours résonnent

Parfois creux – ou à demi – ou trop pleins

C’est toi ou les autres qui déconnent ?

Pour décocher des signaux sibyllins

*

Parfois creux – ou à demi – ou trop pleins

Plus savoir où donner de la tête

Pour décocher des signaux sibyllins

Densifier les mystères en fête

*

Plus savoir où donner de la tête

Que faire de ces liens qui reprennent ?

Densifier les mystères en fête

Se méfier des réflexes en berne

*

Que faire de ces liens qui reprennent ?

En plantes pionnières sur la lande

Se méfier des réflexes en berne

Eviter l’invasion par la bande

*

En plantes pionnières sur la lande

Qui recouvriraient le sol, à force

Eviter l’invasion par la bande

Garder yeux ouverts, tête véloce

*

Qui recouvriraient le sol, à force

S’ils pouvaient projeter leur matière

Garder yeux ouverts, tête véloce

Si possible, ne pas trop s’en faire

*

S’ils pouvaient projeter leur matière

C’est toi ou les autres qui déconnent ?

Si possible, ne pas trop s’en faire

Etrange comme les jours résonnent

Odile Cornuz / 19.5.20

Pantoum / 151

Et vous, qu’avez-vous lu dernièrement ?

Qui vous ait transporté vers un ailleurs ?

Autre que récit de confinement…

Qui ait touché directement le cœur ?

*

Qui vous ait transporté vers un ailleurs ?

Sensibilité, vie, ou époque

Qui ait touché directement le cœur

Qui ait fait vibrer vos équivoques

*

Sensibilité, vie, ou époque

Responsable d’un bouleversement

Qui ait fait vibrer vos équivoques

D’un très inattendu chambardement

*

Responsable d’un bouleversement

Quelle scène, quelle phrase, quel mot ?

D’un très inattendu chambardement

Serait la cause, même incognito ?

*

Quelle scène, quelle phrase, quel mot ?

Aurait fulguré d’autres présences ?

Serait la cause, même incognito

D’un surplus d’amour, de connaissances ?

*

Aurait fulguré d’autres présences

Visé l’élargissement du monde ?

D’un surplus d’amour, de connaissances ?

Je chéris ces récits, je les sonde

*

Visé l’élargissement du monde

Autre que récit de confinement…

Je chéris ces récits, je les sonde

Et vous, qu’avez-vous lu dernièrement ?

Odile Cornuz / 18.5.20

Pantoum / 150

Quelle exception ? Mais celle du regard !

Celle qui pointe vers le renouveau

Celle qui permet de tout percevoir

Et qui chope les pensées au lasso

*

Celle qui pointe vers le renouveau

De ce qui pourtant semble le même

Et qui chope les pensées au lasso

Palpitantes – hop – pour le poème

*

De ce qui pourtant semble le même

Transforme le jour en fleurs nouvelles

Palpitantes – hop – pour le poème

Du quotidien nourrit l’escarcelle

*

Transforme le jour en fleurs nouvelles

Simplement en leur portant attention

Du quotidien nourrit l’escarcelle

Mêmes notes – mais autres partitions

*

Simplement en leur portant attention

Chantonner en toute légèreté

Mêmes notes – mais autres partitions

Un vieil air, différemment entonné

*

Chantonner en toute légèreté

Rien de virtuel – plutôt joie au corps !

Un vieil air, différemment entonné

Jetant toutes règles par dessus bord

*

Rien de virtuel – plutôt joie au corps !

Celle qui permet de tout percevoir

Jetant toutes règles par dessus bord

Quelle exception ? Mais celle du regard !

Odile Cornuz / 17.5.20

Pantoum / 149

Semaine de retrouvailles
Entre amis et au restaurant
Plaisirs de faire ripaille
Déguster des mets différents

Entre amis et au restaurant
Enfin le retour sur les greens
Déguster des mets différents
Finie l’humeur chagrine

Enfin le retour sur les greens
Le corps bouge différemment
Finie l’humeur chagrine
Partie comme par enchantement

Le corps bouge différemment
L’angoisse s’est évanouie?
Partie comme par enchantement?
Oui, jusqu’à l’heure d’aller au lit

L’angoisse s’est évanouie?
Mais la bête tapie dans le noir
Oui, jusqu’à l’heure d’aller au lit
Revient peupler vos cauchemars

Mais la bête tapie dans le noir
A-t-on été assez prudents?
Revient peupler vos cauchemars
A partager tous ces moments?

A-t-on été assez prudents?
Y aura-t-il des représailles?
A partager tous ces moments?
Semaine de retrouvailles…

Nicolette Ostrini / 17.5.20

Pantoum / 148

Comment comprendre ces sceptiques-là ?

Que se passe-t-il dans leurs synapses ?

Celles et ceux qui nient le corona…

Que voient-ils d’eux-mêmes dans l’espace ?

*

Que se passe-t-il dans leurs synapses ?

Croient-elles dont que la terre est plate ?

Que voient-ils d’eux-mêmes dans l’espace ?

Leurs oreilles semblent délicates…

*

Croient-elles donc que la terre est plate ?

Que vient la semaine des quat’jeudis ?

Leurs oreilles semblent délicates…

Prendraient-ils pour vrai tout ce qui se dit ?

*

Que vient la semaine des quat’jeudis ?

Que souffler sur un bobo suffirait ?

Prendraient-ils pour vrai tout ce qui se dit ?

Ce qui file sur les réseaux, vit’fait ?

*

Que souffler sur un bobo suffirait ?

Ça ou autre chose – la mort viendra ?

Ce qui file sur les réseaux – vit’fait ?

En attendant ça les divertira ?

*

Ça ou autre chose – la mort viendra ?

Et elles en finiraient moins bêtes ?

En attendant ça les divertira ?

Qui a élaboré leurs lunettes ?

*

Et elles en finiraient moins bêtes ?

Celles et ceux qui nient le corona…

Qui a élaboré leurs lunettes ?

Comment comprendre ces sceptiques-là ?

Odile Cornuz / 16.5.20

Pantoum / 147

c’est le retour de la pluie
et du vent qui se renforce
dans les yeux l’eau qu’on essuie
que savons-nous de nos forces

et bise qui se renforce
aux fenêtres aux balcons
que faisons-nous de nos forces
viens voir tombent des flocons

aux échappées aux balcons
aux fêtes du joli mai
viens voir pleuvent des flocons
drôle de temps désormais

aux fêtes du noble mai
en passe de changer quoi
drôle de vie désormais
s’inventent d’autres parois

en passe de brouiller quoi
s’ouvrir ou se refermer
s’érigent d’autres parois
d’autres manières d’aimer

s’enfuir ou se refermer
ignorer quand ça commence
folles manières d’aimer
qu’on est déjà dans la danse

tempêter quand ça commence
que peut-on encore dire
qu’on est floué dans la danse
peut-on encore choisir

que peux-tu encore dire
qui va entendre tes mots
puis-je encore choisir
refus colères en mots

qui va consoler tes mots
dans la main l’eau qu’on essuie
refus discordes en mots
c’est le souci de la pluie

Gilles F. Jobin / 16.5.20

Pantoum / 146

Derrière la vitre dansent les feuilles

Se résoudre aujourd’hui à l’horizon

Tandis que certaines portent le deuil

Tu devrais simplement t’arrêter, non ?

*

Se résoudre aujourd’hui à l’horizon

Qui se découpe depuis ta chambre

Tu devrais simplement t’arrêter, non ?

Cesser d’agiter ainsi tes membres

*

Qui se découpent depuis ta chambre

Pas dessus ou par dessous le duvet

Cesser d’agiter ainsi tes membres

Ce que tu dois à ton corps ? Du respect

*

Par dessus ou par dessous le duvet

Laisse-le donc se reposer, enfin !

Ce que tu dois à ton corps ? Du respect

Pleinement le droit de dire stop ! Point !

*

Laisse-le donc se reposer, enfin !

Surchauffe paradoxale du temps

Pleinement le droit de dire stop ! Point !

S’il faut penser, penser surtout au vent

*

Surchauffe paradoxale du temps

Nulle ne vit ta vie à ta place

S’il faut penser, penser surtout au vent

Savourer plutôt qui tu enlaces

*

Nulle ne vit ta vie à ta place

Tandis que certaines portent le deuil

Savourer plutôt qui tu enlaces

Derrière la vitre dansent les feuilles

Odile Cornuz / 15.5.20

Pantoum / 145

Et me voici saoulée par la foule

Simple traversée du centre ville

Déjà sous les stimuli je croule

Comment arrêter ce temps qui file ?

*

Simple traversée du centre ville

Où se mêlent étrange et familier

Comment arrêter ce temps qui file ?

Et peut-on sereinement se méfier ?

*

Où se mêlent étrange et familier

Ton visage n’est plus ton visage

Et peut-on sereinement se méfier ?

Ainsi se protéger, à la page ?

*

Ton visage n’est plus ton visage

Quand un masque le recouvre à moitié

Ainsi se protéger, à la page ?

Mais le reste manque à notre amitié !

*

Quand un masque le recouvre à moitié

Comment savoir si tu me souris, là ?

Mais le reste manque à notre amitié !

Je crains que nous soyons réduits à ça

*

Comment savoir si tu me souris, là ?

Alors que je te croise dans la rue

Je crains que nous soyons réduits à ça

Obstruer tous les sens – même la vue ?

*

Alors que je te croise dans la rue

Déjà sous les stimuli je croule

Obstruer tous les sens – même la vue ?

Et me voici saoulée par la foule

Odile Cornuz / 14.5.20

Pantoum / 144

Ce mot est un véritable sésame

C’est de MERCI que je voulais parler

Il ouvre toutes les portes des âmes

C’est un mot à ne jamais oublier

*

C’est de MERCI que je voulais parler

Merci est toujours très facile à dire

C’est un mot à ne jamais oublier

Il va vous apporter mille sourires

*

Merci est toujours très facile à dire

Il ne coûte rien quand on l’utilise

Il va vous apporter mille sourires

Il implique de la reconnaissance

*

Il ne coûte rien quand on l’utilise

Il est gouleyant et aussi chantant

Il implique de la reconnaissance

Dit par un enfant il devient craquant

*

Il est gouleyant et aussi chantant

Nos mercis vont nous suivre dans la vie

Dit par un enfant il devient craquant

Comme un oiseau il envoie ses trilles

*

Nos mercis vont nous suivre dans la vie

Il y a aussi PARDON à aimer

Comme un oiseau il envoie ses trilles

A l’hôpital, on les dit par milliers

*

Il y a aussi PARDON à aimer

Il peut très bien dépasser les drames

A l’hôpital, on les dit par milliers

Ce mot est un véritable sésame

Remy Degen / 14.5.20

Pantoum / 143

Peux pas, peux plus, truc qui bloque – mais quoi ?

Quelque chose cloche – le système ?

Mais vers quoi continuer et pourquoi ?

Le sais-tu ? Je l’ignore moi-même

*

Quelque chose cloche – le système ?

Ce fil de vie emmêlé de partout ?

Le sais-tu ? Je l’ignore moi-même

Pourquoi mimer la douceur du cachou ?

*

Ce fil de vie emmêlé de partout

Auquel s’accrochent toutes pelotes

Pourquoi mimer la douceur du cachou ?

Plutôt s’enfuir avec ses deux bottes !

*

Auxquelles s’accrochent toutes pelotes

Ne jamais renoncer à l’air libre

Plutôt s’enfuir avec ses deux bottes !

Vers d’autres horizons qui enivrent

*

Ne jamais renoncer à l’air libre

Même à l’inventer, oui, au fond de soi

Vers d’autres horizons qui enivrent

Quitte à suer, voire à trembler d’effroi

*

Même à l’inventer, oui, au fond de soi

Ce qui se fait, défait et palpite

Quitte à suer, voire à trembler d’effroi

Trouver dans cette vie des pépites

*

Ce qui se fait, défait et palpite

Mais vers quoi continuer et pourquoi ?

Trouver dans cette vie des pépites

Peux pas, peux plus, truc qui bloque – mais quoi ?

Odile Cornuz / 13.5.20

Pantoum / 142

T’as les yeux tout mouillés, qu’as-tu vu ?

Pourquoi cette canne, est-ce que tu boites ?

Ça fait si longtemps qu’on s’est plus revus

Viens vers moi tu as les mains toutes moites !

*

Pourquoi cette canne, est-ce que tu boites ?

Viens dans mes bras, cette nuit on va danser

Viens vers moi tu as les mains toutes moites !

On va en boîte, on va s’époumoner !

*

Viens dans mes bras, cette nuit on va danser

La blancheur de tes dents est magnifique

On va en boîte, on va s’époumoner !

Où les as-tu laissées, mon unique ?

*

La blancheur de tes dents est magnifique

Arrête de trembler si fort mon moineau

Où les as-tu laissées, mon unique ?

Pourquoi ces regards de biais, les salauds

*

Arrête de trembler si fort mon moineau

Je n’ai rien contre toi, viens, prends ma main !

Pourquoi ces regards de biais, les salauds

A quoi aspires-tu, de quoi as-tu faim ?

*

Je n’ai rien contre toi, viens, prends ma main !

On s’en va, on pourrait p’t’être y rester

A quoi aspires-tu, de quoi as-tu faim ?

Viens par-là, on va boire une tasse de thé

*

On s’en va, on pourrait p’t’être y rester

Je rêve de toi, tu es si belle toute nue

Viens par-là, on va boire une tasse de thé

T’as les yeux tout mouillés, qu’as-tu vu ?

Orélie Fuchs / 13.5.20

Pantoum / 141

Aujourd’hui c’est Covid
Nous sommes confinés
Ma cave n’est pas vide
Nous allons célébrer

Nous sommes confinés
Pas besoin de se déplacer
Nous allons célébrer
La nature qui resplendit à l’approche de l’été

Pas besoin de se déplacer
Avec ma famille nous apprécions
La nature qui resplendit à l’approche de l’été
Cette situation nous protège des perturbations

Avec ma famille nous apprécions
Ces moments d’intimité
Cette situation nous protège des perturbations
Sans jamais nous lasser

Ces moments d’intimité
Nous ne souhaitons pas les arrêter
Sans jamais nous lasser
Nous nous laissons rêver

Nous ne souhaitons pas les arrêter
Afin que la vie reprenne
Nous nous laissons rêver
Que le monde un peu moins nous contraigne

Afin que la vie reprenne
J’oublie l’idée sordide
Que le monde un peu moins nous contraigne
Aujourd’hui c’est Covid

François Cornu / 13.5.20

Pantoum / 140

L’inconscient est un vrai trésor

Audace, humour et espoir mêlés

Les histoires qui surgissent quand tu dors

Sur son bureau, sur ses dossiers

*

Audace, humour et espoir mêlés

Toute ta famille ainsi réunie

Sur son bureau, sur ses dossiers

Pains farcis, pâtes fraîches et raviolis

*

Toute ta famille ainsi réunie

Tout ce mépris alors balayé

Pains farcis, pâtes fraîches et raviolis

Par l’imaginaire détourné

*

Tout ce mépris alors balayé

Manque de soin, oubli de ton nom

Par l’imaginaire détourné

Réalité nouvelle sous ton front

*

Manque de soin, oubli de ton nom

Photo prise quand tu n’es pas là

Réalité nouvelle sous ton front

Entouré : tes proches aux songes lila

*

Photo prise quand tu n’es pas là

Une énorme poire, fruit généreux

Entouré : tes proches aux songes lila

Nature rebelle, esprit joyeux

*

Une énorme poire, fruit généreux

Réponse de tes songes à la violence

Nature rebelle, esprit joyeux

Colère déjouée, belle résilience

*

Réponse de tes songes à la violence

Sous l’indifférence une image d’or

Colère déjouée, belle résilience

L’inconscient est un vrai trésor

Orélie Fuchs / 13.5.20

Pantoum / 139

On n’est finalement pas si bien
le temps allonge la courte ligne
quand on se voit coupé des siens
et la découpe en mille signes.

Le temps allonge la courte ligne
On dit des autres que c’est l’enfer
et la découpe en mille signes
on doit attendre et pas s’en faire.

On dit des autres que c’est l’enfer
Sortir de soi, est-ce interdit ?
on doit attendre et pas s’en faire
Où est le mot, où c’est écrit ?

Sortir de soi, est-ce interdit ?
J’ai vu la courbe, j’ai vu la fosse
où est le mot, où c’est écrit ?
j’ai vu New York, j’ai vu les bosses.

J’ai vu la courbe, j’ai vu la fosse
T’as vu l’oiseau dans le salon
J’ai vu New York, j’ai vu les bosses
tes joues rosées quittent l’abandon.

T’as vu l’oiseau dans le salon
il n’y a plus une seule poussière
tes joues rosées quittent l’abandon
Il n’y a plus qu’une chose à faire

Il n’y a plus une seule poussière
Allons hurler avec les chiens !
Il n’y a plus qu’une chose à faire
on n’est finalement pas si bien.

Jean Prétôt / 13.5.20

Pantoum / 138

Aujourd’hui c’est la rentrée
C’est la deuxième fois cette année
Dans une zone marquée il faut patienter
A ça on n’est pas habitués

C’est la deuxième fois cette année
On prend du temps pour en parler
A ça on n’est pas habitués
D’habitude on commence vite à bosser

On prend du temps pour en parler
Après cette drôle de pause forcée
D’habitude on commence vite à bosser
Là on pense déjà aux vacances d’été

Après cette drôle de pause forcée
Notre enseignante va nous aider
Là on pense déjà aux vacances d’été
Mais pour apprendre on reste motivés

Notre enseignante va nous aider
Après huit semaines semi-confinés
Mais pour apprendre on reste motivés
Même si c’est des règles de sécurité

Après huit semaines semi-confinés
La récré ces temps c’est particulier
Même si c’est des règles de sécurité
On doit se faire à l’idée

La récré ces temps c’est particulier
Dans une zone définie il faut rester
On doit se faire à l’idée
Aujourd’hui c’est la rentrée

Muriel Cornu / 13.5.20

Pantoum / 137

Comment faire exister ? Nommer, d’abord

Ce qui n’a pas de nom se cache tant

Cheviller plutôt les mots en son corps

Du vaste trésor, espace dedans

*

Ce qui n’a pas de nom se cache tant

Tache aveugle qui ne signifie rien

Du vaste trésor, espace dedans

Oublié dans le flou, ce quotidien

*

Tache aveugle qui ne signifie rien

Si doigt ou langue n’ont pas désigné

Oublié dans le flou, ce quotidien

Et pourquoi ne pas tout réinventer ?

*

Si doigt ou langue n’ont pas désigné

Ce qui urge à dire, voir, transmettre

Et pourquoi ne pas tout réinventer ?

Tant pis si dans les mots ça s’empêtre

*

Ce qui urge à dire, voir, transmettre

Nuage, cri, joie ou déchirure

Tant pis si dans les mots ça s’empêtre

Pourvu que ça trouve forme, dure

*

Nuage, cri, joie ou déchirure

Ce qui traverse la vie toute crue

Pourvu que ça trouve forme, dure

S’en saisir, se révéler moins perdue

*

Ce qui traverse la vie toute crue

Cheviller plutôt les mots en son corps

S’en saisir, se révéler moins perdue

Comment faire exister ? Nommer, d’abord

Odile Cornuz / 12.5.20

Pantoum / 136

Il a dit c’est exécrable

J’y avais caché mon âme

J’ai disjoncté malléable

Nul ne peut ôter la flamme

*

J’y avais caché mon âme

Au pont je suis allée danser

Nul ne peut ôter la flamme

Croyant entendre croasser

*

Au pont je suis allée danser

Un inconnu m’a saluée

Croyant entendre croasser

Un hibou lippu hululait

*

Un inconnu m’a saluée

Bonjour ici c’est défendu

Un hibou lippu hululait

D’amener ses sous-entendus

*

Bonjour ici c’est défendu

Turlututu pattes velues

D’amener ses sous-entendus

Mon dieu je n’ai pas la berlue

*

Turlututu pattes velues

La grâce de l’hirondelle

Mon dieu je n’ai pas la berlue

M’ensoleille les prunelles

*

La grâce de l’hirondelle

Oublié l’état minable

M’ensoleille les prunelles

Il a dit c’est exécrable

Valérie Lobsiger / 12.5.20

Pantoum / 135

Je voulais changer de tête

La macération, l’inaction

Les gouttelettes follettes

Ont liquidé mon ambition

*

La macération, l’inaction

Le coiffeur ne va pas profond

Ont liquidé mon ambition

Et mon être consommé fond

*

Le coiffeur ne va pas profond

La graisse du maquillage

Et mon être consommé fond

Dessous brille une cage

*

La graisse du maquillage

Rituel des cérémonies

Dessous brille une cage

Du trou béant l’hégémonie

*

Rituel des cérémonies

Qui vidangent les cervelles

Du trou béant l’hégémonie

En un tour de parentèle

*

Qui vidangent les cervelles

Par l’appareil certifiée

En un tour de parentèle

Un scanner m’a vitrifiée

*

Par l’appareil certifiée

Obsolètes amourettes

Un scanner m’a vitrifiée

Je voulais changer de tête

Valérie Lobsiger / 12.5.20

Pantoum / 134

Bonnes nouvelles ? Oui ; relatives

Possible – à nouveau – de se mouvoir

Abondance de pensées captives

Prêtes à surgir, voire à émouvoir

*

Possible – à nouveau – de se mouvoir

Dans un enthousiasme tout relatif

Prêtes à surgir, voire à émouvoir

Les angoisses plient ce monde captif

*

Dans un enthousiasme tout relatif

La Covid essaime (oui, féminin)

Les angoisses plient ce monde captif

Tandis que l’aplomb manque au genre humain

*

La Covid essaime (oui, féminin)

Le printemps aussi, sa chaîne active

Tandis que l’aplomb manque au genre humain

La nature se montre inventive

*

Le printemps aussi, sa chaîne active

Choyons donc ce jardin planétaire

La nature se montre inventive

Voici sa leçon particulière

*

Choyons donc ce jardin planétaire

Il contient quelques principes actifs

Voici sa leçon particulière

Et vous, seriez-vous aussi inventifs ?

*

Il contient quelques principes actifs

Abondance de pensées captives

Et vous, seriez-vous aussi inventifs ?

Bonnes nouvelles ? Oui ; relatives

Odile Cornuz / 11.5.20

Pantoum / 133

Bord de lac et soleil – quasi l’été

Des enfants barbotent dans le pollen

Quelques habits gisent, abandonnés

Imprégnés de multiples ADN

*

Des enfants barbotent dans le pollen

Demain, ils retournent à l’école

Imprégnés de multiples ADN

Elle reprend, cette course folle ?

*

Demain, ils retournent à l’école

Quotidien recomposé, peu à peu

Elle reprend, cette course folle ?

Et quoi d’autre fait retour, à tes yeux ?

*

Quotidien recomposé, peu à peu

S’en bricoler une philosophie

Et quoi d’autre fait retour, à tes yeux ?

Du temps pour la marche, la rêverie

*

S’en bricoler une philosophie ?

Se sentir bien dans moins d’intempestif

Du temps pour la marche, la rêverie

Maintenant sentiments et cerveau vifs

*

Se sentir bien dans moins d’intempestif

Tu n’as pas encore chopé ce truc, ouf !

Maintenant sentiments et cerveau vifs

Tu ne résistes pas à faire plouf…

*

Tu n’as pas encore chopé ce truc, ouf !

Quelques habits gisent, abandonnés

Tu ne résistes pas à faire plouf…

Bord de lac et soleil – quasi l’été

Odile Cornuz / 10.5.20

Pantoum / 132

Début de déconfinement
Oui mais hélas sans surprise
Sur les routes c’est l’encombrement
Déjà au volant la crise

Oui mais hélas sans surprise
Retour à la normalité?
Déjà au volant la crise
Avec grande facilité…

Retour à la normalité?
Dans une certaine mesure
Avec grande facilité…
A voir combien de temps ça dure

Dans une certaine mesure
Quatre invités en terrasse
A voir combien de temps ça dure
Retrouvailles sans embrasse

Quatre invités en terrasse
La bête rôde aux alentours
Retrouvailles sans embrasse
On ne veut pas de son retour

La bête rôde aux alentours
Distances presque respectées
On ne veut pas de son retour
Mains régulièrement lavées

Distances presque respectées
Quasi plus d’applaudissements
Mains régulièrement lavées
Début de déconfinement

Nicolette Ostrini / 10.5.20

Pantoum / 131

Le mouvement reprend : bruits de ville

Coléoptères, moteurs, vrombissent

Dans un décor animé, fragile

Où tous les torts muent, se répartissent

*

Coléoptères, moteurs, vrombissent

Il s’agirait de trouver sa place

Où tous les torts muent, se répartissent

Des droits humains, lesquels passés à l’as ?

*

Il s’agirait de trouver sa place

Rien de neuf – l’équilibre entre espèces !

Des droits humains, lesquels passés à l’as ?

Plutôt aux dollars qu’on s’intéresse

*

Rien de neuf – l’équilibre entre espèces !

Chaîne alimentaire, droit de cité

Plutôt aux dollars qu’on s’intéresse

Pouss’toi’d’là’qu’j’m’y’mett ! dit le baraqué

*

Chaîne alimentaire, droit de cité

Unité frêle dans le système

Pouss’toi’d’là’qu’j’m’y’mett ! dit le baraqué

Loi du plus fort : quel est le problème ?

*

Unité frêle dans le système

Pas de votre faute – ni la nôtre

Loi du plus fort : quel est le problème ?

Ce qui ne nous tue pas… dirait l’autre

*

Pas de votre faute – ni la nôtre

Dans un décor animé, fragile

Ce qui ne nous tue pas… dirait l’autre

Le mouvement reprend : bruits de ville

Odile Cornuz / 9.5.20

Pantoum / 130

Sur mon vélo en mâchouillant des morceaux de mon passé

Le soleil qui me regarde, les insectes qui me saluent

Ma tête est un grand puzzle, plus bazar que pensées

J’avais fini par pleurer on avait vu l’absolu

*

Le soleil qui me regarde, les insectes qui me saluent

On ne rêvait que d’amour, de beauté décomplexée

J’avais fini par pleurer on avait vu l’absolu

La violence de toutes ces vies, tu voulais la renverser

*

On ne rêvait que d’amour, de beauté décomplexée

Nuit splendide, clameurs diurnes, entre deux un petit feu

La violence de toutes ces vies, tu voulais la renverser

On s’est retrouvées par terre, à farfouiller toutes les deux

*

Nuit splendide, clameurs diurnes, entre deux un petit feu

Cette chose qui arrive et qui n’est pas ridicule

On s’est retrouvées par terre, à farfouiller toutes les deux

Pleines de cet amour rageur qui touche jusqu’au minuscule

*

Cette chose qui arrive et qui n’est pas ridicule

Ton visage sourit-il ou grimace-t-il ses souvenirs ?

Pleines de cet amour rageur qui touche jusqu’au minuscule

Priée d’éteindre ton passé, que ranges-tu dans tes soupirs ?

*

Ton visage sourit-il ou grimace-t-il ses souvenirs ?

Nos regards je les revois, tout brillants, plein de rêves

Priée d’éteindre ton passé, que ranges-tu dans tes soupirs ?

Nos fous rires je les entends, aussi vibrants que la braise

*

Nos regards je les revois, tout brillants, plein de rêves

Rien qui ne se soit perdu, quelqu’un nous a vu passer

Nos fous rires je les entends, aussi vibrants que la braise

Sur mon vélo en mâchouillant des morceaux de mon passé

Orélie Fuchs / 9.5.20

Pantoum / 129

Ah ! le sens de la métamorphose…

Y recourir au mieux et calmement

L’envie de se fondre en toute chose

A tout moment, rien qu’en la regardant

*

Y recourir au mieux et calmement

Devenir fourmi avec sa miette

A tout moment, rien qu’en la regardant

Frôler le lac telle la mouette

*

Devenir fourmi avec sa miette

Se muer en rhizome sous terre

Frôler le lac telle la mouette

Vivre en vipère dans les tourbières

*

Se muer en rhizome sous terre

Peaux, poils ou plumes : quelle importance ?

Vivre en vipère dans les tourbières

Si tu changes d’air avec aisance…

*

Peaux, poils ou plumes : quelle importance ?

Si de là tu reviens approfondie

Si tu changes d’air avec aisance

Si tu en conçois une reverdie

*

Si de là tu reviens approfondie

Du souffle qui circule, sauvage

Si tu en conçois une reverdie

Une chrysalide sans visage

*

Du souffle qui circule, sauvage

L’envie de se fondre en toute chose

Une chrysalide sans visage

Ah ! le sens de la métamorphose…

Odile Cornuz / 8.5.20

Pantoum / 128

Et demain quel sera le monde ?
L’espoir d’un retour des oiseaux ?
Sur notre terre dans sa ronde ?
Libres courront-ils les chevaux ?

L’espoir d’un retour des oiseaux ?
Et toi et moi qu’aimerons-nous ?
Libres courront-ils les chevaux ?
Serons-nous égaux avec vous ?

Et toi et moi qu’aimerons-nous ?
La forêt respirera mieux ?
Serons-nous égaux avec vous ?
Voir le ciel encore plus bleu ?

La forêt respirera mieux ?
Vivrons-nous sous les caméras ?
Voir le ciel encore plus bleu ?
Ou en cage comme des rats ?

Vivrons-nous sous les caméras ?
Nature plus qu’en algorithme ?
Ou en cage comme des rats ?
Numérique pour tous nos rythmes ?

Nature plus qu’en algorithme ?
Sèmera-t-on toujours des plantes ?
Numérique pour tous nos rythmes ?
Survivront-elles nos ententes ?

Sèmera-t-on toujours des plantes ?
Nous restera au moins la fronde ?
Survivront-elles nos ententes ?
Et demain quel sera le monde ?

Gilles F. Jobin / 8.5.20

Pantoum / 127

La veine sous l’œil commence à trembler

Les paupières clignent mais collent sec

Il est temps, ma foi, de déconnecter

Trouver d’autres tactiques que high tech

*

Les paupières clignent mais collent sec

Sidération du monde comme il va

Trouver d’autres tactiques que high tech

Sinon personne ne s’en sortira

*

Sidération du monde comme il va

Revenez à tous les sens aiguisés !

Sinon personne ne s’en sortira

Si seuls yeux et cerveau sont attisés

*

Revenez à tous les sens aiguisés !

N’oubliez pas le toucher ni le goût

Si seuls yeux et cerveaux sont attisés

Le soi séché craquera de partout

*

N’oubliez pas le toucher ni le goût

N’omettez nulle occasion de humer

Le soi séché craquera de partout

Si les oreilles closes vous gardez

*

N’omettez nulle occasion de humer

Partez donc en quête du sixième !

Si les oreilles closes vous gardez

Vous priverez la vie de poème

*

Partez donc en quête du sixième !

Il est temps, ma foi, de déconnecter

Ou de priver la vie de poème…

La veine sous l’œil commence à trembler

Odile Cornuz / 7.5.20

Pantoum / 126

La poésie ! une rivière de mots

La poésie est un joyau des sons

Jamais elle ne tourne autour du pot

Elle chante souvent comme un pinson

*

La poésie est un joyau des sons

Elle reste toujours très narratrice

Elle chante souvent comme un pinson

Elle laisse aussi des cicatrices

*

Elle reste toujours très narratrice

La poésie est plus que magnifique

Elle laisse aussi des cicatrices

Et nous propose des tableaux très chics

*

La poésie est plus que magnifique

La poésie est très chronophage

Et nous propose des tableaux très chics

Elle nous soule comme un breuvage

*

La poésie est très chronophage

La poésie n’est jamais égoïste

Elle nous soule comme un breuvage

C’est également comme un jeu de piste

*

La poésie n’est jamais égoïste

Elle s’entend aussi avec les yeux

C’est également comme un jeu de piste

Elle cherche à enchanter les preux

*

Elle s’entend aussi aves les yeux

Toutes les poésies sont compulsives

Elles cherchent à enchanter les preux

Elles vont être un peu répétitives

*

Toutes les poésies sont compulsives

Elles aiment également les fous

Elles vont être un peu répétitives

Elles veulent se mélanger à nous

*

Elles aiment également les fous

Pour elles il n’y en a jamais trop

Elles veulent se mélanger à nous

La poésie ! une rivière de mots

Remy Degen / 7.5.20

Pantoum / 125

Le parc tondu de frais, moins folichon

Nulle herbe propice au microcosme

De l’arbre, ils ont même rasé le tronc

Pour qu’il pousse droit, ce macrocosme

*

Nulle herbe propice au microcosme

Moins de terrains de chasse pour les chats

Pour qu’il pousse droit, ce macrocosme

Fallait-il vraiment en arriver là ?

*

Moins de terrain de chasse pour les chats

Brider l’espace qui nous entoure ?

Fallait-il vraiment en arriver là ?

Que tout soit propre ? Terre sans détours ?

*

Brider l’espace qui nous entoure ?

Ne pas plutôt dénouer l’intérieur ?

Que tout soit propre ? Terre sans détours ?

Pourquoi étouffer les désirs d’ailleurs ?

*

Ne pas plutôt dénouer l’intérieur ?

Ecouter l’appel vif des martinets

Pourquoi étouffer les désirs d’ailleurs ?

Les vaisseaux en partance, sur le quai…

*

Ecouter l’appel vif des martinets

Mais que signifie le mot voyage ?

Les vaisseaux en partance, sur le quai…

Plongée dans les contes des fous sages

*

Mais que signifie le mot voyage ?

Les oiseaux en ont fait une chanson

Plongée dans les contes des fous sages

Le parc tondu de frais, moins folichon

Odile Cornuz / 6.5.20

Pantoum / 124

Tout va bientôt repartir comme avant

c’est bien, ouf, un peu de vie sociale

et passer dire un bonjour à maman

retour des libertés fondamentales

*

C’est bien, ouf, un peu de vie sociale

fini l’aléatoire, l’incertain

retour des libertés fondamentales

café debout au comptoir, verre de vin

*

Fini l’aléatoire, l’incertain

tout va bientôt repartir comme avant

café debout au comptoir, verre de vin

est-ce que ce sera mieux pour autant ?

*

Tout va bientôt repartir comme avant

c’est bête, retour à la frénésie

est-ce que ce sera mieux pour autant ?

Quelqu’un dira : enfin c’est reparti

*

C’est bête, retour à la frénésie

et au comptoir, ni verre ni café

quelqu’un dira : enfin c’est reparti

(il est question de sous, d’un oreiller)

*

Et au comptoir, ni verre ni café

hop, au travail (avec des précautions)

il est question de sous, d’un oreiller

on avance masqué, à reculons

*

Hop, au travail (avec des précautions)

ce pauvre monde n’est qu’un grand marchand

on avance masqué, à reculons

tout va bientôt repartir comme avant

Walter Rosselli / 6.5.20

Pantoum / 123

Nommer ce qui est – oui – difficile

Ne savoir par où commencer, surtout

Inventer des noms ? Pas plus facile…

Ou partager avec les mains, partout ?

*

Ne savoir par où commencer, surtout

Quand ça survient si fort de tous côtés

Ou partager avec les mains, partout ?

Quand chaque geste est histoire à conter

*

Quand ça survient si fort de tous côtés

A chaque instant ploient nos résistances

Quand chaque geste est histoire à conter

Qu’il est cru l’aveu de l’ignorance

*

A chaque instant ploient nos résistances

Face à l’orage du soir tu tressailles

Qu’il est cru l’aveu de l’ignorance

Acide la crainte des représailles

*

Face à l’orage du soir tu tressailles

Te voici puceron sur brin d’orpin

Acide la crainte des représailles

Tourne en vinaigre le meilleur des vins

*

Te voici puceron sur brin d’orpin

A voir tomber la pluie intensément

Tourne en vinaigre le meilleur des vins

Lorsque la vie ne saisit pas le temps

*

A voir tomber la pluie intensément

Le vaisseau de tes possibles file

Lorsque la vie ne saisit pas le temps

Nommer ce qui est – oui – difficile

Odile Cornuz / 5.5.20

Pantoum / 122

Choisir et pratiquer l’hendécasyllabe

Car du pair et du père, nous sommes las

Recourir à la boussole et l’astrolabe

Pour tuer en titubant son Vaugelas

*

Car du pair et du père, nous sommes las

Nous sommes enfants de la dissymétrie

Pour tuer en titubant son Vaugelas

Nul besoin d’abuser de géométrie

*

Nous sommes enfants de la dissymétrie

Dans la foule, irrémédiablement seul

Nul besoin d’abuser de géométrie

La manif ou le défilé m’est linceul.

*

Dans la foule irrémédiablement seul

A quoi sert la tige de prêle stérile

La manif ou le défilé m’est linceul

Queue de goupil, belle de couleur d’agrile

*

A quoi sert la tige de prêle stérile ?

Si l’évolution veut la reproduction

Queue de goupil, belle de couleur d’agrile

Si l’autre suffit à la sporulation

*

Si l’évolution veut la reproduction

Défaire la symétrie de la syllabe

Si l’autre suffit à la sporulation

Choisir et pratiquer l’hendécasyllabe

Pierre-Yves Lador / 5.5.20

Pantoum / 121

Il y a pleins de masques dans la vie

Certains ne sont pas faits pour nous cacher

Les vrais pour se montrer faut qu’on les prie

Ceux de Venise viennent d’arriver

*

Certains ne sont pas faits pour nous cacher

Ils sont à Rio pour le Carnaval

Ceux de Venise viennent d’arriver

Des grimaçants nous nous moquons sans mal

*

Ils sont à Rio pour le Carnaval

Ceux des roublards vivent seuls dans leur tête

Des grimaçants nous nous moquons sans mal

Ils se sauvent sans demander leur reste

*

Ceux des roublards vivent seuls dans leur tête

Les masques des hypocrites nous mentent

Ils se sauvent sans demander leur reste

Faux ou vrais il y en a qui nous trompent

*

Les masques des hypocrites nous mentent

Les masques des idiots sont plus justes

Faux ou vrais il y en a qui nous trompent

Les masques amis chassent la peste

*

Les masques des idiots sont plus justes

Impossible de tous les contourner

Les masques amis chassent la peste

Ceux qui les portent veulent nous aider

*

Impossible de tous les contourner

Il y a aussi les masques de vie

Ceux qui les portent veulent nous aider

Leur but est de protéger la sortie

*

Il y a aussi les masques de vie

Les infirmières étaient les premières

Leur but est de protéger la sortie

Un grand merci à elles de le faire

*

Les infirmières étaient les premières

C’est un beau geste d’en avoir envie

Un grand merci à elles de le faire

Il y a pleins de masques dans la vie

Remy Degen / 5.5.20

Pantoum / 120

Sérénade au balcon de l’EMS

Quelques airs d’opéra se succèdent

Violoncelle, piano et finesse

Grave baryton en intermèdes

*

Quelques airs d’opéra se succèdent

Puis les applaudissements crépitent

Grave baryton en intermèdes

Oyez : tout le quartier en profite

*

Puis les applaudissements crépitent

Bravo ! Bravi ! Tant de félicité !

Oyez : tout le quartier en profite

Mamie à son balcon se tient penchée

*

Bravo ! Bravi ! Tant de félicité !

Même Brel ! Sinatra ! au programme

Mamie à son balcon se tient penchée

La mélancolie lui saisit l’âme

*

Même Brel ! Sinatra ! au programme

Papi a réglé son sonotone

La mélancolie lui saisit l’âme

Se demande s’il verra l’automne

*

Papi a réglé son sonotone

La musique envahit tous les vaisseaux

Se demande s’il verra l’automne

Et s’il partait, allegretto, presto ?

*

La musique envahit tous les vaisseaux

Violoncelle, piano et finesse

Et s’il partait, allegretto, presto ?

Sérénade au balcon de l’EMS

Odile Cornuz / 4.5.20

Pantoum / 119

Les choses auxquelles on pense le soir

Les choses auxquelles on ne pense plus

Les choses qu’on écrit noir sur noir

Comme un Soulages qui s’est perdu

*

Les choses auxquelles on ne pense plus

Les choses qui savent mouiller vos yeux

Comme un Soulages qui s’est perdu

Comme un clochard avec un nœud

*

Les choses qui savent mouiller vos yeux

Ces choses-là, de quoi parlent-elles ?

Comme un clochard avec un nœud ?

Comme un amour qui bat de l’aile ?

*

Ces choses-là, de quoi parlent-elles ?

Comme un enfant mort sur la plage ?

Comme un amour qui bat de l’aile ?

Comme les souvenirs qui tournent les pages ?

*

Comme un enfant mort sur la plage ?

Comme des crécelles qui ensorcellent ?

Comme les souvenirs qui tournent les pages ?

Comme la mort qui sommeille ?

*

Comme des crécelles qui ensorcellent ?

Comme des merveilles dans un tiroir ?

Comme la mort qui sommeille ?

Les choses auxquelles on pense le soir

Orélie Fuchs / 4.5.20

Pantoum / 118

Et vous, ça va ? Et la famille, ça va ?

Fusent les messages, les rendez-vous

Et toi, ça va ? Et les enfants, ça va ?

On s’habitue à la vie comme un tout

*

Fusent les messages, les rendez-vous

Les voisins, on les croise plus souvent

On s’habitue à la vie comme un tout

Un puzzle, assemblé pas comme avant

*

Les voisins, on les croise plus souvent

Et nous, ça va ? Et les anciens, ça va ?

Un puzzle, assemblé pas comme avant

Et eux, ça va ? Et la santé, ça va ?

*

Et nous, ça va ? Et les anciens, ça va ?

Les vaisseaux en surchauffe sont soignés

Et eux, ça va ? Et la santé, ça va ?

Attendre un an avant de s’embrasser

*

Les vaisseaux en surchauffe sont soignés

Rencontres interposées par écran

Attendre un an avant de s’embrasser

La tension mondiale échauffée d’un cran

*

Rencontres interposées par écran

Pourtant ce dimanche semble calme

La tension mondiale échauffée d’un cran

Aux aguets de tout signe d’alarme

*

Pourtant ce dimanche semble calme

Et toi, ça va ? Et les enfants, ça va ?

Aux aguets de tout signe d’alarme

Et vous, ça va ? Et la famille, ça va ?

Odile Cornuz / 3.5.20

Pantoum / 117

Te souviens-tu de ces jeux dans le vent ?

D’une taie tendue comme une voile ?

Du rafistolage d’un cerf-volant ?

Nuages qui voilent puis dévoilent

*

D’une taie tendue comme une voile ?

Et toi penchée, bras fermes, en avant…

Nuages qui voilent puis dévoilent

De paysages mouvants, émouvants…

*

Et toi penchée, bras fermes, en avant…

Secouée d’air et d’éclats de rire

De paysages mouvants, émouvants

Armée de joie pour nier le pire

*

Secouée d’air et d’éclats de rire

Ou hurlant dans le vent des injures

Armée de joie pour nier le pire

Souviens-toi, tu souhaitais l’épure

*

Ou hurlant dans le vent des injures

Placer de ton côté les éléments

Souviens-toi, tu souhaitais l’épure

Ménager de la place aux rêves, tant !

*

Placer de ton côté les éléments

Emprunter les vaisseaux en partance

Ménager de la place aux rêves, tant !

Savoir danser de nouvelles danses

*

Emprunter les vaisseaux en partance

Tous les ailleurs étaient ouverts, en grand

Savoir danser de nouvelles danses

Te souviens-tu de ces jeux dans le vent ?

Odile Cornuz / 2.5.20

Pantoum / 116

Goethe disait qu’une couleur non regardée n’existe pas

Tu te demandes ce qu’il en est de la misère du monde

De ces hommes, femmes et enfants dont nous ne faisons cas

Quelque chose en moi (la langue je crois) est furibonde

*

Tu te demandes ce qu’il en est de la misère du monde

Tu cherches un sens, des responsables, à toute cette injustice

Quelque chose en moi (la langue je crois) est furibonde

Dans ton sang, dans ta tête, les images tournent comme des hélices

*

Tu cherches un sens, des responsables, à toute cette injustice

Sur tes dix doigts tu t’acharnes, cherchant un sens à ce malheur

Dans ton sang, dans ta tête, les images tournent comme des hélices

Hommes agenouillés à la fenêtre de la dernière demeure

*

Sur tes dix doigts tu t’acharnes, cherchant un sens à ce malheur

Broyant du noir, et plus tard, retournant dans ton plumard

Hommes agenouillés à la fenêtre de la dernière demeure

Mais dans ton corps un grand tintamarre, une sacrée fanfare !

*

Broyant du noir, et plus tard, retournant dans ton plumard

Pourquoi courir derrière un monde démesuré, désincarné ?

Mais dans ton corps un grand tintamarre, une sacrée fanfare !

J’ai vu derrière les grandes usines ces paysages défigurés

*

Pourquoi courir derrière un monde démesuré, désincarné ?

Que laissons-nous dans ce sillage, quel dessein, quelle misère ?

J’ai vu derrière les grandes usines ces paysages défigurés

Et ces hommes se perdre dans la boue les yeux pleins de colère

*

Que laissons-nous dans ce sillage, quel dessein, quelle misère ?

Combien de matins, de printemps, de fins d’années, de trépas ?

Et ces hommes se perdre dans la boue les yeux pleins de colère

Goethe disait qu’une couleur non regardée n’existe pas

Orélie Fuchs / 2.5.20

Pantoum / 115

Découvrez dans le proche la merveille

Palpez des matières indociles

Equilibrez en vous lune et soleil

Et respirez ce parfum fragile

*

Palpez des matières indociles

Chaussez d’autres lunettes, colorées

Et respirez ce parfum fragile

De votre peau, au vestiaire, accrochée

*

Chaussez d’autres lunettes, colorées

Traitez toutes loyautés au pluriel

De votre peau, au vestiaire, accrochée

Faites un miroir pour doubler le ciel

*

Traitez toutes loyautés au pluriel

Nulle liberté n’est singulière

Faites un miroir pour doubler le ciel

Qui puisse vous propulser dans les airs…

*

Nulle liberté n’est singulière

Empruntez le vaisseau poésie, là !

Qui puisse vous propulser dans les airs…

Craignez les chaînes, même en chocolat

*

Empruntez le vaisseau poésie, là !

Choisissez votre propre cadence

Craignez les chaînes, même en chocolat

Poursuivez l’élan de l’évidence

*

Choisissez votre propre cadence

Equilibrez en vous lune et soleil

Poursuivez l’élan de l’évidence

Découvrez dans le proche la merveille

Odile Cornuz / 1.5.20

Pantoum / 114

Tout ira bien si c’est écrit

Sur la fenêtre au crayon gras

Tout ira bien – quand et pour qui ?

Faut-il ou non croire Monsieur K.?

*

Sur la fenêtre au crayon gras

Un arc-en-ciel et un drapeau

Faut-il ou non croire Monsieur K.?

Si ça n’était que du pipeau ?

*

Un arc-en-ciel et un drapeau

Mes enfants sont-elles patriotes ?

Si ça n’était que du pipeau ?

Les couleurs sont un peu pâlottes

*

Mes enfants sont-elles patriotes ?

On se raccroche à ce qu’on peut

Les couleurs sont un peu pâlottes

Mais Jeanne s’est fait des cheveux

*

On se raccroche à ce qu’on peut

Trois mots et les dessins des filles

Mais Jeanne s’est fait des cheveux

Tout ira bien si c’est écrit

Léonie Dobler / 1.5.20

Pantoum / 113

Votre vie coupée en combien de dés ?

Ou polie peut-être ? A facettes ?

Réels en faisceaux ? Cris à mijoter ?

Emois, verve et impulsions en tête ?

*

Ou polie peut-être ? A facettes ?

Galet doux, lacustre en creux de paume

Emois, verve et impulsions en tête ?

S’il existe, que faire d’un baume ?

*

Galet doux, lacustre en creux de paume

Ramasser, oui, ce qui s’éparpille…

S’il existe, que faire d’un baume ?

Alors que le jour n’est que torpilles

*

Ramasser, oui, ce qui s’éparpille

Oublier un temps ce qui n’est pas fait

Alors que le jour n’est que torpilles

Part négligeable des futurs méfaits

*

Oublier un temps ce qui n’est pas fait

Et voir les feuilles ployer sous la pluie

Part négligeable des futurs méfaits

Elles s’abreuvent, s’ébrouent… Vous aussi ?

*

Et voir les feuilles ployer sous la pluie

Envier la grâce des hirondelles

Elles s’abreuvent, s’ébrouent… Vous aussi ?

Et pourquoi pas sortir la poubelle ?

*

Envier la grâce des hirondelles

Oser un mouvement dehors, bouger !

Et pourquoi pas sortir la poubelle ?

Votre vie coupée en combien de dés ?

Odile Cornuz / 30.4.20

Pantoum / 112

Le ciel nous est tombé sur la tête
La grisaille est partout, dedans, dehors
La nature est seule à être en fête ?
Peut-être pas, mon esprit est retors

La grisaille est partout, dedans, dehors
Pour la chasser tous les moyens sont bons
Peut-être pas, mon esprit est retors
Divaguer, partir en état second

Pour la chasser tous les moyens sont bons
Danser toute seule la farandole
Divaguer, partir en état second
Tant pis si le voisin me prend pour folle

Danser toute seule la farandole
Les enfants sont tout de même touchés?
Tant pis si le voisin me prend pour folle
Mais qui faut-il croire, que faut-il penser?

Les enfants sont tout de même touchés?
Indigestion de trop d’informations
Mais qui faut-il croire, que faut-il penser?
Vingt-sept septembre prochaines votations

Indigestion de trop d’informations
Comment s’y retrouver, faire le tri
Vingt-sept septembre prochaines votations
Si Dieu le veut et le Covid aussi

Comment s’y retrouver faire le tri
Oublions tout, santé, musique et fête
Si Dieu le veut et le Covid aussi
Le ciel nous est tombé sur la tête

Nicolette Ostrini / 30.4.20

Pantoum / 111

On dit que la vie continue
Allez savoir ce qu’on en fait
Sans plus descendre dans la rue
Là où avant ça se passait

Allez savoir ce qu’on en fait
A compter les pages qu’on lit
Là où avant ça se passait
A rêver séjour à Bali

A compter les pages qu’on lit
Nos histoires jamais finies
A rêver séjour à Bali
Rien ne nous verra désunis

Nos histoires jamais finies
Enfermés derrière des portes
Rien ne nous verra désunis
Nos envies restent les plus fortes

Enfermés derrière des portes
Et qu’éprouvons-nous là-dedans
Nos envies restent les plus fortes
Nous ne sommes que des migrants

Et qu’éprouvons-nous là-dedans
Où filent toutes nos idées
Nous ne sommes que des migrants
Comment se brouillent nos pensées

Où filent toutes nos idées
Lors nous nous tiendrons hors des rangs
Comment se brouillent nos pensées
Sans avoir dévoyé nos chants

Lors nous nous tiendrons hors des rangs
Sûr qu’on retrouvera la rue
Sans avoir dévoyé nos chants
On dira nos vies continuent

Gilles F. Jobin / 30.4.20

Pantoum / 110

Ce qui manque ? Toutes les transitions

Ce moment où l’on se dit au revoir

Echange anodin de basse tension

Un intervalle dans le bus – bonsoir !

*

Ce moment où l’on se dit au revoir

Ce tourbillon : visages inconnus

Un intervalle dans le bus – bonsoir !

L’insouciance de mordre un fruit charnu

*

Ce tourbillon : visages inconnus

Ce froissement d’épaules jusqu’au bar

L’insouciance de mordre un fruit charnu

Le retour à travers ville un peu tard

*

Ce froissement d’épaules jusqu’au bar

Les décibels aérant la tête

Le retour à travers ville un peu tard

Et le printemps parfumé de fête

*

Les décibels aérant la tête

Le train du matin et ses passagers

Et le printemps parfumé de fête

Ce temps rien qu’à soi, pas à partager ?

*

Le train du matin et ses passagers

Un coin de terrasse pour l’apéro

Ce temps rien qu’à soi, pas à partager ?

Sans ressassement de quelque credo

*

Un coin de terrasse pour l’apéro

Nulle fixette sur aucun poumon

Sans ressassement de quelque credo

Ce qui manque ? Toutes les transitions

Odile Cornuz / 29.4.20

Pantoum / 109

On ne bat plus monnaie ni n’est orpailleur

On invente des milliards électroniques

Que ce soit dans nos régions ou dans l’ailleurs

A tous les minuscules on fait la nique

*

On invente des milliards électroniques

On confine, on conquiert et l’on considère

A tous les minuscules on fait la nique

On balbutie, bêtifie et désespère

*

On confine, on conquiert et l’on considère

Les fourmis font trois petits tours et s’en vont

On balbutie, bêtifie et désespère

Les artistes crient : crayons et savons

*

Les fourmis font trois petits tours et s’en vont

Le fossoyeur gratte son ukulélé

Les artistes crient : crayons et savons

Le malheureux richteau est le plus zélé

*

Le fossoyeur gratte son ukulélé

Et je danse avec jubilation, hors d’âge

Le malheureux richteau est le plus zélé

Les journaleux font entendre leur ramage

*

Et je danse avec jubilation, hors d’âge

Demain tout changera-t-il, ci et ailleurs ?

Les journaleux font entendre leur ramage

On ne bat plus monnaie ni n’est orpailleur

Pierre-Yves Lador / 29.4.20

Pantoum / 108

Les ai vus à l’écran – pas comme avant…

Le matin on aurait pris un café

Dans les yeux on aurait vu du brillant

On aurait dit quelques banalités

*

Le matin on aurait pris un café

L’une aurait raconté ses vacances

On aurait dit quelques banalités

Une pause pastel, pas trop dense

*

L’une aurait raconté ses vacances

L’autre se serait plaint de maux de dents

Une pause pastel, pas trop dense,

Peut-être des nouvelles d’un enfant ?

*

L’autre se serait plaint de maux de dents

Et rien de bien mémorable en somme

Peut-être des nouvelles d’un enfant ?

J’aurais tranché des quartiers de pomme

*

Et rien de bien mémorable en somme

Un local, une machine à café

J’aurais tranché des quartiers de pomme

Nul poumon ne serait catastrophé

*

Un local, une machine à café

Quelques collègues, du très quotidien

Nul poumon ne serait catastrophé

Chacun suivrait son propre méridien

*

Quelques collègues, du très quotidien

Des personnes assemblées pour un temps

Chacun suivrait son propre méridien

Les ai vus à l’écran – pas comme avant…

Odile Cornuz / 28.4.20

Pantoum / 107

Nouvelles figures familières ?

Celle d’un grand émacié mal rasé

Avec son air de fin de carrière

Celle qu’on écoute oreille dressée

*

Celle d’un grand émacié mal rasé

Quasi sculpture de Giacometti

Celle qu’on écoute oreille dressée

Peut-être rétive à tous confettis

*

Quasi sculpture de Giacometti

Allure débonnaire ? Déplacée…

Peut-être rétive à tous confettis

Sérieux garanti : pas de panacée

*

Allure débonnaire ? Déplacée

Si ce n’est sur les réseaux – gags en vrac

Sérieux garanti : pas de panacée

Ni de stratégie style bric-à-brac

*

Si ce n’est sur les réseaux – gags en vrac

Les poumons ? Pas à la fête pourtant

Ni de stratégie style bric-à-brac

Plutôt fiable, voire protestant ?

*

Les poumons ? Pas à la fête pourtant

Rassurer – mais réenchanter aussi !

Plutôt fiable, voire protestant ?

Je l’aime bien, moi, son profil précis…

*

Rassurer – mais réenchanter aussi !

Nous voici dans une nouvelle ère

Je l’aime bien, moi, son profil précis…

Nouvelles figures familières ?

Odile Cornuz / 27.4.20

Pantoum / 106

Ce sont eux les rhododendrons

J’aimerais mettre ma tête dans leurs feuilles

Suis-je bien sûre qu’ils nous attendront ?

Et leurs pieds nus danseront la veille

*

J’aimerais mettre ma tête dans leurs feuilles

Mais je sais aussi que certains…

Et leurs pieds nus danseront la veille

Verront leur dernier traversin

*

Mais je sais aussi que certains…

Corps immergé en altitude

Verront leur dernier traversin

Savourant cette haute magnitude

*

Corps immergé en altitude

Que savons-nous de nos voisins ?

Savourant cette haute magnitude

Morts en un souffle un beau matin

*

Que savons-nous de nos voisins ?

Quoi de leurs combats, leurs amours ?

Morts en un souffle un beau matin

Quoi de leurs vies en calembours ?

*

Quoi de leurs combats, leurs amours ?

Debout dans l’eau poissonneuse

Quoi de leurs vies en calembours ?

Les yeux fermés l’âme rêveuse

*

Debout dans l’eau poissonneuse

Debout nous nous souviendrons

Les yeux fermés l’âme rêveuse

Ce sont eux les rhododendrons

Orélie Fuchs/ 27.4.20

Pantoum / 105

La vie est remplie de promesses

N’oublions pas d’où nous venons

Soyons très fiers de nos ivresses

Chacun de nous a ses raisons

*

N’oublions pas d’où nous venons

La liberté c’est le futur

Chacun de nous a ses raisons

Pourquoi ne pas sauter le mur

*

La liberté c’est le futur

On doit pouvoir rire de tout

Pourquoi ne pas sauter le mur

Pour être heureux soyons tous fous

*

On doit pouvoir rire de tout

Pleurer ne sert qu’à regretter

Pour être heureux soyons tous fous

Mais on va tous y arriver

*

Pleurer ne sert qu’à regretter

Le monde ne changera pas

Mais on va tous y arriver

Quoiqu’il en coûte tout restera

*

Le monde ne changera pas

Les sourires, ils sont gratuits

Quoiqu’il en coûte tout restera

Si le soleil comprend la nuit

*

Les sourires, ils sont gratuits

L’amour vaut bien plus qu’une messe

Si le soleil comprend la nuit

La vie est remplie de promesses

Remy Degen / 27.4.20

Pantoum / 104

Elle a soufflé ses bougies aujourd’hui

Toute en beauté sous un collier d’ambre

Plusieurs dizaines au compteur de la vie

Au faîte d’une famille en nombre

*

Toute en beauté sous un collier d’ambre

Pour une fête plutôt intime

Au faîte d’une famille en nombre

Quelques individus soudés en team

*

Pour une fête plutôt intime

Quatre autour du gâteau au chocolat

Quelques individus soudés en team

Chacun deux pas de distance et voilà

*

Quatre autour du gâteau au chocolat

Etrange, le temps passe trop vite

Chacun deux pas de distance et voilà

Cet après-midi a pris la fuite

*

Etrange, le temps passe trop vite

Mais quel anniversaire bizarre !

Cet après-midi a pris la fuite

Dans toutes les têtes, c’est le bazar…

*

Mais quel anniversaire bizarre !

Nous l’aurions souhaité plus insouciant

Dans toutes les têtes, c’est le bazar…

Dans les poumons, le grand chambardement

*

Nous l’aurions souhaité plus insouciant

Mais nous l’avons célébré à l’envi

Dans les poumons, le grand chambardement

Elle a soufflé ses bougies aujourd’hui

Odile Cornuz / 26.4.20

Pantoum / 103

Cette pluie nous offre un parfum d’été

Qui enjoint à regarder au dedans

Qui oscille : lourdeur, légèreté

Avec la grâce folle du serpent

*

Qui enjoint à regarder au dedans

Où es-tu ? Où suis-je ? Où sommes-nous ?

Avec la grâce folle du serpent

Qui se faufile parmi les cailloux ?

*

Où es-tu ? Où suis-je ? Où sommes-nous ?

Qui portera le deuil de l’oisillon ?

Qui se faufile parmi les cailloux ?

Voici le doute rampant des saisons

*

Qui portera le deuil de l’oisillon ?

Il n’était que bec prêt à avaler

Voici le doute rampant des saisons

Lesquels d’entre nous rejoindront l’été ?

*

Il n’était que bec prêt à avaler

Organes et poumons ? Bouillie noire…

Lesquels d’entre nous rejoindront l’été ?

Comment émerger de ces déboires ?

*

Organes et poumons ? Bouillie noire…

Alors tu, alors je, alors nous – oui ?

Comment émerger de ces déboires ?

Que savons-nous de ce qui meut la vie ?

*

Alors tu, alors je, alors nous – oui ?

Tous confirmés en nos fragilités…

Que savons-nous de ce qui meut la vie ?

Cette pluie nous offre un parfum d’été

Odile Cornuz / 25.4.20

Pantoum / 102

Dans ton sang y a la vie qui bat
La mort aussi qui fait sa ronde
Dans ton sang y a tout un combat
Pour que puisse tourner le monde

La mort aussi qui fait sa ronde
Elle rôde là depuis des mois
Pour que puisse tourner le monde
Il suffirait qu’elle n’y soit pas

Elle rôde là depuis des mois
Cellules folles en confettis
Il suffirait qu’elle n’y soit pas
Dans ton sang y a la leucémie

Cellules folles en confettis
Et toi toujours qui chantes et danses
Dans ton sang y a la leucémie
Dans nos cœurs espoir et défiance

Et toi toujours qui chantes et danses
Toi toujours tu nous ensoleilles
Dans nos cœurs espoir et défiance
Je rêve tant de te voir vieille

Toi toujours tu nous ensoleilles
Avec tes cinq ans à venir
Je rêve tant de te voir vieille
La mort n’a qu’à bien se tenir

Avec tes cinq ans à venir
J’ose penser que tu vaincras
La mort n’a qu’à bien se tenir
Dans ton sang y a la vie qui bat

Léonie Dobler / 25.4.20

Pantoum / 101

Il suffit d’une épée de Damoclès

Pour sentir sa précaire condition

Aussi bien que d’un anneau de Gygès

Pour croire maîtriser sa condition

*

Pour sentir sa précaire condition

Un virus pourrait être souverain

Pour croire maîtriser sa condition

Les savants vont inventer un vaccin

*

Un virus pourrait être souverain

Si les médias n’avaient pas le pouvoir

Les savants vont inventer un vaccin

Et tout cela me remplirait d’espoir

*

Si les médias n’avaient pas le pouvoir

Serai un virevoltant dans le vent

Et tout cela me remplirait d’espoir

Si cancer n’était né auparavant

*

Serai un virevoltant dans le vent

Au corps disséminé de métastases

Si cancer n’était né auparavant

Révélées par puissants dépistages

*

Au corps disséminé de métastases

Sommes-nous tous nés pour enfin mourir

Révélées par puissants dépistages

Tôt ou tard, maintenant, dans l’avenir

*

Sommes-nous tous nés pour enfin mourir

Sous un ciel plein d’épées de Damoclès

Tôt ou tard, maintenant, dans l’avenir

Il suffit d’une épée de Damoclès

Pierre-Yves Lador / 25.4.20

Pantoum / 100

Presque toutes les feuilles sont sorties

La forêt, de loin ? Un tapis moussu

Morts ? Cinquante mille aux Etats-Unis

La Camarde, pour sûr, n’est pas déçue…

*

La forêt, de loin ? Un tapis moussu

Qui vous invite encore au renouveau

La Camarde, pour sûr, n’est pas déçue

Mais le printemps têtu joue du pipeau

*

Qui vous invite encore au renouveau

Alors que pointe la mélancolie

Mais le printemps têtu joue du pipeau

Ça vous pousse à privilégier la vie

*

Alors que pointe la mélancolie

Des poumons débordent de détresse

Ça vous pousse à privilégier la vie

Traitez vos proches avec tendresse !

*

Des poumons débordent de détresse

Leurs plaintes sillonnent la planète

Traitez vos proches avec tendresse !

Rempart fragile, bon pour la tête ?

*

Leurs plaintes sillonnent la planète

Et certains feraient la sourde oreille ?

Rempart fragile, bon pour la tête ?

De vert ils n’aimeraient que l’oseille ?

*

Et certains feraient la sourde oreille ?

Deux cent mille personnes ont péri…

De vert ils n’aimeraient que l’oseille ?

Presque toutes les feuilles sont sorties

Odile Cornuz / 24.4.20

Pantoum / 99

Mouvements intérieurs au programme…

Tri de papiers, photos retrouvailles

Ce qui se trouve au fond de nos âmes

Puisque le monde est maison de paille

*

Tri de papiers, photos retrouvailles

Observation d’une graine germée

Puisque le monde est maison de paille

Exercices de patience appliquée

*

Observation d’une graine germée

Du vol d’un oiseau, du vent dans les feuilles

Exercices de patience appliquée

Voyages innombrables en fauteuil

*

Du vol d’un oiseau, du vent dans les feuilles

Sentir l’impermanence et la durée

Voyages innombrables en fauteuil

Là où jamais vous ne seriez allée

*

Sentir l’impermanence et la durée

Aiguisés, à taillader votre cœur

Là où jamais vous ne seriez allée

Où – peut-être – apprendre la douceur

*

Aiguisés, à taillader votre cœur

Tristes poumons et vaisseaux enflammés

Où – peut-être – apprendre la douceur

Grâce aux mots qui réparent, s’exclamer !

*

Tristes poumons et vaisseaux enflammés

Acceptez ce répit, brin de calme

Grâce aux mots qui réparent, s’exclamer !

Mouvements intérieurs au programme…

Odile Cornuz / 23.4.20

Pantoum / 98

Une phrase sur un T-shirt, et hop !

On se sent plus proches, c’est facile…

Qu’aurait dit alors le vieil Esope ?

Que les fables, oui, tissent les villes…

*

On se sent plus proches, c’est facile

Lorsqu’on ose respirer le grand air

Que les fables, oui, tissent la ville

Lorsque la nuit vibre de prières

*

Lorsqu’on ose respirer le grand air

Et je sais ton sourire près du mien

Lorsque la nuit vibre de prières

Oh oui ! Aussi lentement qu’il convient

*

Et je sais ton sourire près du mien

Peut-on partager la légèreté ?

Oh oui ! Aussi lentement qu’il convient

Offrir de l’espace à toutes pensées…

*

Peut-on partager la légèreté ?

Aussi vite et largement qu’il le faut ?

Offrir de l’espace à toutes pensées…

Vêtir de coton imprimé son dos ?

*

Aussi vite et largement qu’il le faut ?

Que les poumons lésés se libèrent

Vêtir de coton imprimé son dos ?

Pourquoi pas, si cela vous rend fière…

*

Que les poumons lésés se libèrent

Et vous iriez à la plage en flip-flops ?

Pourquoi pas, si cela vous rend fière…

Une phrase sur un T-shirt, et hop !

Odile Cornuz/ 22.4.20

Pantoum / 97

Qui a mangé toute la glace ?

Qui a vomi dans la forêt ?

Pris pour soi toute la farce?

Oublié le bain du marais ?

*

Qui a effacé la forêt ?

Oublié la subtile beauté ?

Oublié le bain du marais ?

Perdu toute simple clarté ?

*

Oublié la subtile beauté ?

Couru bouche et ventre à terre ?

Perdu toute simple clarté ?

Nié l’urgence planétaire?

*

Couru bouche et ventre à terre ?

Silence terrible dans les douches

Nié l’urgence planétaire?

Etouffé la bonté de nos bouches ?

*

Silence terrible dans les douches

Je sens que j’aime cette lenteur

Etouffé la bonté de nos bouches ?

Je vais chercher tous les acteurs

*

Je sens que j’aime cette lenteur

On a tant eu qu’on s’est mordu

Je vais chercher tous les acteurs

Pas encore sûr qu’on ait perdu

*

On a tant eu qu’on s’est mordu

Goût de citron dans la bouche

Pas encore sûr qu’on ait perdu

Peut-être qu’on a mangé la louche

*

Goût de citron dans la bouche

On lèche nos doigts pleins de pétrole

Peut-être qu’on a mangé la louche

Qui pour oser trouver ça drôle ?

*

On lèche nos doigts pleins de pétrole

Le soleil sèche encore nos faces

Qui pour oser trouver ça drôle ?

Qui a mangé toute la glace ?

Orélie Fuchs / 22.4.20

Pantoum / 96

C’est les riches qui disent cela

Les pauvres eux ne peuvent dormir

Ils vivent sans ce cinéma

Ils n’aimeraient rien ressentir

*

Les pauvres eux ne peuvent dormir

Un jour enfin tout changera

Ils n’aimeraient rien ressentir

Il faudra bien, tout pétera

*

Un jour enfin tout changera

Au Moyen-Age c’étaient les mêmes

Il faudra bien, tout pétera

Rois et curés n’avaient point d’peine

*

Au Moyen-Age c’étaient les mêmes

Les gueux n’avaient qu’à regarder

Rois et curés n’avaient point d’peine

En fait depuis rien n’a changé

*

Les gueux n’avaient qu’à regarder

Quand allons-nous devoir nous battre

En fait depuis rien n’a changé

Comment éliminer les castes

*

Quand allons-nous devoir nous battre

Ne craignons rien, c’est notre loi

Comment éliminer les castes

Ils ont peur n’ayant pas de foi

*

Ne craignons rien, c’est notre loi

Notre seule amie c’est la mort

Ils ont peur n’ayant pas de foi

Pour nous amener à bon port

*

Notre seule amie c’est la mort

La porte où tous allons passer

Pour nous amener à bon port

Le paradis n’est pas donné

*

La porte où tous allons passer

Les chances ne sont pas égales

Le paradis n’est pas donné

C’est une loi pas une régale

*

Les chances ne sont pas égales

L’enfer va tous nous réchauffer

C’est une loi pas une régale

Et avant pourrons-nous rêver ?

*

L’enfer va tous nous réchauffer

Les pauvres n’en ont rien à cirer

Et avant pourrons-nous rêver ?

Ils seront quand même de côté

*

Les pauvres n’en ont rien à cirer

Triste est celui qui le voudra

Ils seront quand même de côté

C’est les riches qui disent cela

Remy Degen / 22.4.20

Pantoum / 95

Aujourd’hui, plaisir printanier
Petits pois, asperges et fèves
Autrefois plaisirs partagés
Maintenant en pensées, en rêve

Petits pois, asperges et fèves
Le temps s’écoule lentement
Maintenant en pensées, en rêve
Et tout à coup, le poids des ans

Le temps s’écoule lentement
Plus de soixante-cinq, c’est classé
Et tout à coup, le poids des ans
Personnes à risque, donc écartées

Plus de soixante-cinq, c’est classé
On veut sortir dès maintenant
Personnes à risque, donc écartées
On ne veut plus de ce présent

On veut sortir dès maintenant
Chanter et danser sur les routes
On ne veut plus de ce présent
Chasser, effacer tous ces doutes

Chanter et danser sur les routes
Oublier tous les malades
Chasser, effacer tous ces doutes
Simplement partir en balade

Oublier tous les malades
Choisir et remplir son panier
Simplement partir en balade
Aujourd’hui, plaisir printanier

Nicolette Ostrini / 22.4.20

Pantoum / 94

Sur l’image on suit de petits cailloux

Où mènent-ils ? On ne sait pas… Au lac ?

Vers les plus gros, les submergés, les doux

Non ramassés, polis par le ressac

*

Où mènent-ils ? On en sait peu… Au lac ?

Dehors, dans le monde indéterminé

Rafistolé, poli par le ressac

Sous l’eau, entre les algues, emmêlés

*

Dehors, dans le monde indéterminé

Là où se dressent quelques pissenlits

Sous l’eau, entre les algues emmêlées

Ou sur une branche d’arbre verdi

*

Là où se dressent quelques pissenlits

Dont tu te réjouis qu’ils blanchissent

Ou sur une branche verte, pardi

Là où tu attends que le vent bruisse

*

Donc, tu te réjouis qu’ils blanchissent

Pour souffler dessus avec tes poumons

Là, oui, tu attends que le vent bruisse

Que s’évanouisse cette saison

*

Pour souffler dessus avec tous poumons

Ainsi semer l’imaginaire aux vents

Que s’épanouisse cette saison

Cédant la place à tous embrassements

*

Ainsi céder l’imaginaire aux vents

Effacer les distances ! Amour fou !

Cédant la place à tous embrasements

Sur l’image on suit de petits cailloux

Odile Cornuz / 21.4.20

Pantoum / 93

Da più podei brascè amis e paregn

l’é comè fàm fè ‘na gran penitense

l’é smensada apene dopo caren

da mars e l’o’ nè inans pasò l’Ascense

*

Da più podei nè sgiù in strada sense

ch’i’t varda tuc ados da malfiden

ch’l’é pe’ par impienì la cardense

ch’a s’as va, mighi par divertimen

*

Da più podei viden cón dai sé sgen

solche al telefon prim che nè in do lec

da gnang podei nè in vers s’i é malamen

a pensaigh dre a vegn sgiù l’acqua dai ec

*

Da più podei nè in ca dai pouri vec

a par propi da faigh um gran intort

bigni sperè ch’i sari mighi i ec

a pensaigh dré a vegn solche da gni smort

*

Da più podei segnè i nes pouri mort

ne in ca ne in geise e gnang foro al camsan

i dis cui ch’a comanda e ch’as sen fort

che bigni speciè almeng fin Tuc I Sagn

*

Ch’a sibi péu um sgen marò o um sgen san

da più vidél l’é propi um gran intort

a fa quaicos, incheu comè doman

da più podei videi ne viu ne mort

Walter Rosselli / 21.4.20

Pantoum / 92

Des framboisiers aux épines molles

Poussent au balcon, à vue d’œil, quasi

Mais celles qui piquent seront folles

Et dans quelques jours, toutes endurcies

*

Poussent au balcon, à vue d’œil, quasi

Toiles d’araignées, solidarités

Et dans quelques jours, toutes endurcies

Quelles ardeurs portées dans la durée ?

*

Toiles d’araignées, solidarités

Jusqu’à quel soir, les applaudissements ?

Quelles ardeurs portées dans la durée ?

Et après coup, combien de jugements ?

*

Jusqu’à quel soir, les applaudissements ?

Pour celles qui sauvent des poumons fous…

Et après coup, combien de jugements ?

Pour ceux qui abusent, pour les filous…

*

Pour celles qui sauvent des poumons fous…

Ne pas oublier la gratitude

Pour ceux qui abusent, pour les filous…

Oublier toute mansuétude

*

Ne pas oublier la gratitude

Pour les magasiniers, les livreuses

Oublier toute mansuétude

Pour les hackers, les boursicoteuses

*

Pour les magasiniers, les livreuses

Hissez, haut, toutes les banderoles

Pour les hackers, les boursicoteuses

Des framboisiers aux épines molles

Odile Cornuz / 20.4.20

Pantoum / 91

Ma joue collée contre le ciel je prépare un rêve

Dans le salon, enfants lézards aux regards abyssaux

Je m’installe pour observer le vaste puzzle en grève

Mes poèmes ont de plus en plus des airs d’esquimaux

*

Dans le salon, enfants lézards aux regards abyssaux

Que faudrait-il faire pour pallier cet étrange phénomène ?

Mes poèmes ont de plus en plus des airs d’esquimaux

Parler avec le temps, avec le vent, avec soi-même ?

*

Que faudrait-il faire pour pallier cet étrange phénomène ?

Ils chantent seuls, chassent, et tentent de résister au chaos

Parler avec le temps, avec le vent, avec soi-même ?

Leurs mains esquissent dans l’air rose un cheval au galop

*

Ils chantent seuls, chassent, et tentent de résister au chaos

En observant l’espace un instant je frissonne et ris

Leurs mains esquissent dans l’air rose un cheval au galop

J’invente une fête sur l’étendue d’une immense prairie

*

En observant l’espace un instant je frissonne et ris

Quelle distance entre tes doutes et leurs yeux grands ouverts ?

J’invente une fête sur l’étendue d’une immense prairie

Quelle incidence aura l’amour qu’ils portent aux trouvères ?

*

Quelle distance entre tes doutes et leurs yeux grands ouverts ?

Voir ton visage teinté aux couleurs de l’aube polissonne

Quelle incidence aura l’amour qu’ils portent aux trouvères ?

Tu ris des bois, du chevreuil, de toutes beautés qui rayonnent

*

Voir ton visage teinté aux couleurs de l’aube polissonne

A quoi bon? Est-ce l’imagination qui le mieux t’élève?

Tu ris des bois, du chevreuil, de toutes beautés qui rayonnent

Ma joue collée contre le ciel je prépare un rêve

Orélie Fuchs / 20.4.20

Pantoum / 90

Quels mots neufs avez-vous vu émerger ?

Task force, sang froid et interdiction

Urgence et état de nécessité

Et de très concrètes implications

*

Task force, sang froid et interdiction

Panel d’alternatives en ligne

Et de très concrètes implications

Distanciation et quête de signes

*

Panel d’alternatives en ligne

Vulnérables, plans de continuité

Distanciation et quête de signes

Dépôt de bilan, mode dégradé

*

Vulnérables, plan de continuité

Annulations encore – stratégies

Dépôt de bilan, mode dégradé

Déconfinement et démocratie

*

Annulations encore – stratégies

Sous l’année blanche tous ensevelis

Déconfinement et démocratie

Certains de ces mots vous ont alourdis ?

*

Sous l’année blanche tous ensevelis

Amendes, restriction de libertés

Certains de ces mots vous ont alourdis ?

Tous les poumons doivent s’en expurger

*

Amendes, restrictions de libertés

Par ces termes nos cerveaux sont squattés

Tous les poumons doivent s’en expurger

Quels mots neufs avez-vous vu émerger ?

Odile Cornuz / 19.4.20

Pantoum / 89

Comment écrire ce pantoum ?
Alexandrins ? Décasyllabes ?
Dénicher des rimes en oum ?
Des quatrains en octosyllabes ?

Alexandrins ? Décasyllabes ?
Très stylé sera son allure ?
Des quatrains en octosyllabes ?
Ou foncer pile dans le mur ?

Très stylé sera son allure ?
Faut-il déjà trouver un thème !
Ou foncer pile dans le mur ?
C’est pas seulement des je t’aime !

Faut-il déjà trouver un thème !
De quel droit serais-je léger ?
C’est pas seulement des je t’aime !
Quand partout il y a danger

De quel droit serais-je léger ?
Me tapera-t-on sur les doigts ?
Quand partout il y a danger
Jouant avec les mots s’cuz-moi

Me tapera-t-on sur les doigts ?
Combien comptera-t-il de vers ?
Jouant avec les mots s’cuz-moi
Soit à l’endroit soit à l’envers

Combien comptera-t-il de vers ?
Devrais-je tout laisser tomber ?
Soit à l’endroit soit à l’envers
Je ne vais pas y arriver

Devrais-je tout laisser tomber
Badaboum atchoum et loukoum
Je ne vais pas y arriver
Comment écrire ce pantoum ?

Gilles F. Jobin / 19.4.20

Pantoum / 88

Peut-on jouer avec les mots ?

Les malaxer, les pressurer

Ne tournons pas autour du pot

Ils sont eux prêts à gigoter

*

Les malaxer, les pressurer

Ils rigolent et sont contents

Ils sont eux prêts à gigoter

C’est précieux de temps en temps

*

Ils rigolent et sont contents

Ose-t-on triturer les mots ?

C’est précieux de temps en temps

Et pourquoi pas sortir les crocs

*

Ose-t-on triturer les mots ?

Ils sont très heureux, ils adorent

Et pourquoi pas sortir les crocs

Ils attendent cela encore

*

Ils sont très heureux, ils adorent

J’aime les tarabiscoter

Ils attendent cela encore

Pour eux on doit tout essayer

*

J’aime les tarabiscoter

N’ayons pas peur, c’est bien leur lot

Pour eux on doit tout essayer

ON PEUT jouer avec les mots

Remy Degen / 19.4.20

Pantoum / 87

Le barbecue des voisins est sorti

Charbon aspergé d’alcool à brûler

De fumée le quartier est envahi

Et la table de camping dépliée

*

Charbon aspergé d’alcool à brûler

Avec le soleil, ça fait vacances

Et la table de camping dépliée

La salade ? Herbes de Provence

*

Avec le soleil, ça fait vacances

Et cette envie de ne penser à rien

La salade ? Herbes de Provence

Et de jouer un peu avec le chien

*

Et cette envie de ne penser à rien

Rien qui blesse, non, rien qui menace

Et de jouer un peu avec le chien

Cette paresse prend de la place

*

Rien qui blesse, non, rien qui menace

Rien qui préoccuperait les poumons

Cette paresse prend de la place

Et l’oubli de ce monde, pour de bon

*

Rien qui préoccuperait les poumons

Mettre l’angoisse entre parenthèses

Et l’oubli de ce monde, pour de bon

Loin des chiffres et autres synthèses

*

Mettre l’angoisse entre parenthèses

Trinquer et souhaiter bon appétit

Loin des chiffres et autres synthèses

Le barbecue des voisins est sorti

Odile Cornuz / 18.4.20

Pantoum / 86

Du jour au lendemain ils sont partis…
Remontés tout là-haut vers leurs rochers
Plus de pirouettes ni d’espiègleries
Tous les chocards chez eux sont retournés

Remontés tout là-haut vers leurs rochers
En montagne jusqu’à l’automne prochain
Tous les chocards chez eux sont retournés
Et ici bas se poursuit le train-train

En montagne jusqu’à l’automne prochain
Quand pourrons-nous refaire des galipettes?
Et ici bas se poursuit le train-train
En joie, partage, retrouvailles et fêtes?

Quand pourrons-nous refaire des galipettes?
Les quelques nuages dans le ciel du jour
En joie, partage, retrouvailles et fêtes?
D’un semblant de pluie enfin le retour?

Les quelques nuages dans le ciel du jour
Pour nous aussi c’est la sécheresse
D’un semblant de pluie enfin le retour?
Trois gouttes pour nous sortir de la détresse

Pour nous aussi c’est la sécheresse
Voler vers ceux qu’on aime, les embrasser
Trois gouttes pour nous sortir de la détresse
Pas trop, juste ce qu’il faut, juste assez

Voler vers ceux qu’on aime, les embrasser
Allez, avant l’automne, on s’enhardit !
Pas trop, juste ce qu’il faut, juste assez
Du jour au lendemain ils sont partis…

Nicolette Ostrini / 18.4.20

Pantoum / 85

« Simplement saluer l’air devant moi »

Inscrit noir sur marbre, c’est un cadeau

D’une amie chère qui connaît les voix

De l’idéal, des couleurs et du beau

*

Inscrit noir sur marbre, c’est un cadeau

Qui permet le matin de respirer

De l’idéal, des couleurs et du beau

Avant de plonger dans toute journée

*

Qui permet le matin de respirer

Tandis que la fauvette m’étonne

Avant de plonger dans toute journée

Si follement elle s’époumone

*

Tandis que la fauvette m’étonne

Celui qui chantait les mots bleus n’est plus

Si follement elle s’époumone

En hommage à tous ces morts en surplus ?

*

Celui qui chantait les mots bleus n’est plus

L’été, ma foi, sera sans festivals

En hommage à tous ces morts en surplus ?

Chacun écoutera l’oiseau local

*

L’été, ma foi, sera sans festival

A quand la prochaine grande tablée ?

Chacun écoutera l’oiseau local

Ton anniversaire, quand le fêter ?

*

A quand la prochaine grande tablée ?

Célébrant l’amitié, l’amour, la joie ?

Ton anniversaire, quand le fêter ?

« Simplement saluer l’air devant moi »

Odile Cornuz / 17.4.20

Pantoum / 84

Uscir di casa, fare un girotondo

andare al cine, al bar o alla stazione

partire in vacanza e girare il mondo

scendere in piazza e giocare a pallone

*

Prendere il pullman e andare a Olivone

oppure il treno e scappare a Sciaffusa

dormire in albergo a mezza pensione

nella valigia tutto alla rinfusa

*

Starsene fuori se la porta è chiusa

sdraiarsi nel parco sotto le stelle

ascoltando il gatto che fa le fusa

indugiare udendo le cinciarelle

*

Andare a zonzo mangiando frittelle

su una panchina sedersi a gustare

vino e birra e ridere a crepapelle

stare all’aperto, le sere son chiare

*

Andare in chiesa e ammirare l’altare

rendere visita a malati e anziani

fermarsi a lungo fin quando ci pare

offrire un mazzo di bei tulipani

*

Consapevole di sciagure immani

accommiatarsi da chi se n’è andato

sperare che vada meglio domani

sospirare oggi piangendo il passato

*

Tutte le brame represse d’un fiato

e i sentimenti scacciati giù in fondo

e sembra che a lungo sarà vietato

uscir di casa, fare un girotondo

Walter Rosselli / 17.4.20

Pantoum / 83

J’aime pas le café et pourtant
Chaque matin je le buvais
Ce bar s’appelait Le Cadran
Pour l’entrevoir je m’y rendais

Chaque matin je le buvais
Pas assez d’yeux pour le suivre
Pour l’entrevoir je m’y rendais
Adossée au zinc de cuivre

Pas assez d’yeux pour le suivre
Je lui avais trouvé un nom
Adossée au zinc de cuivre
L’avais baptisé Papillon

Je lui avais trouvé un nom
Il avait belle allure
L’avais baptisé Papillon
L’étudiait l’architecture

Il avait belle allure
Un jour il ouvrit la bouche
L’étudiait l’architecture
L’avait très peu de cartouches

Un jour il ouvrit la bouche
Où sont les toilettes dit-il
L’avait très peu de cartouches
Et je n’y vis rien de subtil

Où sont les toilettes dit-il
Il aurait pu me faire du flan
Et je n’y vis rien de subtil
J’aime pas le café et pourtant

Valérie Lobsiger / 17.4.20

Pantoum / 82

Surgissent des signes de détente

Et quelques étapes progressives

Sont évoquées sous la grande tente

De notre démocratie active

*

Et quelques étapes progressives

Dessinant des retours vers le futur

De notre démocratie active

Hors du cauchemar, réveil pas trop dur ?

*

Dessinant des retours vers le futur

Les enfants veulent revoir leurs copains

Hors du cauchemar, réveil pas trop dur ?

L’Etat épongera-t-il tous pépins ?

*

Les enfants veulent revoir leurs copains

On leur promet l’école au mois de mai

L’Etat épongera-t-il tous pépins ?

Ne pense-t-il qu’à son portemonnaie ?

*

On leur promet l’école au mois de mai

Quel bonheur de retrouver la classe !

Ne pense-t-il qu’à son portemonnaie ?

Quels usages resteront donc en place ?

*

Quel bonheur de retrouver la classe !

A potasser ? Le chapitre poumons…

Quels usages resteront donc en place ?

Masque, peut-être ? Et distanciation…

*

A potasser ? Le chapitre poumons…

Alors que la méfiance serpente

Masque, peut-être ? Et distanciation…

Surgissent des signes de détente

Odile Cornuz / 16.4.20

Pantoum / 81

Des cris enterrés dans le sable

Tu te couches et tu les découvres

Disparition de tes semblables

Tu es nue et tu veux vivre

*

Tu te couches et tu les découvres

Tu as vu, tu prends une rame

Tu es nue et tu veux vivre

Ho, regarde cet hologramme !

*

Tu as vu, tu prends une rame

Partout têtu le vent te mène

Ho, regarde cet hologramme !

Partout le vent fête foraine

*

Partout têtu le vent te mène

Est-ce ta chance qu’il célèbre ?

Partout le vent fête foraine

Un tour pourtant dans les ténèbres

*

Est-ce ta chance qu’il célèbre ?

Suivant une étrange partition

Un tour pourtant dans les ténèbres

Une violente soustraction

*

Suivant une étrange partition

Un trou au visage bigarré

Une violente soustraction

Abstraction des noms oubliés

*

Un trou au visage bigarré

Dans une énième variation

Abstraction des noms oubliés

Un puits de souvenirs profonds

*

Dans une énième variation

Sur la mer des pâleurs durables

Un puits de souvenirs profonds

Vestiges de corps admirables

*

Sur la mer des pâleurs durables

Honte des lois insupportables

Vestiges de corps admirables

Des cris enterrés dans le sable

Orélie Fuchs / 16.4.20

Pantoum / 80

Voici le parc, derrière l’hôpital

A midi le personnel en pause

Se répartit en uniforme égal

Echange des propos qu’on suppose

*

A midi le personnel en pause

Prend le soleil et marche dans l’herbe

Echange des propos qu’on suppose

En suspens dans le printemps superbe

*

Prend le soleil et marche dans l’herbe

Quels ont été les soins prodigués, là ?

En suspens dans le printemps superbe

Qui a pris le temps d’humer le lilas ?

*

Quels ont été les soins prodigués, là ?

Derrière les vitres et autres sas

Qui a pris le temps d’humer le lilas ?

Parmi ceux que le virus menace

*

Derrière les vitres et autres sas

Et n’accompliraient-ils que leurs métiers ?

Parmi ceux que le virus menace

Seraient-elles différemment formées ?

*

Et n’accompliraient-ils que leurs métiers ?

Certains inventent d’autres organes…

Seraient-elles différemment formées ?

Certaines voient des poumons cabanes

*

Certains inventent d’autres organes…

Après avoir picoré leur bocal

Certaines voient des poumons cabanes

Voici le parc, derrière l’hôpital

Odile Cornuz / 15.4.20

Pantoum / 79

Sculpteriez-vous aussi de l’incertain ?

Spécialiste en biseaux de nuages…

Et dans le flou, prendriez-vous un bain ?

Rompu aux catalogues d’orages…

*

Spécialiste en biseaux de nuages…

Récolteriez-vous des perles de pluie ?

Rompu aux catalogues d’orages…

Sauriez-vous réinventer votre vie ?

*

Récolteriez-vous des perles de pluie ?

Dans le flot de quelques chansons aimées…

Sauriez-vous réinventer votre vie ?

Attentif à toutes flammes rimées…

*

Dans le flot de quelques chansons aimées…

Dessineriez-vous des visages neufs ?

Attentif à toutes flammes rimées…

Penseriez-vous à certains poumons veufs ?

*

Dessineriez-vous des visages neufs ?

Remué, ou conquis, par l’imprévu…

Penseriez-vous à certains poumons veufs ?

Prêt à assouplir votre point de vue

*

Remué, ou conquis, par l’imprévu…

Prendriez-vous la peine de rêver ?

Prêt à assouplir votre point de vue…

De quoi ne pourriez-vous pas vous priver ?

*

Prendriez-vous la peine de rêver ?

Emu dans votre rougeoyant fortin…

De quoi ne pourriez-vous pas vous priver ?

Sculpteriez-vous aussi de l’incertain ?

Odile Cornuz / 14.4.20

Pantoum / 78

Tiens un vieux monsieur qui passe
Avec son imper jaunasse
Et son galurin cocasse
Il a contourné l’impasse

Avec son imper jaunasse
Il ne manque pas d’audace
Il a contourné l’impasse
Pris d’un grand désir d’espace

Il ne manque pas d’audace
Sans se montrer trop loquace
Pris d’un grand désir d’espace
Malgré toutes les menaces

Sans se montrer trop loquace
Il ne peut rester en place
Malgré toutes les menaces
Qui va courir sur ses traces

Il ne peut rester en place
Trop enfermé il se lasse
Qui va courir sur ses traces
Les confins il les dépasse

Trop enfermé il se lasse
Hélas je rêvais hélas
Les confins il ne dépasse
Pas de vieux monsieur qui passe

Gilles F. Jobin / 14.4.20

Pantoum / 77

Quelques bouffées de découragement…

Vois : toutes complexités au galop !

Dis-moi, c’était comment, avant ?

Alors les poumons tintaient en grelots…

*

Vois : toutes complexités au galop !

L’enfant observe plutôt les fourmis

Alors les poumons tintaient en grelots…

L’humain n’aurait-il qu’un seul ennemi ?

*

L’enfant observe plutôt les fourmis

Ont-elles déjà trouvé leur chemin ?

L’humain n’aurait-il qu’un seul ennemi ?

Regarde : elles grimpent sur ta main

*

Ont-elles déjà trouvé leur chemin ?

Et nous alors ? Qu’en savons-nous de plus ?

Regarde : elles grimpent sur ta main

Tiens, ça ira mieux avec un Sugus…

*

Et nous alors ? Qu’en savons-nous de plus ?

Quelle sagesse attribuer au temps ?

Tiens, ça ira mieux avec un Sugus…

Qu’apprendrait-on de ceci d’épatant ?

*

Quelle sagesse attribuer au temps ?

Soupçons de replis identitaires !

Qu’apprendrait-on de ceci d’épatant ?

Les inégalités ? Pas à taire !

*

Soupçons de replis identitaires !

Au solide blues du confinement

Les inégalités ? Pas à taire !

Quelques bouffées de découragement…

Odile Cornuz / 13.4.20

Pantoum / 76

La Poésie peut devenir pamphlet

Mais ne tuons pas la démocratie

Puisque plus rien d’autre ne fait effet

Même si des fois on en a envie

*

Mais ne tuons pas la démocratie

Ne tirons pas toujours sur les pianistes

Même si des fois on en a envie

Ils tendent à ne pas être des clowns tristes

*

Ne tirons pas toujours sur les pianistes

Ils restent les seuls en face de nous

Ils tendent à ne pas être des clowns tristes

Ils cherchent à nous prendre pour des fous

*

Ils restent les seuls en face de nous

Les vrais tarés qui souvent vocifèrent

Ils cherchent à nous prendre pour des fous

Ils vont finir une fois par disparaitre

*

Les vrais tarés qui souvent vocifèrent

Ceux qui ont un petit pois dans la tête

Ils vont finir une fois par disparaitre

Ce jour-là nous ferons une grande fête

*

Ceux qui ont un petit pois dans la tête

Ils veulent rester indéfiniment

Ce jour-là nous ferons une grande fête

Ils peuvent rentrer chez eux maintenant

*

Ils veulent rester indéfiniment

Donald, Jaïr, Viktor sont des navets

Ils peuvent rentrer chez eux maintenant

La Poésie peut devenir pamphlet

Remy Degen / 13.4.20

Pantoum / 75

En manque d’horizon de vos visages

je suis la femme à la langue percée

orpheline de mots sève images

et surtout du sens de nos destinées

*

Je suis la femme à la langue percée

soudain muette vide de substance

et surtout du sens de nos destinées

ployant sous le fardeau de l’impuissance

*

Soudain muette vide de substance

prisonnière trop loin de la lumière

ployant sous le fardeau de l’impuissance

je me bats contre une armée de chimères

*

Prisonnière trop loin de la lumière

creusant ombre et néant avec les dents

je me bats contre une armée de chimères

j’interpelle et maudis le firmament

*

Creusant ombre et néant avec les dents

retrouvant l’eau vive dans un sourire

j’interpelle et maudis le firmament

je traque et pourfends dérives délires

*

Retrouvant l’eau vive dans un sourire

au hasard du chemin dans un message

je traque et pourfends dérives délires

en manque d’horizon de vos visages

Jo(sette) Pellet / 13.4.20

Pantoum / 74

Les insectes zonzonnent
Je marche lentement
Les abeilles bourdonnent
Dessous le firmament

Je marche lentement
Comme la souris verte
Dessous le firmament
Suçotant l’herbe verte

Comme la souris verte
Qui rêve au lendemain
Suçotant l’herbe verte
Tout en rongeant son frein

Qui rêve au lendemain
Le petit solitaire
Tout en rongeant son frein
Refusant de se taire

Le petit solitaire
Qui cherche l’âme sœur
Refusant de se taire
Sentant battre son cœur

Qui cherche l’âme sœur
A genoux sous la lune
Sentant battre son cœur
Sur les grains de la dune

A genoux sous la lune
J’espère et crie enfin
Sur les grains de la dune
Un enfant, mon dauphin

J’espère et crie enfin
Je veux que l’on me donne
Un enfant, mon dauphin
Les insectes zonzonnent

Pierre-Yves Lador / 13.4.20

Pantoum / 73

Par le monde, des corps non réclamés…

Alors que les abeilles butinent

Corps qui n’avaient plus personne à aimer

Pendant ce temps les lapins lutinent

*

Alors que les abeilles butinent

En Suisse déjà plus de mille morts

Pendant ce temps les lapins lutinent

En Méditerranée panique à bord

*

En Suisse déjà plus de mille morts

Alors que les pollens se répandent

En Méditerranée panique à bord

Pendant que les désirs se suspendent

*

Alors que les pollens se répandent

Certains dans leurs couloirs font des longueurs

Pendant que les désirs se suspendent

Des poumons s’éteignent dans la douleur

*

Certains dans leurs couloirs font des longueurs

Alors que les têtards quasi grouillent

Des poumons s’éteignent dans la douleur

Pendant ce temps les renards fripouilles

*

Alors que les têtards quasi grouillent

S’accumulent certaines rancunes

Pendant ce temps les renards fripouilles

Souffle le froid des fosses communes

*

S’accumulent certaines rancunes

Malgré ce jour qui clame sa beauté

Souffle le froid des fosses communes

Par le monde, des corps non réclamés…

Odile Cornuz / 12.4.20

Pantoum / 72

« Des fleurs de Mars ne tiens pas compte »
Ce confinement m’ensauvageonne
Des fourmis aux mastodontes
Au loin le lac déjà bourgeonne

Ce confinement m’ensauvageonne
Distance aux autres à mesurer
Au loin déjà le lac bourgeonne
Et moi je rêve sa traversée

Distance aux autres à mesurer
Prohibés contact ou serrement
Et moi je rêve sa traversée
La mélodie du pépiement

Prohibés contacts ou serrements
Avril de son fil entortille
La mélodie des pépiements
Entre les deux mon cœur vacille…

Avril de son fil entortille
Domicile en camisole
Entre les deux mon cœur vacille
Qu’augurent ces oiseaux qui s’envolent ?

Domicile en camisole
Toutes les sorties à attester
Qu’augurent ces oiseaux qui s’envolent
Ce kilomètre à rayonner

Toutes les sorties à attester
Dans le jardin libération
Ce kilomètre à rayonner
De toutes les barrières l’implosion

Dans le jardin libération
Les froufrous d’ailes se nidifient
De toutes les barrières l’implosion
Aux quatre vents je me confie

Des froufrous d’ailes se nidifient
Avril refleurit comme jamais
Aux quatre vents je me confie
Et les espoirs aux fleurs de Mai…

Sophie Grail / 12.4.20

Pantoum / 71

Je suis partie de la maison
L’enfant que je voulais être
N’a pas su briser les cloisons
N’a pas eu le temps de naître

L’enfant que je voulais être
S’est réveillé sans transition
N’a pas eu le temps de naître
Chacun souhaite la filiation

S’est réveillé sans transition
En moi les ancêtres dansent
Chacun souhaite la filiation
Maltraitance du silence

En moi les ancêtres dansent
Il ne faut pas les affamer
Maltraitance du silence
Souffrance des pires nommés

Il ne faut pas les affamer
Au soir de mes vaines lubies
Souffrance des pires nommés
Ne souhaite pas d’alibi

Au soir de mes vaines lubies
Les trublions sont courroucés
Ne souhaite pas d’alibi
A ma conduite semoncée

Les trublions sont courroucés
Las, j’ai inversé l’horizon
A ma conduite semoncée
Je suis partie de la maison

Valérie Lobsiger / 12.4.20

Pantoum / 70

Si le temps est le bien le plus précieux
Nous en sommes tous très riches en ce moment
Profitons d’admirer les lieux, les cieux,
Ecouter et vivre, entièrement

Nous en sommes tous très riches en ce moment
Que faire de ce temps à disposition?
Ecouter et vivre, entièrement
Partir en complète dissolution?

Que faire de ce temps à disposition
Partager avec tout le voisinage?
Partir en complète dissolution?
Ou plus de contact avec l’entourage?

Partager avec tout le voisinage?
Etrange réalité onirique
Ou plus de contact avec l’entourage?
Est-on dans un monde féérique?

Etrange réalité onirique
Cette nuit il était là à mes côtés
Est-on dans un monde féérique?
Lui qui voilà plus d’un an m’a quittée

Cette nuit il était à mes côtés
Ça se bagarre, bouscule à l’intérieur
Lui qui voilà plus d’un an m’a quittée
Calme et sérénité à l’extérieur

Ça se bagarre, bouscule à l’intérieur
Impression réelle d’un cercle vicieux
Calme et sérénité à l’extérieur
Si le temps est le bien le plus précieux….

Nicolette Ostrini / 12.4.20

Pantoum / 69

Un âne et une ambulance

Le premier regarde la deuxième

Je sens mon cœur qui balance

Ils testent les limites du système

*

Le premier regarde la deuxième

Dans la deuxième il y a des gens

Ils testent les limites du système

L’âne se demande combien de temps

*

Dans la deuxième il y a des gens

Ils se battent revêtus de blanc

L’âne se demande combien de temps

Les autres attendent bien en rangs

*

Ils se battent revêtus de blanc

Quatre rouges-gorges gonflent la poitrine

Les autres attendent bien en rangs

D’où sort cette mélopée divine ?

*

Quatre rouges-gorges gonflent la poitrine

La résistance niche au hasard ?

D’où sort cette mélopée divine ?

Mais c’est peut-être Balthazar…

*

La résistance niche au hasard ?

Mon âne regarde le paysage

Mais c’est peut-être Balthazar…

Paysage plein d’hommes de passage

*

Mon âne regarde le paysage

Je loue la beauté des poils gris

Paysage plein d’hommes de passage

Dans les champs un printemps sourit

*

Je loue la beauté des poils gris

Mais j’aime aussi la poésie

Dans les champs un printemps sourit

Je crois que je n’ai pas fini

*

Mais j’aime aussi la poésie

Il n’y a pas que le silence

Je crois que je n’ai pas fini

Un âne et une ambulance

Orélie Fuchs / 12.4.20

Pantoum / 68

En rêve j’organise des fêtes

J’invite des personnes inconnues

Et le matin j’ai mal à la tête

Ça doit être tout ce que j’y ai bu

*

J’invite des personnes inconnues

Malaxées, les dimensions du monde

Ça doit être tout ce que j’y ai bu

Alors que solitudes abondent

*

Malaxées, les dimensions du monde

Au réveil la présence des proches

Alors que solitudes abondent

Chacun respirant en son encoche

*

Au réveil la présence des proches

Un sourire, quelques mots échangés

Chacun respirant en son encoche

Au quotidien éloigner le danger ?

*

Un sourire, quelques mots échangés

Commencer un peu plus tard les semis ?

Au quotidien éloigner le danger ?

Prendre nouvelles auprès des amis

*

Commencer un peu plus tard les semis ?

Se résoudre à la non ubiquité

Prendre nouvelles auprès des amis

Poumons en orbite sur Voie lactée

*

Se résoudre à la non ubiquité

J’aimerais vous inviter, c’est bête

Poumons en orbite sur Voie lactée

En rêve j’organise des fêtes

Odile Cornuz / 11.4.20

Pantoum / 67

Fini de se voiler la face

l’avion des masques atterrit

mais ce n’est pas un volte-face

on ne vous a jamais menti.

*

L’avion des masques atterrit

il faut sortir bien protégé

on ne vous a jamais menti

c’est qu’il n’y en avait pas assez.

*

Il faut sortir bien protégé

et l’on ne risquera plus rien.

C’est qu’il n’y en avait pas assez

on a fait ça pour votre bien.

*

Et l’on ne risquera plus rien

promis, juré, même un foulard

on a fait ça pour votre bien

ça ira très bien, même un mouchoir.

*

Promis, juré, même un foulard

le danger guette à notre insu

Ça ira très bien, même un mouchoir

le danger n’a pas disparu.

*

Le danger guette à notre insu

Que l’inquiétude ne s’efface

le danger n’a pas disparu

Fini de se voiler la face.

Walter Rosselli / 11.4.20

Pantoum / 66

Redémarrer l’économie

Marteler ça comme un mantra

ou comme morne litanie

Veut-on vraiment juste cela ?

*

Marteler ça comme un mantra :

il faut y aller, faut s’y remettre

Veut-on vraiment juste cela ?

La contradiction règne en maître.

*

Il faut y aller, faut s’y remettre

vite, vite, faut qu’on relance.

La contradiction règne en maître

et comment tenir la distance ?

*

Vite, vite, faut qu’on relance

l’État aidera, fera un geste

Et comment tenir la distance ?

Et s’il va retourner sa veste ?

*

L’État aidera, fera un geste

Mais le danger n’est pas fini

Et s’il va retourner sa veste ?

Si c’était de l’hypocrisie ?

*

Mais le danger n’est pas fini

mettez un masque et ça ira

Si c’était de l’hypocrisie ?

Quel est le prix qu’on paiera ?

*

Mettez un masque et ça ira

Faut-il vraiment risquer sa vie ?

Quel est le prix qu’on paiera ?

Redémarrer l’économie…

Walter Rosselli / 11.4.20

Pantoum / 65

« Que fais-tu tout le jour ? » dit Valéry

« Je m’invente » : voici la réponse…

Que cela prenne la forme d’un cri ?

Possible selon les circonstances…

*

« Je m’invente » : voici la réponse…

Que j’aimerais largement partager

Possible selon les circonstances…

Et en tout temps réservoir où puiser

*

Que j’aimerais largement partager

Invite à l’écriture sans chichis

Et en tout temps réservoir où puiser

Où trouver têtes et cœurs rafraîchis

*

Invite à l’écriture sans chichis

Ode à ce quotidien sans précédent

Où trouver têtes et cœurs rafraîchis

Et rire parfois de toutes ses dents

*

Ode à ce quotidien sans précédent

Où mots et sentiments s’entrechoquent

Et rire parfois de toutes ses dents

Oubliant les poumons en breloques

*

Où mots et sentiments s’entrechoquent

Mais comment faire sens de tout cela ?

Oubliant les poumons en breloques

Penser déjà à l’après ? Halte là !

*

Mais comment faire sens de tout cela ?

Quelques réponses dans la poésie ?

Penser déjà à l’après ? Halte là !

« Que fais-tu tout le jour ? » dit Valéry

Odile Cornuz / 10.4.20

Pantoum / 64

Essayer de penser la multitude

Aloys, Philippe, Tan et Ondine

Gaïa, Oumy, Caroline et Gertrud

Lise, Bakary, Clymène et Martine

*

Aloys, Philippe, Tan et Ondine

Fatouma, Elia, Cédric, François

Lise, Bakary, Clymène et Martine

Michaël, Naomi, Botan, Benoît

*

Fatouma, Elia, Cédric, François

Joana, Linus, Ivan et Hervé

Michaël, Naomi, Botan, Benoît

Jean-Marie, Alexandre, Julie, Aimée

*

Joana, Linus, Ivan et Hervé

Antoine, Emma, Lucillien, Amandin

Jean-Marie, Alexandre, Julie, Aimée

Fai, Pierre-Isaïe, Marie, Antonin

*

Antoine, Emma, Lucillien, Amandin

Odile, Romain, Marion et Célestine

Fai, Pierre-Isaïe, Marie, Antonin

Aslan, Wanda, Antoinette et Karine

*

Odile, Romain, Marion et Célestine

Dominique, Jacques, Tian, Oneida

Aslan, Wanda, Antoinette et Karine

Lancelot, Stéphane, Anna, Paloma

*

Dominique, Jacques, Tian, Oneida

Shimara, Dany, Loïc, Michèle

Lancelot, Stéphane, Anna, Paloma

Gaspard, Henri, Ariane et Kanel

*

Shimara, Dany, Loïc, Michèle

Delphine, Eleonore et Isabelle

Gaspard, Henri, Ariane et Kanel

Pierre, Robert, Gaëlle et Anabelle

*

Delphine, Eleonore et Isabelle

Romeo, Hasan, Pascal, Sérafine

Pierre, Robert, Gaëlle et Anabelle

Corine, Tibor, Camille et Pauline

*

Romeo, Hasan, Pascal, Sérafine

Zora, Rachel, Gloria et Valeska

Corine, Tibor, Camille et Pauline

Jonas, Rolf, Marianne et Graziella

*

Zora, Rachel, Gloria et Valeska

John, Ambre, Liliane et Rosalba

Jonas, Rolf, Marianne et Graziella

Geneviève, Elian et Rébecca

*

John, Ambre, Liliane et Rosalba

Masaki, Léance, Théodore, Célien

Geneviève, Elian et Rébecca

Elyne, Luca, Zang, Pierrot, Robin

*

Masaki, Léance, Théodore, Célien

Maud, Virginia, Sekou, Li, Dahud

Elyne, Luca, Zang, Pierrot, Robin

Essayer de penser la multitude

Orélie Fuchs / 10.4.20

Pantoum / 63

Quasi obscène qu’il fasse si beau…

Le cimetière se tient en aval

Tous nous sommes sur le même bateau

Sur la planète, qui mène le bal ?

*

Le cimetière se tient en aval

Les fils d’araignée brillent dans le vent

Sur la planète qui mène le bal ?

Vite un peu d’amour, comme un paravent

*

Les fils d’araignée brillent dans le vent

Que les adieux sont rendus si furtifs !

Vite un peu d’amour, comme un paravent

Bienvenus seront tous les palliatifs

*

Que les adieux sont rendus si furtifs !

Trop peu nombreux à la cérémonie

Bienvenus seront tous les palliatifs

Comment purger du temps l’acrimonie ?

*

Trop peu nombreux à la cérémonie

A la chasse aux œufs nulle frimousse

Comment purger du temps l’acrimonie ?

Que faire pour dissiper la frousse ?

*

A la chasse aux œufs nulle frimousse

Non, pas de surdose de chocolat

Que faire pour dissiper la frousse ?

Chacune et chacun chez soi – et voilà !

*

Non, pas de surdose de chocolat

Des poumons passent en mode turbo

Chacune et chacun chez soi – et voilà !

Quasi obscène qu’il fasse si beau…

Odile Cornuz / 9.4.20

Pantoum / 62

Eh oui, au son pourri on s’habitue

On reprend la marque du fait maison

La radio diffuse, le virus tue

Les images, elles, tournent en rond

*

On reprend la marque du fait maison

Certain chef d’état aux soins intensifs

Les images, elles, tournent en rond

Sans faire de bruit, poussent tous les tifs

*

Certain chef d’état aux soins intensifs

On aimerait trouver des solutions

Sans faire de bruit, poussent tous les tifs

On a le temps d’admirer les bourgeons

*

On aimerait trouver des solutions

La science investigue tous remèdes

On a le temps d’admirer les bourgeons

Les plus démunis crient à l’aide

*

La science investigue tous remèdes

Hôpitaux et tentes de fortune

Les plus démunis crient à l’aide

Dans tous pays on cherche des thunes

*

Hôpitaux et tentes de fortune

Tourne le ballet des ambulances

Dans tous pays on cherche des thunes

Certains des poumons cessent leur danse

*

Tourne le ballet des ambulances

Chacun se replie comme une tortue

Certains des poumons cessent leur danse

Eh oui, au son pourri on s’habitue

Odile Cornuz / 8.4.20

Pantoum / 61

Le temps est-il à cran d’arrêt ?

Le vent se dispute le ciel

Nos pieds s’enfoncent dans le marais

Pensées à formes existentielles

*

Le vent se dispute le ciel

Tous en arrêt souffle coupé

Pensées à formes existentielles

Le monde a perdu sa poupée

*

Tous en arrêt souffle coupé

Richesses blotties au fond des soutes

Pensées à formes existentielles

Homme tiraillé par tant de doutes

*

Richesses blotties au fond des soutes

Oreille collée tout contre quoi ?

Homme tiraillé par tant de doutes

Tout ébranlé, sous son toit

*

Oreille collée tout contre quoi ?

Longtemps privé de son enfance

Tout ébranlé, sous son toit

S’interrogeant sur l’arrogance

*

Longtemps privé de son enfance

A qui donc faire allégeance ?

S’interrogeant sur l’arrogance

Et à l’avenir quelle tendance ?

*

A qui donc faire allégeance ?

Abhorrer les lois du mépris

Et à l’avenir quelle tendance ?

On aimerait tant être surpris

*

Abhorrer les lois du mépris

Honorer l’homme quel trajet ?

On aimerait tant être surpris

Le temps est-il à cran d’arrêt ?

Orélie Fuchs / 8.4.20

Pantoum / 60

Le troglodyte est à la mode

Enfin je ne suis plus à part

Des parts de moi se raccommodent

On dirait un nouveau départ

*

Enfin je ne suis plus à part

Anne ma sœur Anne on est deux

On dirait un nouveau départ

On ne se souciera pas d’eux

*

Anne ma sœur Anne on est deux

Les grands de ce monde s’enflamment

On ne se souciera pas d’eux

Nous sortirons nos oriflammes

*

Les grands de ce monde s’enflamment

Nous les petits sommes au front

Nous sortirons nos oriflammes

Il est temps de lever nos fronts

*

Nous les petits sommes au front

Pour mener une autre bataille

Il est temps de lever nos fronts

De reprendre le gouvernail

*

Pour mener une autre bataille

Je sais, peut-être est-ce naïf

De reprendre le gouvernail

Et dans la mort trouver du vif

*

Je sais, peut-être est-ce naïf

De croire en un monde nouveau

Et dans la mort trouver du vif

Ou dans le vif un renouveau

*

De croire en un monde nouveau

Est-ce l’illusion à son comble ?

Ou dans le vif un renouveau

Ce changement de fond en comble

*

Est-ce l’illusion à son comble ?

Ce retrait dont on s’accommode ?

Ce changement de fond en comble

Le troglodyte est à la mode

Claire Kraehenbuhl / 8.4.20

Pantoum / 59

Malgré ce chaos je rigole
Mais là, je viens de l’effacer
Pantoum du soir, la parabole
Ecrire un peu pour oublier

Mais là je viens de l’effacer
J’avais pourtant tout bien relu
Ecrire un peu pour oublier
C’est pas comme si j’en pouvais plus

J’avais pourtant tout bien relu
Les mots coulaient ils étaient libres
C’est pas comme si j’en pouvais plus
Est-ce que j’ai vraiment la fibre ?

Les mots coulaient ils étaient libres
Pas de contrainte, les vannes ouvertes
Est-ce que j’ai vraiment la fibre ?
Au moins ça m’aide à respirer !

Pas de contrainte, les vannes ouvertes
J’ai de la peine à m’arrêter
Au moins ça m’aide à respirer
Dehors la nuit est bien tombée

J’ai de la peine à m’arrêter
Fini ce jour du 7 avril
Dehors la nuit est bien tombée
Mais c’est pour quand la liberté ?

Fini ce jour du 7 avril
On a même pu un peu fêter
Mais c’est pour quand la liberté ?
Malgré ce chaos je rigole

Isabelle Rérat / 8.4.20

Pantoum / 58

Regardez, ce soir, la lune est super

Tendez le cou et cherchez la des yeux

Pour certaines, certains, la dernière

A vos jumelles, vous : les bienheureux

*

Tendez le cou et cherchez la des yeux

Faites pareil avec les souvenirs

A vos jumelles, vous : les bienheureux

Ce qui pourrait rendre le sourire

*

Faites pareil avec les souvenirs

Ah oui, c’est vrai, nous avions des projets !

Ce qui pourrait rendre le sourire

Nous fourmillions comme des farfadets !

*

Ah oui, c’est vrai, nous avions des projets !

Génération préservée des douleurs

Nous fourmillions comme des farfadets !

Spécialisés en désastre intérieur

*

Génération préservée des douleurs

Certains, certaines, s’estimaient choyés

Spécialisés en désastre intérieur

Enfants gâtés du rock’n’roll, oh yeah !

*

Certains, certaines, s’estimaient choyés

Avant ces moult cratères de poumons

Enfants gâtés du rock’n’roll, oh yeah !

Au bord du ciel nous nous époumonions…

*

Avant ces moult cratères de poumons

Ivres d’insouciances et de sphère

Au bord du ciel nous nous époumonions…

Regardez, ce soir, la lune est super

Odile Cornuz / 7.4.20

Pantoum / 57

Dans le Boléro de Ravel
Quel instrument joue en premier ?
Hautbois, basson ou violoncelle
Il faut savoir bien écouter

Quel instrument joue en premier ?
Si on n’a pas de vidéo
Il faut savoir bien écouter
De préférence en stéréo

Si on n’a pas de vidéo
On peut appeler un ami
De préférence en stéréo
Ce devoir il le fait aussi

On peut appeler un ami
Même si on est à la maison
Ce devoir il le fait aussi
Pas tout seul face à ces questions

Même si on est à la maison
Les copains ne sont pas très loin
Pas tout seul face à ces questions
En contact par tous les moyens

Les copains ne sont pas très loin
WhatsApp, Skype ou téléphone
En contact par tous les moyens
Sur ordi ou par iPhone

WhatsApp, Skype ou téléphone
Par ici toutes les bonnes nouvelles
Sur ordi ou par iPhone
Le jeu en vaut la chandelle

Par ici les bonnes nouvelles
Tous les échos sont bienvenus
Le jeu en vaut la chandelle
Dans le boléro de Ravel

Isabelle Rérat / 7.4.20

Pantoum / 56

Un milan dans les airs
Regarde bien petit
Des pissenlits par terre
La bise qui fraîchit

Regarde bien petit
Brel le disait déjà
La bise qui fraîchit
Mais qui viendrait par là

Brel le disait déjà
Entre ciel et moulin
Mais qui viendrait par là
Aujourd’hui pas certain

Entre ciel et moulin
Les forêts et les champs
Aujourd’hui pas certain
Ni homme ni du vent

Les forêts et les champs
Ça bruit ça tremble un peu
Ni homme ni du vent
On n’en croit pas ses yeux

Ça bruit ça tremble un peu
Non ce n’est pas la pluie
On n’en croit pas ses yeux
Regarde bien petit

Non ce n’est pas la pluie
Soudain l’hélicoptère
Regarde bien petit
Un milan dans les airs

Gilles F. Jobin / 7.4.20

Pantoum / 55

Ce matin un paquet dans la boîte

Morceau de joie dans la tasse printemps

Offre de ne pas se tenir coite

Bonheur de compter parmi les vivants

*

Morceau de joie dans la tasse printemps

Qui sucre un breuvage parfois amer

Bonheur de compter parmi les vivants

Faire comme si on voyait la mer

*

Qui sucre un breuvage parfois amer

Les nouvelles s’accumulent – fatras

Faire comme si on voyait la mer

Ne plus se croire faits comme des rats

*

Les nouvelles s’accumulent – fatras

Un baiser doux dissipe la douleur

Ne plus se croire faits comme des rats

Une caresse pour sécher les pleurs ?

*

Un baiser doux dissipe la douleur

Aux poumons insufflerait-il de l’air ?

Une caresse pour sécher les pleurs ?

Pour apaiser des corps la colère ?

*

Aux poumons insufflerait-il de l’air ?

Le vent fait tourner des pages non lues

Pour apaiser des corps la colère

A votre santé, tous verres non bus !

*

Le vent fait tourner des pages non lues

Je reçois mon privilège en ouate

A votre santé, tous verres non bus !

Ce matin un paquet dans la boîte

Odile Cornuz / 6.4.20

Pantoum / 54

Porter un masque, chacun le faisait ?

Qui amenait des vivres aux plus vieux ?

Entre vous, qui était testé, en fait ?

Et les malades, étaient-ils nombreux ?

*

Qui amenait des vivres aux plus vieux ?

Croyiez-vous que le monde changerait ?

Et les malades, étaient-ils nombreux ?

Et chaque jour, les morts, on les comptait ?

*

Croyiez-vous que le monde changerait ?

Le siècle alors était à ses débuts…

Et chaque jour, les morts, on les comptait ?

Aviez-vous des réflexes de tribu ?

*

Le siècle alors était à ses débuts…

Diront-ils en deux-mille-quatre-vingts

Aviez-vous des réflexes de tribu ?

A manger certains n’avaient plus de pain…

*

Diront-ils en deux-mille-quatre-vingts

Quand les enfants seront devenus vieux

A manger certains n’avaient plus de pain…

Qu’est-ce qui alors vous rendaient heureux ?

*

Quand les enfants seront devenus vieux

Les petits jeunes leurs demanderont

Qu’est-ce qui alors vous rendaient heureux ?

Et leurs grands yeux ils écarquilleront

*

Les petits jeunes leur demanderont

Sur les poumons, ça avait quels effets ?

Et leurs grands yeux ils écarquilleront

Porter un masque, chacun le faisait ?

Odile Cornuz / 5.4.20

Pantoum / 53

En un temps de plume et de plomb
Tu me lisais “Les Malfilâtres”
Roman de Catherine Colomb
Je répliquais… comme au théâtre!

Tu me lisais “Les Malfilâtres”
On riait dans le téléphone
Je répliquais… comme au théâtre!
Ça grattait, sacré gramophone…

On riait dans le téléphone
Je t’écoutais sur mon balcon
Ça grattait, sacré gramophone…
C’était trop fou ce monde abscons

Je t’écoutais sur mon balcon
La radio crachait ses nouvelles
C’était trop fou ce monde abscons
Qui donc tournait la manivelle ?

La radio crachait ses nouvelles
On entendait “Trump” ou “Les Russes”
Qui donc tournait la manivelle ?
Au temps du coronavirus

On entendait “Trump” ou “Les Russes”
On rêvait d’un avenir neuf
Au temps du coronavirus
Âpre temps du covid dix-neuf

On rêvait d’un avenir neuf
Tu me lisais “Les Malfilâtres”
Âpre temps du covid 19
Attente d’un coup de théâtre…

Tu me lisais “Les Malfilâtres”
Demain tout paraissait possible
Attente d’un coup de théâtre
Un pari fou sur l’impossible ?

Demain tout paraissait possible
Finies la misère et la guerre
Un pari fou sur l’impossible ?
Oui, tout en moi murmure:
Espère !

Denise Mützenberg / 5.4.20

Pantoum / 52

On a compris on a le trac

On se replie sous l’édredon

Le tarmac est dans le lac

Le soleil chaud troue le plafond

*

On se replie sous l’édredon

On se rapproche on se confie

Le soleil chaud troue le plafond

Et chaque jour un nouveau cri

*

On se rapproche on se confie

On pense à ce qu’on a oublié

Et chaque jour un nouveau cri

On se redécouvre liés

*

On pense à ce qu’on a oublié

Il doit bien y avoir une brèche

On se redécouvre liés

Sur la copie il, elle, on sèche

*

Il doit bien y avoir une brèche

Un endroit pour s’émanciper

Sur la copie il, elle, on sèche

Au sol un trésor enchâssé

*

Un endroit pour s’émanciper

Sous nos yeux des images se forment

Au sol un trésor enchâssé

Est-ce la vitesse qui nous déforme ?

*

Sous nos yeux des images se forment

Ce n’est plus un jeu c’est un tas

Est-ce la vitesse qui nous déforme ?

Sommes-nous faits comme des rats ?

*

Ce n’est plus un jeu c’est un tas

Tiens je me sens tout patraque

Sommes-nous faits comme des rats ?

On a compris on a le trac

Orélie Fuchs / 5.4.20

Pantoum / 51

Jusqu’à quand ? Nul encore ne le sait

On pense à Pâques, mais aussi plus loin…

La vie ne serait qu’ébauche et essai ?

A quoi ressemblera le mois de juin ?

*

On pense à Pâques, mais aussi plus loin…

Les teindras-tu tout de même, les œufs ?

A quoi ressemblera le mois de juin ?

Leçon d’humilité pour vaniteux…

*

Les teindras-tu tout de même, les œufs ?

Déposer des cadeaux à la porte

Leçon d’humilité pour vaniteux

Espérer que le monde s’en sorte

*

Déposer des cadeaux à la porte

Partager quelques signes colorés

Espérer que le monde s’en sorte

Notre humanité, pas trop essorée ?

*

Partager quelques signes colorés

Tenter encore la bienveillance

Notre humanité, pas trop essorée ?

Et que vers l’espoir les cœurs balancent

*

Tenter encore la bienveillance

Que les poumons reviennent à l’air pur

Et que l’espoir vers les cœurs balancent

Que le siècle sorte de sa cure

*

Que les poumons reviennent à l’air pur

Que les angoisses changent de couplet

Que le siècle sorte de sa cure

Jusqu’à quand ? Nul encore ne le sait

Odile Cornuz / 4.4.20

Pantoum / 50

Derrière le masque, plus que le regard
Report de notre attention sur les yeux
D’aucuns riants, d’autres sombres et hagards
Chacun tente de vivre de son mieux

Report de notre attention sur les yeux
L’esprit s’échappe et part dans tous les sens
Chacun tente de vivre de son mieux
Est-ce que tout cela aurait donc un sens?

L’esprit s’échappe et part dans tous les sens
Sudokus, mots fléchés et mots croisés
Est-ce que tout cela aurait donc un sens?
Canaliser, diriger ses pensées

Sudokus, mots fléchés et mots croisés
A l’hôpital tout s’organise, intense
Canaliser, diriger ses pensées
La charge pour les soignants est si dense

A l’hôpital tout s’organise, intense
Difficile combat contre le vent
La charge pour les soignants est si dense
Vingt-et-une heures, les applaudissements

Difficile combat contre le vent
Moments de partage et de communion
Vingt-et-une heures, les applaudissements
Voisins, voisines, tous en réunion

Moments de partage et de communion
Mais les yeux tristes de ne pas se voir
Voisins, voisines, tous en réunion
Derrière le masque, plus que le regard

Nicolette Ostrini / 4.4.20

Pantoum / 49

La rue s’étire comme un dimanche

Mais ce n’est qu’un semblant de paresse

Cette langueur s’expose, peu franche

Dans l’air qui s’est tu, circule le stress

*

Mais ce n’est qu’un semblant de paresse

Sur le Net les réunions fleurissent

Dans l’air qui s’est tu, circule le stress

A quelle liberté un tour de vis ?

*

Sur le Net les réunions fleurissent

Le temps déploie d’autres consistances

A quelles libertés un tour de vis ?

Encore un appel à la conscience

*

Le temps déploie d’autres consistances

Résister à l’invite du soleil ?

Encore un appel à la conscience

Se réjouir de futures merveilles…

*

Résister à l’invite du soleil ?

Placer certains coûts dans la balance

Se réjouir de futures merveilles

Rêver, oui, de nos prochaines danses

*

Placer certains coûts dans la balance

La mésange pépie pour les poumons

Rêver, oui, de nos prochaines danses

Inventons avec elle une chanson

*

La mésange pépie pour les poumons

Tous les cœurs – ouf – ne sont pas étanches

Inventons avec elle une chanson

La rue s’étire comme un dimanche

Odile Cornuz / 3.4.20

Pantoum / 48

Crie ! toi ! là-bas ! époumone-toi !
Sors tout ! la rage, la frustration
Décharge ! quitte à casser ton toit
Fissure les murs, libère les sons

Sors tout ! la rage, la frustration
Luminosité de demain
Fissure les murs, libère les sons
Irradie les autres de tes soins

Luminosité de demain
Empoigne un cassotton, fracasse
Irradie les autres, de tes soins
Abîme uniquement une masse

Empoigne un cassotton, fracasse
Tes non-dits, ces cloisons internes
Abîme uniquement une masse
La foule de refoulements ternes

Tes non-dits, ces cloisons internes
Éclaffe-les ! fais grève générale
La foule de refoulements ternes
Tu brilleras en débris d’âmes

Éclaffe-les ! fais grève générale
Gravis la montagne de tes doutes
Tu brilleras en débris d’âmes
Gaffe-toi ! affronte-les sans déroute

Gravis la montagne de tes doutes
Gueule-les au ciel ! recueil d’appels
Gaffe-toi ! affronte-les sans déroute
Vois où les portent les hirondelles

Gueule-les au ciel ! recueil d’appels
Recommence, s’il le faut, aime-toi !
Vois où les portent les hirondelles
Crie ! toi ! là-bas ! époumone-toi !

Alexandre Wälti / 3.4.20

(presque) Pantoum / 47

ton paon

monta

mon taon

tua

*

monta

un mât

tua

puma

*

un mât

à Pat

puma

à Nat

*

à Pat

pâton

à Nat

tampon

*

pâton

au pot

tampon

au mot

*

au pot

mon taon

au mot

ton paon

Gilles F. Jobin / 3.4.20

Pantoum / 46

Ceux qui le niaient ont ouvert les yeux

Tactique de l’autruche ? Démodée !

Le virus éclate sous tous les cieux

Pour le genre humain, oui, ça va barder…

*

Tactique de l’autruche ? Démodée !

C’est de nos vies qu’il s’agit avant tout

Pour le genre humain, oui, ça va barder…

Ensemble cherchons de l’espoir, partout !

*

C’est de nos vies qu’il s’agit avant tout

Dépouillons les illusions de grandeur

Ensemble cherchons de l’espoir, partout !

Humons, cueillons peut-être quelques fleurs

*

Dépouillons les illusions de grandeur

Et vous, comment traversez-vous le temps ?

Humons, cueillons peut-être quelques fleurs

Pensons, aimons, toujours et vaillamment

*

Et vous, comment traversez-vous le temps ?

Je me sens poussière sur la brise

Pensons, aimons, toujours et vaillamment

Et sur le réel si peu de prise

*

Je me sens poussière sur la brise

Nos poumons seraient-ils hypnotisés ?

Et sur le réel si peu de prise

Nos vieux codes seraient-ils tous usés ?

*

Nos poumons seraient-ils hypnotisés ?

Comment rassurer des enfants anxieux ?

Nos vieux codes seraient-ils tous usés ?

Ceux qui le niaient ont ouvert les yeux

Odile Cornuz / 2.4.20

Pantoum / 45

Qui ne s’est pas senti tout étourdi

Après une course poursuite débridée

Sidéré, vidé et alors conquis

Affaibli, hébété, rêves dominés

*

Après une course poursuite débridée

J’aurais tant aimé trouver une bouche

Affaibli, hébété, rêves dominés

Un langage neuf, liberté d’oiseau-mouche

*

J’aurais tant aimé trouver une bouche

Je l’aurais regardée, embrassée

Un langage neuf, liberté d’oiseau-mouche

J’aurais su la dessiner la partager

*

Je l’aurais regardée, embrassée

Roulée dans un parterre de fleurs

J’aurais su la dessiner la partager

Touché qui sait par un peu de bonheur

*

Roulée dans un parterre de fleurs

La respiration accordée au vent

Touché qui sait par un peu de bonheur

Mon intimité pleine de rêves d’enfant

*

La respiration accordée au vent

Cœur, poitrine, jambes et yeux ouverts

Mon intimité pleine de rêves d’enfant

Heures pacifiées par une commune galère

*

Cœur, poitrine, jambes et yeux ouverts

La ville en suspension, corps souverains

Heures pacifiées par une commune galère

Le temps est mutin, les matins humains

*

La ville en suspension, corps souverains

Dans la tourmente les compteurs affaiblis

Le temps est mutin, les matins humains

Qui ne s’est pas senti tout étourdi

Orélie Fuchs / 2.4.20

Pantoum / 44

L’intrus viral n’a rien d’interlope

Pensons-y en allumant des bougies

En sont morts trois enfants de l’Europe

Contre lui secouons nos énergies

*

Pensons-y en allumant des bougies

Trouvons du réconfort à l’intérieur

Contre lui secouons nos énergies

Peignons le présent de toutes couleurs

*

Trouvons du réconfort à l’intérieur

Observons le renouveau des pousses

Peignons le présent de toutes couleurs

Ré-enchantons ce monde qui tousse

*

Observons le renouveau des pousses

Pour s’absorber dans de l’inactuel

Ré-enchantons ce monde qui tousse

Et que cessent les vieilles querelles

*

Pour s’absorber dans de l’inactuel

De l’humain en somme, sans conditions

Et que cessent les vieilles querelles

Ouvrons de même poumons et prisons

*

De l’humain en somme, sans conditions

Ne lâchons rien de ce qui fait vibrer

Ouvrons de même poumons et prisons

Préparons-nous, ma foi, dans la durée

*

Ne lâchons rien de ce qui fait vibrer

Sautons toutes dans l’inconnu – et hop !

Préparons-nous, ma foi, dans la durée

L’intrus viral n’a rien d’interlope

Odile Cornuz / 1.4.20

Pantoum / 43

Pourquoi avoir peur de nos ombres ?

Pourquoi nous suivent-elles sans voir ?

Pourquoi rester seul dans nos chambres ?

Pourquoi ne pas choisir l’espoir ?

*

Pourquoi nous suivent-elles sans voir ?

D’où nous viennent nos vraies phobies

Pourquoi ne pas choisir l’espoir ?

Où se créent toutes nos envies ?

*

D’où nous viennent nos vraies phobies

Qui sait ce que demain sera ?

Où se créent toutes nos envies ?

Comment tout cela finira ?

*

Qui sait ce que demain sera ?

Pourquoi d’ailleurs vouloir savoir ?

Comment tout cela finira ?

Aurions-nous perdu le pouvoir ?

*

Pourquoi d’ailleurs vouloir savoir ?

Peut-on chasser toutes les pluies ?

Aurions-nous perdu le pouvoir ?

Pourquoi ne pas aimer la vie ?

*

Peut-on chasser toutes les pluies ?

Nos peurs vont nous gâcher nos pleurs ?

Pourquoi ne pas aimer la vie ?

Comment retrouver l’âme sœur ?

*

Nos peurs vont nous gâcher nos pleurs ?

Allons-nous tous vraiment survivre ?

Comment retrouver l’âme sœur ?

La liberté peut-elle nous suivre ?

*

Allons-nous tous vraiment survivre ?

Pourquoi tout devient-il si sombre ?

La liberté peut-elle nous suivre ?

Pourquoi avoir peur de nos ombres ?

Remy Degen / 1.4.20

Pantoum / 42

Planète anesthésiée, le calme s’est échu

Tant de biens superflus, folle fuite en avant

L’oiseau s’est pris le temps, son vol s’est suspendu

Edens artificiels, que de moulins à vent

*

Tant de biens superflus, folle fuite en avant

Impalpable tourment, filandreuse anxiété

Edens artificiels, que de moulins à vent

Insidieuse toile, remugles enfiévrés

*

Impalpable tourment, filandreuse anxiété

Croissance, absurde opium, niaise pensée unique

Insidieuse toile, remugles enfiévrés

Trépas solitaires, requêtes théurgiques

*

Croissance, absurde opium, niaise pensée unique

Nature maltraitée, martyr des doigts crochus

Trépas solitaires, requêtes théurgiques

Planète anesthésiée, le calme s’est échu

Bruno Baschung / 1.4.20

Pantoum / 41

Qui demain inventera des blagues ?

Quels seront les dindons de la farce ?

Les poumons souffriront-ils de jetlag ?

Ce virus aura donc des comparses ?

*

Quels seront les dindons de la farce ?

Oui, le rire c’est bon pour la santé

Ce virus aura donc des comparses ?

Un clown triste l’a dit à la télé

*

Oui, le rire c’est bon pour la santé

On s’invente un fitness de cuisine

Un clown triste l’a dit à la télé

Certains responsables se débinent

*

On s’invente un fitness de cuisine

Les fleurs éclosent comme du popcorn

Certains responsables se débinent

Seraient tentés par le revenge porn

*

Les fleurs éclosent comme du popcorn

Chacun chez soi, mode troglodytes

Seraient tentés par le revenge porn

Ils ne perdent pas leur sang-froid, dites !

*

Chacun chez soi, mode troglodytes

Certains Boris et Donald en vrille !

Ils ne perdent pas leur sang-froid, dites !

Comme ils déroulent toutes conneries…

*

Certains Boris et Donald en vrille !

Quelle vague ? Où ça une vague ?

Comme ils déroulent toutes conneries…

Qui demain inventera des blagues ?

Odile Cornuz / 31.3.20

Pantoum / 40

Elles sont si belles les primevères

et les anémones, les hépatiques

et les tussilages dans les jachères

et toutes ces violettes – magnifiques

*

Et les anémones, les hépatiques

les replats ombragés à corydale

et toutes ces violettes – magnifiques

et les prés asséchés à polygale

*

Les replats ombragés à corydale

un autre printemps reviendra, au moins

et les prés asséchés à polygale

nous vous longerons la main dans la main

*

Un autre printemps reviendra, au moins

vous allez refleurir dans une année

nous vous longerons la main dans la main

les prés aux primevères élevées

*

Vous allez refleurir dans une année

pervenche, narcisse, scille, sylvie

les prés aux primevères élevées

messagères du retour de la vie

*

Pervenche, narcisse, scille, sylvie

hépatique, pulsatille et ficaire

messagères du retour de la vie

elles sont si belles les primevères

Walter Rosselli / 31.3.20

Pantoum / 39

L’été se profile sans examens

Trotte sur le cadran la trotteuse

Tout le genre humain se lave les mains

Les heures se ressemblent, taiseuses

*

Trotte sur le cadran la trotteuse

Face à face, on pique un tel fou rire

Les heures se ressemblent, taiseuses

On n’est pas des statues de cire

*

Face à face, on pique un tel fou rire

A cause d’une miette au bout d’un doigt

On n’est pas des statues de cire

De cela aussi on s’en souviendra

*

A cause d’une miette au bout d’un doigt

Même la radio a cru s’étouffer

De cela aussi on s’en souviendra

Quand on prendra l’air à grandes bouffées

*

Même la radio a cru s’étouffer

Juste après le compte des morts du jour

Quand on prendra l’air à grandes bouffées

Avec une foule de gens autour

*

Juste après le compte des morts du jour

On a dessiné des poumons encor

Avec une foule de gens autour

Armons donc de courage tous les corps

*

On a dessiné des poumons encor

Voyez les, là, ils sont libres et sains

Armons de courage tous les corps

L’été se profile sans examens

Odile Cornuz / 30.3.20

Pantoum / 38

Hier j’ai pris congé, c’était dimanche
Fermé la télé, bouclé la radio
Du balai même pas touché le manche
Personne n’est venu dîner, c’est idiot

Fermé la télé, bouclé la radio
Passé beaucoup de temps à mes fourneaux
Personne n’est venu dîner, c’est idiot
Fait un repas même pas d’un bon niveau

Passé beaucoup de temps à mes fourneaux
De mon balcon saluer ma voisine
Fait un repas même pas d’un bon niveau
Toujours un gentil mot, une belle mine

De mon balcon saluer ma voisine
Prendre l’air, écouter le silence
Toujours un gentil mot, une belle mine
Seuls des oiseaux légers, un air dense

Prendre l’air, écouter le silence
Silence lourd, chargé d’un sacré poids
Seuls des oiseaux légers, un air dense
S’évader dans un polar suédois

Silence lourd, chargé d’un sacré poids
Plein de pensées pour ceux qui cherchent l’air
S’évader dans un polar suédois
Mon grand espace ressemble à un désert

Plein de pensées pour ceux qui cherchent l’air
Demain on retroussera nos manches
Mon grand espace ressemble à un désert
Hier j’ai pris congé, c’était dimanche

Nicolette Ostrini / 30.3.20

Pantoum / 37

Bulan purnama sinari bumi
Pasang naik, surutnya laut
Kaya sapuannya bidadari?
Dunia kita diancam maut

Pasang naik, pasang surutnya laut
Angin meniup dari timur,
Dunia kita diancam maut,
Pulau kecil ini menganjur

Angin meniup dari timur
Seekor penyu merapat
Pulau kecil ini menganjur
Malam, kulitnya berkilat

Seekor penyu merapat
Dari jauh Beliau datang
Malam, kulitnya berkilat
Tiap tahun Dia pulang

Dari jauh Beliau datang
Lawan arus dan ombak
Tiap tahun Dia pulang
Di pantai kecil Dia naik

Lawan arus dan ombak
Jalan zigzag antara sampah,
Di pantai kecil Dia naik,
Terkandas seperti wabah

Jalan zigzag antara sampah
Sang penyu gali lobang,
Terkandas seperti wabah
Banyak plastik menghalang

Sang penyu gali lobang
Pakai sayap untuk pangkur,
Banyak plastik menghalang,
Gali, gali dan bertelur

Gali, gali dan bertelur
Di pasir, ada yang jaga,
Pakai sayap untuk pangkur,
Burung, tapi kucing juga

Di pasir, ada yang jaga
Seperti hama, siap hancur
Burung, tapi kucing juga
Yang keluar dari telur

Seperti hama, siap hancur,
Si kucing menjadi kuman,
Yang keluar dari telur,
Dibawa manusia, bukan?

Si kucing menjadi kuman,
Ke laut Sang penyu kembali,
Dibawa manusia, bukan?
Dari bahaya coba menjauhi

Ke laut Sang penyu kembali,
Beliau turun, meluncur
Dari bahaya coba menjauhi
Laut Banda menjadi kubur?

Beliau turun, meluncur
Cium buih, masuk air
Laut Banda menjadi kubur?
Permukaan laut mengukir

Cium buih, masuk air
Berenang, terbang, pergi
Permukaan laut mengukir,
Bulan purnama sinari bumi

Loïc Degen / 30.3.20

Pantoum / 36

der kirschbaum blüht aus vollem hals

die biene hat heut ziemlich kalt

die fahrt sie bleibt ein traum nach mals

nicht aus dem haus ich bin zu alt

*

die biene hat heut ziemlich kalt

coronavirus vor der tür

nicht aus dem haus ich bin zu alt

ich frag mich was kann ich dafür

*

coronavirus vor der tür

ich schliesse mich zuhause ein

ich frag mich was kann ich dafür

und schenke mir den wein allein

*

ich schliesse mich zuhause ein

ich bin schon lange nicht mehr froh

und schenke mir den wein allein

ich kann nicht mal mehr in den zoo

*

ich bin schon lange nicht mehr froh

das zelt ist gross vom zirkus knie

ich kann nicht mal mehr in den zoo

so deprimiert war ich noch nie

*

das zelt ist gross vom zirkus knie

der mensch tagtäglich trinkt kultur

so deprimiert war ich noch nie

wer dreht an meiner lebensuhr

*

der mensch tagtäglich trinkt kultur

die fahrt sie bleibt ein traum nach mals

wer dreht an meiner lebensuhr

der kirschbaum blüht aus vollem hals

Gerold Ehrsam / 30.3.20

Pantoum / 35

Au salon l’enfant joue aux dominos

Des giboulées nous glaceront ce soir

Certaines musclent leurs abdominaux

S’accrochent aux paupières les espoirs

*

Des giboulées nous glaceront ce soir

Combien de temps tout ceci durera ?

S’accrochent aux paupières les espoirs

J’aimerais te serrer entre mes bras

*

Combien de temps tout ceci durera ?

Quels maux encore allons-nous découvrir ?

J’aimerais te serrer entre mes bras

De caresses, de baisers te couvrir

*

Quels maux encore allons-nous découvrir ?

Inventer plutôt une langue à soi

De caresses, de baisers te couvrir

Sans penser que c’est la dernière fois

*

Inventer plutôt une langue à soi

Charmer les poumons comme des serpents

Sans penser que c’est la dernière fois

Faire partout tourbillonner le vent

*

Charmer les poumons comme des serpents

Soutenir en pensées ceux qui soignent

Faire partout tourbillonner le vent

Et zou ! Que le cauchemar s’éloigne

*

Soutenir en pensées ceux qui soignent

Rester chez soi : encore ce motto

Et zou ! Que le cauchemar s’éloigne

Au salon l’enfant joue aux dominos

Odile Cornuz / 29.3.20

Pantoum / 34

Mais à quoi donc sert la forme ?

A pouvoir dire l’expérience ?

Venir à bout d’un vide énorme ?

Et y nommer chaque nuance ?

*

A pouvoir dire l’expérience ?

Où s’arrête l’honnêteté ?

Et y nommer chaque nuance ?

Dans mes cellules calfeutrées ?

*

Où s’arrête l’honnêteté ?

Quand les larmes s’avancent pour dire

Dans mes cellules calfeutrées ?

Parlez plus fort : on doit s’enfuir

*

Quand les larmes s’avancent pour dire

Que nous apporte une rencontre ?

Parlez plus fort : on doit s’enfuir

De quoi va-t-elle à l’encontre ?

*

Que nous apporte une rencontre ?

Dans tout le corps un mégaphone

De quoi va-t-elle à l’encontre ?

Mon système vocal est aphone

*

Dans tout le corps un mégaphone

Contradictions mystérieuses

Mon système vocal est aphone

Quelques minutes malicieuses

*

Contradictions mystérieuses

Est-ce pour oublier la mort ?

Quelques minutes malicieuses

On avait envie d’être dehors

*

Est-ce pour oublier la mort ?

A quand des histoires hors normes ?

On avait envie d’être dehors

Mais à quoi donc sert la forme ?

Orélie Fuchs / 29.3.20

Pantoum / 33

Mais que fait Paul ? Où est Lola ?
Elisa me répondra-t-elle ?
Martin vivrait en Angola
Où sont Malika et Adèle ?

Elisa me répondra-t-elle ?
Pas de fièvre m’écrit Lili
Où sont Malika et Adèle ?
Personne n’a revu Ali

Pas de fièvre m’écrit Lili
As-tu des nouvelles de Sam ?
Personne n’a revu Ali
Que font Léa, Tommy et Liam ?

As-tu des nouvelles de Sam ?
Emilie a travaillé hier
Que font Léa, Tommy et Liam
Emilie qui est infirmière

Emilie a travaillé hier
Que vivent Luka et Benoît
Emilie qui est infirmière
Deux jours Marc est resté sans voix

Que vivent Luka et Benoît
Et toi et toi comment ça va ?
Deux jours Marc est resté sans voix
Mais où est Paul ? Que fait Lola ?

Gilles Jobin / 29.3.20

Pantoum / 32

Soixante cinq ans depuis quelques mois
Des gens à risque, moi j’en fais partie
Sans certitudes j’observe pantois
Les dégâts des boules aux crochets serties

Des gens à risque, moi j’en fais partie
Le souffle court je voudrais l’éviter
Les dégâts des boules aux crochets serties
Esquiver leur morbide avidité

Le souffle court je voudrais l’éviter
A deux s’évader et fuir le quartier
Esquiver leur morbide avidité
Te prendre par la main par un sentier

A deux s’évader et fuir le quartier
Enjamber l’herbe saupoudrée de givre
Te prendre par la main par un sentier
Percer la brume pour se sentir vivre

Enjamber l’herbe saupoudrée de givre
Fauve galbe évanescent d’un chevreuil
Percer la brume pour se sentir vivre
S’émerveiller de l’envol d’un bouvreuil

Fauve galbe évanescent d’un chevreuil
Avec toi fuir les sinistres rumeurs
S’émerveiller de l’envol d’un bouvreuil
Se dérober un instant à la peur

Avec toi fuir les sinistres rumeurs
D’un sapin mâchouiller l’âpre bourgeon
Se dérober un instant à la peur
Saisir les bouquets dans mes vieux poumons

D’un sapin mâchouiller l’âpre bourgeon
De ces saveurs, vaporeuses effluences
Saisir les bouquets dans mes vieux poumons
Retarder les malsaines turbulences

De ces saveurs, vaporeuses  effluences
Percevoir la vigueur de la nature
Retarder les malsaines turbulences
Non au mauvais génie sa signature

Percevoir la vigueur de la nature
Puiser sa force dans son lopin
Non au mauvais génie sa signature
Décrocher ses fétides lambrequins

Bruno Baschung / 29.3.20

Pantoum / 31

Printemps pandémique, printemps mousquetaire
L’invasion, l’angoisse, comment conjurer
L’horloge est ternie et chacun se terre
Caverne ou palais – chez soi demeurer

L’invasion, l’angoisse, comment conjurer
Le soir aux balcons, regard aux voisins
Caverne ou palais – chez soi demeurer
Fermer restaurants, fermer magasins

Le soir aux balcons, regard aux voisins
On applaudira les gestes poignants
Fermer restaurants, fermer magasins
Quand rien ne remplace les soins des soignants

On applaudira les gestes poignants
On patiente, on lit, de New York à Naples
Quand rien ne remplace les soins des soignants
On nourrit la toile, de Bonn à Pompaples…

Patrice Duret / 29.3.20

Pantoum / 30

Aujourd’hui les saules pleurent de vert

S’instaurent du neuf et de l’inédit

Fleurissent diverses primevères

Tout ira bien, ma voisine le dit

*

S’instaurent du neuf et de l’inédit

Je détaille la plume d’un cygne

Tout ira bien, ma voisine le dit

Nous voici, traquant le moindre signe

*

Je détaille la plume d’un cygne

Les bus roulent tous comme un dimanche

Nous voici, traquant le moindre signe

Les pinsons pépient sur les branches

*

Les bus roulent tous comme un dimanche

Que dirais-tu de jouer à ce jeu ?

Les pinsons pépient sur les branches

De cette crise quels sont les enjeux ?

*

Que dirais-tu de jouer à ce jeu ?

Qui serait de dire ni oui ni non

De cette crise quels sont les enjeux ?

Envahir de soleil tous les poumons

*

Qui serait de dire ni oui ni non

De garder l’essentiel au ralenti

Envahir de soleil tous les poumons

Inventer d’autres formes pour la vie

*

De garder l’essentiel au ralenti

Et par tous les temps yeux et cœur ouverts

Inventer d’autres formes pour la vie

Aujourd’hui les saules pleurent de vert

Odile Cornuz / 28.3.20

Pantoum / 29

Au magasin, une danse étrange

Nulle farine, plus de levure

On se concentre : qu’est-ce qu’on mange ?

Certains envisagent la biture

*

Nulle farine, plus de levure

Dans l’après-midi le ciel s’est voilé

Certains envisagent la biture

Un whisky coca sur glace pilée

*

Dans l’après-midi le ciel s’est voilé

On dépasse en Suisse les deux cents morts

Un whisky coca sur glace pilée

Y trouverait-on du goût encore ?

*

On dépasse en Suisse les deux cents morts

Jamais livreurs n’étaient si courtisés

Y trouverait-on du goût encore ?

Ces tonnes de denrées, là, empilées

*

Jamais livreurs n’étaient si courtisés

Qui fera donc les récoltes aux champs ?

Ces tonnes de denrées, là, empilées

Pour certains poumons : dépôt de bilan

*

Qui fera donc les récoltes aux champs ?

Voir ce monde ployer n’est pas drôle

Pour certains poumons : dépôt de bilan

Faudra redistribuer les rôles…

*

Voir ce monde ployer n’est pas drôle

Hé ! Le voici bleu comme une orange

Faudra redistribuer les rôles…

Au magasin une danse étrange

Odile Cornuz / 27.3.20

Pantoum / 28

Dans un moulin mes pensées me tourmentent

Dans le chariot à commissions je pleure

Dans mon jardin quelques fruits fermentent

Dans ton corps je connais toutes les fleurs

*

Dans le chariot à commissions je pleure

Je l’entends le chant des oiseaux nains

Dans ton corps je connais toutes les fleurs

Je les entends les cris des petites mains

*

Je l’entends le chant des oiseaux nains

Je pense à toutes les fois où j’ai vécu

Je les entends les cris des petites mains

Tous les bonheurs souriants, imprévus

*

Je pense à toutes les fois où j’ai vécu

Enfants pour qui un parent disparaît

Tous les bonheurs souriants, imprévus

Petites mains que je reconnais

*

Enfants pour qui un parent disparaît

Même s’ils sauront parler aux grenouilles

Petites mains que je reconnais

Dans les nuages toujours leurs yeux fouillent

*

Même s’ils sauront parler aux grenouilles

Tu as deux ans j’envie ta légèreté

Dans les nuages toujours leurs yeux fouillent

Te dire plus tard qu’personne ne l’a sauvé

*

Tu as deux ans j’admire ta légèreté

Sur mon chariot je suis mise à mort

Te dire plus tard qu’personne ne l’a sauvé

Dans tes yeux pourtant c’est fou c’est si fort

*

Sur mon chariot je suis mise à mort

Certains jours je trouve en guise d’obstacle

Dans tes yeux pourtant c’est fou c’est si fort

Ma tête embrouillée mise dans un grand sac

*

Certains jours je trouve en guise d’obstacle

Minutes qui passent minutes qui mentent

Ma tête embrouillée mise dans un grand sac

Dans un moulin mes pensées me tourmentent

Orélie Fuchs / 27.3.20

Pantoum / 27

Laissons voler les oiseaux tout là-haut

Laissons la nature reprendre ses droits

Considérons nos limites et nos défauts

De toute façon avons-nous le choix ?

*

Laissons la nature reprendre ses droits

Face à nous : une grande remise à l’ordre

De toute façon avons-nous le choix

Devant cette bouche prête à nous mordre ?

*

Face à nous : une grande remise à l’ordre

Avons-nous ainsi trouvé nos maîtres ?

Devant cette bouche prête à nous mordre,

Changeons les règles pour un futur bien-être

*

Avons-nous ainsi trouvé nos maîtres ?

Le monde agonisant crie sa détresse

Changeons les règles pour un futur bien-être

Richesses riment désormais avec bassesse

*

Le monde agonisant crie sa détresse

Pollution, dégradations, misère humaine,

Richesses riment désormais avec bassesse

Quête folle signifie quête vaine

*

Pollution, dégradations, misère humaine

Rendons à Mère Nature ce qui est dû

Quête folle signifie quête vaine

Retournons à l’essentiel, sans abus

*

Rendons à Mère Nature ce qui est dû

Que coule à nouveau l’or pur des ruisseaux

Retournons à l’essentiel sans abus

Laissons voler les oiseaux tout là-haut

Manuela Gay-Crosier / 27.3.20

Pantoum / 26

Faire comme si ça n’existait pas

La tête ailleurs – haut vers les étoiles

Déguster un amour neuf – le voilà

Large comme au cinéma la toile

*

La tête ailleurs – haut vers les étoiles

Pourtant au compteur les morts défilent

Large comme au cinéma la toile

Concilier les mondes ? Pas facile

*

Pourtant au compteur les morts défilent

Elle enfle, l’angoisse planétaire

Concilier les mondes ? Pas facile

Tandis que chacun chez soi se terre

*

Elle enfle, l’angoisse planétaire

Et le grèbe s’en fout, lui : il plonge

Tandis que chacun chez soi se terre

S’échappe peut-être par les songes

*

Et le grèbe s’en fout, lui : il plonge

A l’air des poumons s’accrochent : reste !

S’échappe peut-être par les songes

Oui, notre siècle connaît sa peste

*

A l’air des poumons s’accrochent : reste !

Certains hackers prennent ça pour un jeu

Oui, notre siècle connaît sa peste

Ici et là, pourrait-on être heureux ?

*

Certains hackers prennent ça pour un jeu

On avancerait ainsi, pas à pas ?

Ici et là, pourrait-on être heureux ?

Faire comme si ça n’existait pas

Odile Cornuz / 26.3.20

Pantoum / 25

Le vent vient de se présenter
Il choisit toutes les senteurs
Les miasmes vont se disperser
Mais il nous apporte la peur

Il choisit toutes les senteurs
Du sable et plein de soleil
Mais il nous apporte la peur
Nous ne serons jamais pareils

Du sable et plein de soleil
Tout a changé dès aujourd’hui
Nous ne serons jamais pareils
Pourquoi avoir peur de la nuit

Tout a changé dès aujourd’hui
Notre beau ciel a disparu
Pourquoi avoir peur de la nuit
Même si la mort s’est montrée nue

Notre beau ciel a disparu
Mais l’espoir restera un miroir
Même si la mort s’est montrée nue
Demain, elle ne sera plus noire

Mais l’espoir restera un miroir
Chacun de nous aura sa chance
Demain, elle ne sera plus noire
Et nous finirons par des danses

Chacun de nous aura sa chance
Les miasmes vont se disperser
Et nous finirons par des danses
Le vent vient de se présenter

Remy Degen / 26.3.20

Pantoum / 24

enfermé dans sa cabane

la porte bien fermée à clé

au loin passe la caravane

transport de moult sacs de blé

*

la porte bien fermée à clé

va pense c’est un grand défi

transport de moult sacs de blé

si seulement j’avais mon képi

*

va pense c’est un grand défi

je n’ veux pas être en retard

si seulement j’avais mon képi

et puis où trouver du bon lard

*

je n’veux pas être en retard

on entend déjà le hibou

et puis où trouver du bon lard

je mange rarement du chou

*

on entend déjà le hibou

il chasse même le pervers

je mange rarement du chou

qui préfère à la prose le vers

*

il chasse même le pervers

regarde l’heure il est tard

qui préfère à la prose le vers

il n’est pas dupe le renard

*

regarde l’heure il est tard

au loin passe la caravane

il n’est pas dupe le renard

enfermé dans sa cabane

Gerold Ehrsam / 26.3.20

Pantoum / 23

On aimerait tant se revoir

pouvoir se prendre dans les bras

se toucher s’embrasser, se voir

mais désormais on ne peut pas.

*

Pouvoir se prendre dans les bras

se parler entre quatre yeux

mais désormais on ne peut pas

ça va rester un ardent vœu.

*

Se parler entre quatre yeux

se dire bonjour ou salut

ça va rester un ardent vœu

mais désormais on ne peut plus.

*

Se dire bonjour ou salut

ou juste se dire au revoir

mais désormais on ne peut plus

il faut tout miser sur l’espoir

*

ou juste se dire au revoir.

Une coutume devient vœu

il faut tout miser sur l’espoir

pourvu qu’il n’y ait pas d’adieu.

*

Une coutume devient vœu

besoin, envie et même salut

pourvu qu’il n’y ait pas d’adieu

dans cette vie de reclus.

*

Besoin, envie et même salut

faim de vie et faim d’espoir.

Dans cette vie de reclus

on aimerait tant se revoir.

Walter Rosselli / 26.3.20

Pantoum / 22

Sur l’agenda papier tout est tracé

Festivités et rendez-vous – holà

D’autres listes sont alors griffonnées

Dispositions anticipées : voilà

*

Festivités et rendez-vous – holà

Que se passera-t-il après ma mort ?

Dispositions anticipées : voilà

Et vous, que feriez-vous de votre corps ?

*

Que se passera-t-il après ma mort ?

Les cerisiers seront bientôt en fleurs

Et vous, que feriez-vous de votre corps ?

Comment faudrait-il retenir les pleurs ?

*

Les cerisiers seront bientôt en fleurs

L’enfant résout un problème de maths

Comment faudrait-il retenir les pleurs ?

Eh quoi ! Ce serait donc échec et mat ?

*

L’enfant résout un problème de maths

Aplatir des courbes, bon sang, c’est dur !

Eh quoi ! Ce serait donc échec et mat ?

L’air des poumons de mon rêve était pur

*

Aplatir des courbes, bon sang, c’est dur !

Que pullulent les messages d’espoir !

L’air des poumons de mon rêve était pur

Remuez vos idées et vos tiroirs !

*

Que pullulent les messages d’espoir !

Courage à ceux qui doivent nous soigner

Remuez vos idées et vos tiroirs !

Sur l’agenda papier tout est tracé

Odile Cornuz / 25.3.20

Pantoum/ 21

Le mur de la cuisine est recouvert

J’ai craqué il y’a des dessins partout

Et nos enfants n’en ont pas trop souffert

Ils ont ajouté des tracés papous

*

J’ai craqué il y’a des dessins partout

Même sur la commode en acajou

Ils ont ajouté des tracés papous

Et leur papa invente un haïku

*

Même sur la commode en acajou

Heureusement qu’on l’a notre bazou !

Et leur papa invente un haïku

Son français est canadien du Poitou

*

Heureusement qu’on l’a notre bazou !

Et là on a un sacré bon atout

Son français est canadien du Poitou

On invente une langue, on est zoulous

*

Et là on a un sacré bon atout

On peine à oublier qu’y’en a qu’ont la toux

On invente une langue, on est zoulous

Y’a pas d’frontières c’est l’infini bagout

*

On peine à oublier qu’y’en a qu’ont la toux

On est pris mais là c’est ouvert : verrou?

Y’a pas d’frontières c’est l’infini bagout

On devrait peut-être creuser un grand trou

*

On est pris mais là c’est ouvert : verrou?

Un trou pour voir le cœur de la terre

On devrait peut-être creuser un grand trou

Le mur de la cuisine est recouvert

Orélie Fuchs/ 25.3.20

Pantoum / 20

Boire l’apéro comme si de rien n’était
Pas de souci la cave est bien fournie
On peut tenir sans doute jusqu’à l’été
Mais que faire de cette nouvelle vie

Pas de souci la cave est bien fournie
Ecouter des polyphonies corses
Mais que faire de cette nouvelle vie
Cette musique me remplit le torse

Ecouter des polyphonies corses
En faisant marcher le balai brosse
Cette musique me remplit le torse
Frotter briquer éloigne les féroces

En faisant marcher le balai brosse
Soleil couchant état d’âme en attente
Frotter briquer éloigne les féroces
Merle chantant contraste de détente

Soleil couchant état d’âme en attente
Un signe un geste pour aller vers l’espoir
Merle chantant contraste de détente
Un verre à distance pour sortir du noir

Un signe un geste pour aller vers l’espoir
Des tâches pour ne pas réfléchir penser
Un verre à distance pour sortir du noir
Tout faire pour tenter de s’échapper

Des tâches pour ne pas réfléchir penser
Plonger dans la musique et écouter
Tout faire pour tenter de s’échapper
Boire l’apéro comme si de rien n’était

Nicolette Ostrini / 25.3.20

Pantoum / 19

On a vu la première hirondelle

Des bébés naissent à domicile

Sur les balcons tournent les crécelles

Chez eux les vieux ne bougent pas un cil

*

Des bébés naissent à domicile

Cours en tous genres sont à distance

Chez eux les vieux ne bougent pas un cil

Il faut sortir chercher sa pitance

*

Cours en tous genres sont à distance

Cela me manque de n’embrasser plus

Il faut sortir chercher sa pitance

Certains poumons n’en sont pas revenus

*

Cela me manque de n’embrasser plus

Ce con de virus a eu Dibango

Certains poumons n’en sont pas revenus

Lui qui soufflait si bien dans son saxo

*

Ce con de virus a eu Dibango

Le monde manque de chrysanthèmes

Lui qui soufflait si bien dans son saxo

Rien ne sera du pareil au même

*

Le monde manque de chrysanthèmes

Pourtant le soleil est toujours poudré

Rien ne sera du pareil au même

Et l’avenir de nos enfants, doré ?

*

Pourtant le soleil est toujours poudré

J’aimerais la vie simplement belle

Et l’avenir de nos enfants, doré ?

On a vu la première hirondelle

Odile Cornuz / 24.3.20

Pantoum / 18

Sous la fenêtre dans mes pantoufles

Est-ce un piège ou une énigme ?

Je suis parcourue de souffles

Feu dans le ventre : borborygmes ?

*

Est-ce un piège ou une énigme ?

J’imagine des mots parallèles

Feu dans le ventre : borborygmes ?

Le regard est-il personnel ?

*

J’imagine des mots parallèles

J’appelle les renards ambulants

Le regard est-il personnel ?

J’appelle le rêve, qu’il soit brûlant !

*

J’appelle les renards ambulants

Je laisse revenir les absents

J’appelle le rêve, qu’il soit brûlant !

Je ferme ses yeux de safran

*

Je laisse revenir les absents

Maman j’trouve qu’tu sens l’jambon

Je ferme ses yeux de safran

Et j’imagine qu’suis un bonbon

*

Maman j’trouve qu’tu sens l’jambon

D’ailleurs à propos l’homme est-il bon ?

Et j’imagine qu’suis un bonbon

Que faut-il lire sur les fronts ?

*

D’ailleurs à propos l’homme est-il bon ?

Il paraît qu’il meurt de faim

Que faut-il lire sur les fronts ?

Les fronts d’où s’échappe la fin

*

Il paraît qu’il meurt de faim

Je te serre fort je t’emmitoufle

Les fronts d’où s’échappe la fin

Sous la fenêtre dans mes pantoufles

Orélie Fuchs / 24.3.20

Pantoum / 17

Parasol vert pétant abandonné
Et tout paraît figé au fond de tout
Tapis zébré en teinte citronnée
On n’observe que du vide partout

Et tout paraît figé au fond de tout
Trottoirs espaces et parcs nous désertent
On n’observe que du vide partout
Ambulanciers sans répit en alerte

Trottoirs espaces et parcs nous désertent
Sait-on encor comment se saluer
Ambulanciers sans répit en alerte
On vit de bord en bord éberlué

Sait-on encor comment se saluer
Qui veut aller jouer sur la terrasse
On vit de bord en bord éberlué
Tu vois ce n’est plus que le temps qui passe

Qui veut aller jouer sur la terrasse
Avec qui peut-on à présent parler
Tu vois ce n’est plus que le temps qui passe
Si nos mots ne se font plus que danger

Avec qui peut-on à présent parler
Mes lèvres cachées vos regards inquiets
Si nos mots ne se font plus danger
Douter que la distance nous défait

Mes lèvres cachées vos regards inquiets
Alors écrire ça vous le pouvez
Douter que la distance nous défait
Parasol vert pétant abandonné

Gilles F. Jobin / 24.3.20

Pantoum / 16

On en a vu bien d’autres, dira-t-on,

et si ça recommence on saura bien

user d’intelligence et de raison.

On est paré on n’a plus peur de rien.

Et si ça recommence on saura bien

comment s’y prendre pour en faire façon,

on est paré on n’a plus peur de rien.

Ça fait quand même deux générations.

*

Comment s’y prendre pour en faire façon ?

On avait cru que c’était du passé,

ça fait quand même deux générations,

est-ce étonnant qu’on ait tout oublié ?

*

On avait cru que c’était du passé

et l’on a fait de grands progrès depuis,

est-ce étonnant qu’on ait tout oublié ?

De nos jours nous avons d’autres soucis

*

et l’on a fait de grands progrès depuis,

tout est maîtrisé, suivi, contrôlé.

De nos jours nous avons d’autres soucis :

renouer avec la réalité.

*

Tout est maîtrisé, suivi, contrôlé,

mais revenons les pieds sur terre pour

renouer avec la réalité,

pour nous en sortir de ce mauvais tour.

*

Mais revenons les pieds sur terre pour

retrouver l’équilibre et la mémoire,

pour nous en sortir de ce mauvais tour.

Retrouver le lien avec notre Histoire.

*

Retrouver l’équilibre et la mémoire.

De nous en sortir, nous sommes capables.

Retrouver le lien avec notre Histoire.

L’humanité n’est pas invulnérable.

*

De nous en sortir, nous sommes capables,

pourtant, de nouveau, oubliera-t-on ?

L’humanité n’est pas invulnérable.

On en a vu bien d’autres, dira-t-on.

Walter Rosselli / 24.3.20

Pantoum / 15 (en indonésien)

Di tengah hutan, burung tetap terbang
Kasus pertama di Ambon, sudah
Anak-anak masih berenang
Seperti tidak jauh dari wabah

Kasus pertama di Ambon, sudah
Masyarakat, pagi, ke pasar
Seperti tidak jauh dari wabah
Kenapa tidak ke luar

Masyarakat, pagi, ke pasar
Di bakau seekor buaya
Kenapa tidak ke luar
Mau lihat apakah bahaya

Di bakau seekor buaya
Seperti kupu-kupu
Mau lihat apakah bahaya
Orang-orang agak bisu

Seperti kupu-kupu
Bapak, Ibu, jangan menghalang
Orang-orang agak bisu
Dengar, pikir, kemudian bilang

Bapak, Ibu, jangan menghalang
Dalam laut hiu tertawa
Dengar, pikir, kemudian bilang
Tidak mudah, jangan buta

Dalam laut hiu tertawa
Semoga situasi ini cepat baik
Tidak mudah, jangan buta
Tak bisa hanya memantik

Semoga situasi ini cepat baik
Menjauhi dari penyakit
Tak bisa hanya memantik
Kapan Tanah Air bangkit

Menjauhi dari penyakit
Ayo, ke rumah, pulang
Kapan Tanah Air bangkit
Di tengah hutan, burung tetap terbang

Loïc Degen / 23.3.20

Pantoum / 14

Soixante morts annoncés hier au soir

Ce matin c’est le flip et tout pèse

Même se regarder dans un miroir

Nulle part où je me sente à l’aise

*

Ce matin c’est le flip et tout pèse

Sais-tu comment élargir le présent ?

Nulle part où je me sente à l’aise

Comment secouer ce poids écrasant ?

*

Sais-tu comment élargir le présent ?

Pétrir du pain, peut-être, l’essentiel

Comment secouer ce poids écrasant ?

Sortir les graines de l’escarcelle

*

Pétrir du pain, peut-être, l’essentiel

Fredonner toujours « Déjeuner en paix »

Sortir les graines de l’escarcelle

Calmer les tremblements et leurs effets

*

Fredonner toujours « Déjeuner en paix »

Faire et défaire une moto Lego

Calmer les tremblements et leurs effets

Crier « y’en a marre ! » tout de go

*

Faire et défaire une moto Lego

S’asseoir, se lever, s’asseoir, se lever

Crier « y’en a marre ! » tout de go

Dessiner des poumons ensorcelés

*

S’asseoir, se lever, s’asseoir, se lever

Arrête, moineau, de broyer du noir !

Hop : ouvre les yeux, bras et pensées

Soixante morts annoncés hier au soir

Odile Cornuz / 23.3.20

Pantoum / 13

Vaincre la mort pour l’infini

Transhumanistes des technosciences

On vit pourtant l’épidémie

En prise avec notre patience

*

Transhumanistes des technosciences

C’est l’air qui manque à plein poumon

En prise avec notre patience

Qu’a-t-elle donc pu, votre raison?

*

C’est l’air qui manque à plein poumon

La toux se mêle aux chants d’oiseaux

Qu’a-t-elle donc pu, votre raison

La volonté en oripeau

*

La toux se mêle aux chants d’oiseaux

Et ton visage est à l’écran

La volonté en oripeau

Je me demande si j’aurai l’cran

*

Et ton visage est à l’écran

J’me dis c’est pas pour toute la vie

Je me demande si j’aurai l’cran

Je dis à demain, Téléphonie

*

J’me dis c’est pas pour toute la vie

Qu’on aime quelqu’un avec ivresse

Je dis à demain, Téléphonie

Je t’envoie toute ma tendresse

*

Qu’on aime quelqu’un avec ivresse

C’est un virus qui vous l’a dit

Je t’envoie toute ma tendresse

Vaincre la mort, c’est pas fini

Mélisende Navarre / 23.3.20

Pantoum / 12

Garder ses amis malgré la distance

Des horaires et des habitudes à prendre

Voilà un drôle de souvenir d’enfance

Nouvelle période, nouvelle manière d’apprendre

*

Des horaires et des habitudes à prendre

Plus de temps passé les cinq en famille

Nouvelle période, nouvelle manière d’apprendre

Les émotions changent, tournent comme des toupies

*

Plus de temps passé les cinq en famille

Profiter de tout ce qui nous entoure

Les émotions changent, tournent comme des toupies

Dans son sac la nature a plus d’un tour

*

Profiter de tout ce qui nous entoure

Prendre des nouvelles, appeler nos proches

Dans son sac la nature a plus d’un tour

Trouver plein d’astuces dans sa p’tite caboche

*

Prendre des nouvelles, appeler nos proches

Tout est prétexte à envoyer des mails

Trouver plein d’astuces dans sa p’tite caboche

Pour garder nos cœurs avec leurs deux ailes

*

Tout est prétexte à envoyer des mails

La télé-école est une expérience

Pour garder nos cœurs avec leurs deux ailes

Garder ses amis malgré la distance

Tessa Panza / 23.3.20

Pantoum / 11

Des millions de personnes confinées

Un enfant dessine un raton-laveur

Des centaines de poumons intubés

Tiens je pourrais passer l’aspirateur

*

Un enfant dessine un raton-laveur

Des piles de livres sont à lire

Tiens je pourrais passer l’aspirateur

Moins ou plus ou plus ou moins à dire

*

Des piles de livres sont à lire

S’électrise la santé mentale

Moins ou plus ou plus ou moins à dire

L’incertitude nous rend bancale

*

S’électrise la santé mentale

Plus ou moins ou moins ou plus à faire

L’incertitude nous rend bancale

L’hôpital baigne en pleine lumière

*

Plus ou moins ou moins ou plus à faire

Générations en équilibre – oui

L’hôpital baigne en pleine lumière

Certaines se battent fort pour la vie

*

Générations en équilibre – oui

Cette crise serait opportune ?

Certaines se battent fort pour la vie

Envie de s’envoler pour la lune

*

Cette crise serait opportune ?

Je ne rejoins mes proches qu’en pensées

Envie de s’envoler pour la lune

Des millions de personnes confinées

Odile Cornuz / 22.3.20

(presque) Pantoum / 10

G  u  i  t  a  r  e

S  a  x  o

V  i  o  l  o  n

H  a  u  t  b  o  i  s

*

S  a  x  o

M  e  z  z  o

H  a  u  t  b  o  i  s

A  l  t  o

*

M  e  z  z  o

T  e  n  o  r

A  l  t  o

S  o  p  r  a  n  e

*

T  e  n  o  r

D  o  l  c  e

S  o  p  r  a  n  e

F  o  r  t  e

*

D  o  l  c  e

P  r  e  s  t  o

F  o  r  t  e

L  a  r  g  o

*

P  r  e  s  t  o

S  a  l  s  a

L  a  r  g  o

R  e  g  g  a  e

*

S  a  l  s  a

T  r  i  o

R  e  g  g  a  e

D  u  o

*

T  r  i  o

J  a  z  z  e  r

D  u  o

C  h  a  n  t  e  r

*

J  a  z  z  e  r

S  u  r  v  i  v  r  e

C  h  a  n  t  e  r

R  e  v  i  v  r  e

Gilles F. Jobin / 22.3.20

 

Pantoum / 9

On pensait pas y arriver

À freiner ainsi des deux pieds

La vie reprend dans la nature

Tant qu’on se terre sous nos toitures

*

À freiner ainsi des deux pieds

À plus pouvoir tergiverser

Tant qu’on se terre sous nos toitures

Le monde respire un air plus pur

*

À plus pouvoir tergiverser

On va apprendre à s’entraider

Le monde respire un air plus pur

Une rude épreuve pour nos structures

*

On va apprendre à s’entraider

Faut revoir nos priorités

Une rude épreuve pour nos structures

On sait ce que chacun endure

*

Faut revoir nos priorités

Si ça nous rendait plus mature

On sait ce que chacun endure

On pensait pas y arriver

Sabine Dormond / 22.3.20

Pantoum / 8

La ville comme un Monopoly

Où y’a plus grand chose à jouer

Sauf peut-être vraiment la vie

A neuf heures pile lancer de bouées

*

Où y’a plus grand chose à jouer

On compte sur nos mains tous nos plis

A neuf heures pile lancer de bouées

Et toutes nos billes vers l’infini

*

On compte sur nos mains tous nos plis

Dans le quatre pièces qu’on a loué

Et toutes nos billes vers l’infini

On se s’rait cru à la télé

*

Dans le quatre pièces qu’on a loué

J’ai cru qu’on s’était envolé

La lumière crue avait joué

On était tout auréolé

*

J’ai cru qu’on s’était envolé

On était grives et étourneaux

On était tout auréolé

Et j’ai pensé à un radeau

*

On était grives et étourneaux

On lançait des « Et toi, ça va ? »

Et j’ai pensé à un radeau

Je n’aurais pas cru être là

*

On lançait des « Et toi, ça va ? »

Dans les quatre murs des hôpitaux

Je n’aurais pas cru être là

Parfois sont noirs les rideaux

*

Dans les quatre murs des hôpitaux

Le docteur matait nos gâteaux

Parfois sont noirs les rideaux

J’ai bien pensé à ce tableau

*

Le docteur matait nos gâteaux

Après deux temps c’était la nuit

J’ai bien pensé à un tableau

La ville comme un Monopoly

Orélie Fuchs / 21.3.20

Pantoum / 8 bis

La ville comme un Monopoly

Où y’a plus grand chose à jouer

Sauf peut-être vraiment la vie

A neuf heures pile lancé de bouées

*

Dans le quatre pièces qu’on a loué

On compte sur nos mains tous nos plis

On y voyage, on fait rouler

Toutes nos billes vers l’infini

*

Un jour j’ai sorti l’bikini

J’ai même pris le Ukulélé

Et alors là qu’est c’qu’on a ri

On s’est presque cru à la télé

*

On a pleuré on s’est souri

J’ai cru qu’on s’était envolé

Après deux temps c’était la nuit

Elle était tout auréolée

*

Le bonheur on l’a pas volé

Mais le matin on ressemblait

On n’a pas vraiment rigolé

A des oiseaux pris dans l’filet

*

Alors tout le monde m’a dit s’te’plaît

Fais-nous mille crêpes à gogo

Et quand les ventres étaient replets

On a trouvé ça rigolo

*

De tout poser dans l’lavabo

De penser que dans le frigo

C’est le docteur qui f’sait le beau

A mater là tous nos gâteaux

*

Car de l’autre côté du tableau

Dans les quatre murs des hôpitaux

Sans l’réconfort de leurs marmots

Parfois sont noirs les rideaux

*

Alors pour voir encore le beau

En cuisant les crêpes je m’évade

La cuillère en bois pas malade

Y’a le docteur dans le frigo

Orélie Fuchs / 21.3.20

Pantoum / 7

Pas plus de cinq dans l’espace public

Une cigogne ne fait que passer

L’exponentielle courbe statistique

Des graphiques t’affolent, monde entier

*

Une cigogne ne fait que passer

Rester chez soi serait donc l’antidote

Des graphiques t’affolent, monde entier

Tu te sens planquée comme une idiote

*

Rester chez soi serait donc l’antidote

Divers gags vidéo se diffusent

Tu te sens planquée comme une idiote

Tandis que ta tasse de thé infuse

*

Divers gags vidéo se diffusent

A tue-tête ça chante à tous balcons

Tandis que ta tasse de thé infuse

Tu aimerais en faire plus, c’est con

*

A tue-tête ça chante à tous balcons

Règle de distance : deux mètres, oui

Tu aimerais en faire plus, c’est con

Certains poumons se voient d’eau envahis

*

Règle de distance : deux mètres, oui

L’héroïsme change de texture

Certains poumons se voient d’eau envahis

Les floraisons égaient la nature

*

L’héroïsme change de texture

Ne pas céder, please, à la panique

Les floraisons égaient la nature

Pas plus de cinq dans l’espace public

Odile Cornuz / 21.3.20

Pantoum / 6

Applaudissements, sOUFfle d’humanité

Sauver, maintenir le lien, à distance

Loin, les va-et-vient, vie de la cité

Parenthèse miens&autosuffisance

*

Sauver, maintenir le lien, à distance

En temps troublés, brouillard sur les réseaux

Parenthèse miens&autosuffisance

Par la fenêtre on apprend les oiseaux

*

En temps troublés, brouillard sur les réseaux

En attente, les mots dans les limbes perdus

Par la fenêtre on apprend les oiseaux

Bon sang de bois j’ai bien été mordue !

*

En attente, les mots dans les limbes perdus

Souci légitime de souffrir l’oubli

Bon sang de bois j’ai bien été mordue !

Âpre sentiment que celui de l’ennui

*

Souci légitime de souffrir l’oubli

Repères incertains, terre meuble sous nos pieds

Âpre sentiment que celui de l’ennui

Nouvelle perception, sens renouvelés

*

Repères incertains, terre meuble sous nos pieds

Bouée, main courante, embrasse mes parents

Nouvelle perception, sens renouvelés

Maintenir le lien, ici, maintenant

*

Bouée, main courante, embrasse mes parents

En première ligne d’un printemps échoué

Maintenir le lien, ici, maintenant

Applaudissements, sOUFfle d’humanité

Florence Panza / 21.3.20

Pantoum / 5

Tout début commence par une fin

ta mort, ma vie, dit le prédateur

fin des haricots, début de la faim

fin de la proie, début des malheurs.

*

Ta mort, ma vie, dit le prédateur

ce n’est pas un choix, la mort ou la vie

fin de la proie, début des malheurs

la réalité : la bourse et la vie.

*

Ce n’est pas un choix, la mort ou la vie

garde ma bourse mais rends-moi ma vie

la réalité : la bourse et la vie

garde ta bourse, tu rendras ta vie.

*

Garde ma bourse mais rends-moi ma vie

de toute fin naît un nouveau début

garde ta bourse, tu rendras ta vie

ce sera la fin sans plus de début.

*

De toute fin naît un nouveau début

garde ta bourse, tu rendras ta vie

ce sera la fin sans plus de début

garde ma bourse mais rends-moi ma vie

*

Garde ta bourse, tu rendras ta vie.

la réalité : la bourse et la vie

garde ma bourse mais rends-moi ma vie

ce n’est pas un choix, la mort ou la vie.

*

La réalité : la bourse et la vie

fin de la proie, début des malheurs

ce n’est pas un choix, la mort ou la vie

ta mort, ma vie, dit le prédateur.

*

Fin de la proie, début des malheurs

fin des haricots, début de la faim

ta mort, ma vie, dit le prédateur.

Tout début commence par une fin.

Walter Rosselli / 21.3.20

Pantoum / 4

Respirer. C’est par là que tout commence.

Après avoir parasité une vie

le nouveau-né sort à l’air et se lance

dans un nouveau processus de survie.

*

Après avoir parasité une vie

le parasite cherche un nouvel hôte.

Dans un nouveau processus de survie

il le met à son profit, le ligote.

*

Le parasite cherche un nouvel hôte

afin d’aller et se multiplier

il le met à son profit, le ligote

qu’importe l’autre, il faut surtout gagner.

*

Afin d’aller et se multiplier

la Terre mère tombe dans l’oubli

qu’importe l’autre, il faut surtout gagner

le parasite veut chacun pour lui.

*

La Terre mère tombe dans l’oubli

elle surchauffe, elle étouffe, agonise

le parasite veut chacun pour lui

sauver la planète ou sauver sa mise ?

*

Elle surchauffe, elle étouffe, agonise

intoxiquée, exploitée, oubliée

sauver la planète ou sauver sa mise ?

N’aurait-elle pas le droit de respirer ?

*

Intoxiquée, exploitée, oubliée

la Terre mère de toute naissance

n’aurait-elle pas le droit de respirer ?

Respirer. C’est par là que tout commence.

Walter Rosselli / 21.3.20

Pantoum / 3

Nous vivons tous un étrange printemps

Des enterrements sur le mode express

Les pollens se déploient au gré des vents

Hormis le sauve-qui-peut, rien ne presse

*

Des enterrements sur le mode express

Les oiseaux pépient comme jamais

Hormis le sauve-qui-peut, rien ne presse

Nulle strie au ciel – non : plus aucun trait

*

Les oiseaux pépient comme jamais

Le monde en bascule, quel vertige

Nulle strie au ciel – non : plus aucun trait

De la terre se hissent des tiges

*

Le monde en bascule, quel vertige

Ta voix au téléphone m’apaise

De la terre se hissent des tiges

Que rien sur tes paupières ne pèse

*

Ta voix au téléphone m’apaise

Et nos fragilités se révèlent

Que rien sur tes paupières ne pèse

Pour certains poumons le sort est cruel

*

Et nos fragilités se révèlent

Qui donc n’aurait plus de quoi se torcher ?

Pour certains poumons le sort est cruel

Humez plutôt les solidarités

*

Qui donc n’aurait plus de quoi se torcher ?

Aurait-on mis notre terre à l’encan ?

Humez plutôt les solidarités

Nous vivons tous un étrange printemps

Odile Cornuz / 20.3.20

Pantoum / 2

Une coccinelle sur mon pied droit

Des morts dont on ne précise plus l’âge

Une enfant lance à l’eau des galets plats

Des appels répétés à être sages

*

Des morts dont on ne précise plus l’âge

Les cygnes en rut font claquer leurs ailes

Des appels répétés à être sages

On ne trouve plus de ce fameux gel

*

Les cygnes en rut font claquer leurs ailes

Ça flippe dans les bourses planétaires

On ne trouve plus de ce fameux gel

Dans certains poumons se raréfie l’air

*

Ça flippe dans les bourses planétaires

J’aimerais rire sans penser à rien

Dans certains poumons se raréfie l’air

Comment durablement créer du lien ?

*

J’aimerais rire sans penser à rien

D’aucuns hurlent : complot universel !

Comment durablement créer du lien ?

Pensant que quelqu’un tire des ficelles

*

D’aucuns hurlent : complot universel !

Certains promènent le chien du voisin

Pensant que quelqu’un tire des ficelles

Et le bout du tunnel, est-il si loin ?

*

Certains promènent le chien du voisin

Dans les cœurs affleure le désarroi

Et le bout du tunnel, est-il si loin ?

Une coccinelle sur mon pied droit

Odile Cornuz / 19.3.20

Pantoum / 1

Là sous mes yeux circulent des vivants

L’invisible remue certains poumons

Le calme règne pour qui a le temps

Des soignants s’épuisent, nous nous pâmons

*

L’invisible remue certains poumons

Les symboles et moi sommes déployés

Des soignants s’épuisent, nous nous pâmons

Quel choix de signes interpréter ?

*

Les symboles et moi sommes déployés

Toutes rumeurs circulent à foison

Quel choix de signes interpréter ?

Chacun ici pourrait perdre raison

*

Toutes rumeurs circulent à foison

J’aimerais glisser ma main dans la tienne

Chacun ici pourrait perdre raison

Que l’insouciance du toucher revienne

*

J’aimerais glisser ma main dans la tienne

Le printemps se pointe, bien peu farouche

Que l’insouciance du toucher revienne

Et le mot courage occupe les bouches

*

Le printemps se pointe, bien peu farouche

Je puise au fond de la sérénité

Et le mot courage occupe les bouches

Les pensées fusent dans la cité

*

Je puise au fond de la sérénité

Visant ce qui est – ou non – important

Les pensées fusent dans la cité

Là sous mes yeux circulent des vivants

Odile Cornuz / 18.3.20


 

Une coccinelle sur mon pied droit

Des morts dont on ne précise plus l’âge

Une enfant lance à l’eau des galets plats

Des appels répétés à être sages

Des morts dont on ne précise plus l’âge

Les cygnes en rut font claquer leurs ailes

Des appels répétés à être sages

On ne trouve plus de ce fameux gel

Les cygnes en rut font claquer leurs ailes

Ça flippe dans les bourses planétaires

On ne trouve plus de ce fameux gel

Dans certains poumons se raréfie l’air

Ça flippe dans les bourses planétaires

J’aimerais rire sans penser à rien

Dans certains poumons se raréfie l’air

Comment durablement créer du lien ?

J’aimerais rire sans penser à rien

D’aucuns hurlent : complot universel !

Comment durablement créer du lien ?

Pensant que quelqu’un tire des ficelles

D’aucuns hurlent : complot universel !

Certains promènent le chien du voisin

Pensant que quelqu’un tire des ficelles

Et le bout du tunnel, est-il si loin ?

Certains promènent le chien du voisin

Dans les cœurs affleure le désarroi

Et le bout du tunnel, est-il si loin ?

Une coccinelle sur mon pied droit

Odile Cornuz / 19.3.20

Là sous mes yeux circulent des vivants

L’invisible remue certains poumons

Le calme règne pour qui a le temps

Des soignants s’épuisent, nous nous pâmons

L’invisible remue certains poumons

Les symboles et moi sommes déployés

Des soignants s’épuisent, nous nous pâmons

Quel choix de signes interpréter ?

Les symboles et moi sommes déployés

Toutes rumeurs circulent à foison

Quel choix de signes interpréter ?

Chacun ici pourrait perdre raison

Toutes rumeurs circulent à foison

J’aimerais glisser ma main dans la tienne

Chacun ici pourrait perdre raison

Que l’insouciance du toucher revienne

J’aimerais glisser ma main dans la tienne

Le printemps se pointe, bien peu farouche

Que l’insouciance du toucher revienne

Et le mot courage occupe les bouches

Le printemps se pointe, bien peu farouche

Je puise au fond de la sérénité

Et le mot courage occupe les bouches

Les pensées fusent dans la cité

Je puise au fond de la sérénité

Visant ce qui est – ou non – important

Les pensées fusent dans la cité

Là sous mes yeux circulent des vivants

Odile Cornuz / 18.3.20